dimanche 23 octobre 2016

Mc 12, 38-44

Mc 12, 38-44
Lectures bibliques : Dt 24, 17-22 ; Mt 23, 1-9.23 ; Mc 12,38–13,2
Thématique : le dernier sou de la veuve ou l’au-delà de la religion
Prédication de Pascal LEFEBVRE / Tonneins, le 23/10/16
(inspiré d’une méditation de Jean-Marc Babut)

Nos lectures bibliques de ce jour mettent en évidence une sévère mise en garde de Jésus contre les « scribes », c’est-à-dire contre les experts bibliques de l’époque, les spécialistes de ce qu’on appelle le « Pentateuque », les cinq premiers livres de nos bibles.
Et comme il y est beaucoup question de lois, ces spécialistes étaient, en quelque sorte, des juristes reconnus, des professionnels du droit de Dieu.

Ce qui peut sembler surprenant, c’est que Jésus s’adresse à la foule en disant : « faites attention à ces gens-là ! »
C’est un peu comme si quelqu’un disait aujourd’hui dans le monde médical « faites attention aux médecins ! » ou dans une église « méfiez-vous des pasteurs ! »

Mais Jésus ne se contente pas de cet avertissement, vis-à-vis des professionnels d’une institution comme le Temple de Jérusalem, il donne des arguments, à travers trois reproches :

- Premièrement, il démasque leur appétit de préséance : Ils aiment, dit-il, se promener avec de longues robes (sous-entendu pour qu’on ne risque pas de les confondre avec le tout-venant), [ils aiment à] être salués sur les places publiques, avoir les premiers sièges dans les synagogues et les premières places dans les dîners (c’est-à-dire à ce que leur supériorité sur le commun des mortels soit partout reconnue).

Heureusement, ce genre de privilèges semble avoir disparu aujourd’hui pour les ecclésiastiques, en tout cas dans l’église protestante. Bien qu’ils existent encore certainement pour d’autres, comme certains hommes politiques ou quelques grands patrons, qui se croient au-dessus du lot de l’humanité commune… et parfois même au-dessus des lois… alors qu’ils devraient davantage être au service de l’intérêt commun.

- Le deuxième reproche que Jésus adresse aux scribes est assez terrible : ils dévorent les maisons des veuves.
Par cette image forte, Jésus veut dire que ces gens s’emparent avec avidité des rares biens dont disposent encore les pauvres veuves.

De par leur situation prépondérante de savoir et le monopole qu’ils prétendaient détenir au sujet des choses de Dieu, il était relativement facile, pour ces scribes, de manipuler les fidèles, à commencer par les plus fragiles : les veuves.
Sans trop de difficultés, on imagine que ces experts de la « Loi de Dieu » devaient réussir à persuader les fidèles à consentir à quelques offrandes extraordinaires, à quelques sacrifices, pour embellir et enrichir le Temple, la maison de Dieu.
Il ne s’agissait sans doute pas d’« enrichissement personnel », mais de ce qu’on appellerait aujourd’hui : « abus de faiblesse » ou « trafic d’influence », toujours pour la bonne cause, c’est-à-dire pour leur parti : celui de Dieu ou plus exactement celui du Temple.

Bien sûr, une telle attitude, qui consiste à s’attaquer aux plus faibles de la société, est d’autant plus contestable aux yeux de Jésus que le livre du Deutéronome demande, au contraire, d’être attentif et de secourir l’orphelin et la veuve, car ceux-ci pouvaient se trouver du jour au lendemain sans protection et sans moyen de subsistance.

- Enfin, le troisième raté de ces gens, qui se sentaient pourtant si justes devant Dieu, c’est leurs « longues prières ».
Le problème, bien évidemment, ce n’est pas le fait de prier, en tant que tel, mais c’est que ces prières soient faites en public, pour se faire voir, « pour l’apparence » précise Jésus.

Ainsi, la prière se trouve complètement détournée de son sens. Elle ne sert plus à entrer dans une relation de cœur-à-cœur avec Dieu, dans le secret (cf. Mt 6, 5-8), mais elle est instrumentalisée, au service d’un autre but : briller aux yeux des hommes, se glorifier, montrer qu’on est appliqué à cette « discipline » et qu’on mérite bien la position magistrale d’homme de Dieu.

Ensuite, nous avons entendu l’épisode de la veuve et de son offrande dans le Temple.
Pour interpréter le commentaire de Jésus, il faut garder en mémoire ce qui vient d’être dit au sujet des scribes, car ce n’est pas un hasard si l’évangéliste Marc place ce récit après cette sévère critique à l’égard des Religieux qui ont un lien avec le Temple.

A côté des riches donateurs qui offrent au Temple des dons importants, qui ne représentent que leur superflu, Jésus observe une veuve, visiblement des plus pauvres, qui jette dans le tronc quelques piécettes, qui représenteraient peut-être quelques centimes d’euros de nos jours. Et il commente ainsi son geste : « En vérité, je vous le dis, cette veuve pauvre a mis plus que tous ceux qui mettent dans le tronc. Car tous ont mis en prenant sur leur superflu ; mais elle, elle a pris sur sa misère  (sur son indigence) pour mettre tout ce qu’elle possédait, tout ce qu’elle avait pour vivre (toute sa subsistance). »

Il y a sans doute plusieurs niveaux de lecture de ce commentaire :

Le terme grec « bios » veut dire « [sa] vie, [son] bien, [ses] ressource[s] ». Autrement dit, toute sa vie, tout son être.
La pauvre femme n’a pas simplement jeté dans le tronc ce qu’elle avait en plus, elle a donné de sa personne, elle a offert ce qui lui était nécessaire pour vivre.

Mais la question fondamentale qu’on peut se poser, c’est de savoir si ce que Jésus observe ici, comme un spectateur étonné, comme quelque chose de stupéfiant, est pour lui une bonne chose ou une mauvaise chose ? Car il ne semble porter aucun jugement moral à ce sujet.

J’aurais tendance à répondre, sans doute, les deux à la fois :

- Ce qu’il constate avec admiration, c’est le geste de don de soi que réalise cette pauvre femme. Elle n’est pas dans le calcul. Son geste d’offrande est un geste du cœur, qui montre sa totale confiance en Dieu, son amour, sa générosité, sa dévotion envers son Dieu.
Jésus semble donc pointer ici le geste gratuit de don de soi, le geste impressionnant de générosité de cette pauvre femme. On pourrait dire son geste d’amour pour Dieu.

- Mais, en même temps, si on relie/t ce que Jésus pointe ici avec ce qu’il dit avant et après cette scène (la critique des scribes, d’une part, l’annonce de la ruine du temple, d’autre part), on peut aussi constater que le Maitre est en réalité interrogatif vis-à-vis de ce geste, non pas à cause de l’offrande bouleversante d’amour pour Dieu de cette femme, mais à cause du Temple, à cause de ce que la Religion instituée fait faire à cette pauvre veuve. D’une certaine manière, ce geste est dramatique.  

Il est évident que cette femme est sincèrement convaincue de ce qu’elle fait. Elle y met tout son cœur. Mais, fondamentalement, n’a-t-elle pas été abusée ?... abusée par la Religion et les Religieux ?

Qui lui demande tant de sacrifices ? Dieu ou les Religieux du Temple ?

Ce que cette femme croit donner à Dieu – par son geste sincère – va-t-il vraiment à Dieu ? Ne va-t-il pas plutôt à tous ces Religieux, ces scribes et ces spécialistes de la Religion, qui vivent des offrandes du Temple… et que Jésus critique si sévèrement ?

Fondamentalement, Dieu exige-t-il de nous de tels sacrifices ?

Voyez-vous en écoutant Jésus parler de son Père dans les évangiles (d’un Dieu bon, miséricordieux, compatissant : un Dieu qui donne, qui se donne et qui pourvoit au bien de toutes ses créatures), j’ai bien l’impression que « non ».

Non, Dieu ne réclame rien de nous, aucun sacrifice, aucun exploit, aucune privation ! Ce qu’il veut de nous, ce n’est pas pour Lui qu’il le désire, mais pour nous… nous, tous ensemble.

Ce qu’il veut de nous, c’est que nous nous mettions enfin à l’écoute de son Evangile de l’amour du prochain. Et c’est sans doute ce que les Religieux du temps de Jésus n’ont pas compris, puisqu’au lieu de s’occuper de cette pauvre femme, de cette veuve, à qui ils devaient « secours » et « solidarité » – comme le prévoit le Deutéronome, – en réalité, ils font le contraire :
Sous prétexte de lois et de volonté divine, leurs discours incitent cette pauvre femme à se saigner aux quatre veines, pour donner le peu dont elle dispose, pour s’appauvrir encore davantage, en offrant même ses derniers moyens de subsistance, quitte à se retrouver dans la misère.

Alors, certes, son geste est beau et bouleversant, parce qu’il témoigne de son amour pour Dieu. Mais, il est aussi inutile, à la fois dérisoire et absurde.
On pourrait même dire qu’il est, d’une certaine manière, contraire à ce que Dieu attend des humains.

Dieu n’attend rien pour Lui-même. Il n’attend pas de nous quelques sacrifices, pour mériter son amour ou notre paradis. Il attend tout simplement l’amour, la paix et la justice. Ce que Jésus appelle à respecter dans la loi : « la justice, la miséricorde et la fidélité (la foi) » (cf. Mt 23,23) comme nous l’avons entendu.

Dieu attend que les humains enfin se respectent et s’aiment comme des frères. Il attend que les humains prennent soin de cette pauvre femme, comme la justice le prévoit – tout simplement – plutôt que de lui faire croire qu’elle honorera Dieu, en se privant de tout.

Alors, à qui profite le discours religieux, sinon aux scribes eux-mêmes, aux prétendus « experts » des choses de Dieu ?… c’est-à-dire à ceux qui vivent du système, de la religion instituée autour du Temple, et qui tirent, sans doute, quelques avantages de la générosité des pratiquants.

C’est évident, ceux qui imposent toutes ces charges aux autres, notamment aux plus pauvres, sont ceux qui ne les vivent pas eux-mêmes et en qui profitent allégrement.
(C’est d’ailleurs, ce que beaucoup de nos contemporains reprochent aujourd’hui à certains hommes politiques : de profiter du système, en étant complètement déconnectés des réalités quotidiennes.)
C’est précisément ce que Jésus reprochait aux scribes et aux pharisiens. Je cite : « ils disent et ne font pas. Ils lient de pesants fardeaux et les mettent sur les épaules des hommes, alors qu’eux-mêmes se refusent à les remuer du doigt » (Mt 23,4).

On peut donc lire dans cette scène, à la fois, une admiration de Jésus envers le geste de générosité de cette veuve, mais, plus encore, une critique sévère de la Religion, qui, d’une certaine manière, est doublement fautive : elle ne s’attache pas à pratiquer la justice, en étant solidaire de cette veuve, mais, plus grave encore, elle fait croire à cette femme que Dieu attendrait de nous – et d’elle en particulier – quelques sacrifices.

Il suffit, pour s’en rendre compte, de relire ce que disaient déjà des prophètes comme Osée, par exemple (voir aussi Es 1, 10-17), qui parlent au nom de Dieu. Je vous cite quelques versets : « Qu'on agisse avec bonté : voilà ce que je désire beaucoup plus que des sacrifices ; et qu'on me reconnaisse comme Dieu, plutôt que de consumer des animaux sur l'autel » (Os 6,6).
Ou encore d’écouter un scribe converti au message de Jésus : « [Dieu] est l’unique… L’aimer de tout son cœur … et aimer son prochain comme soi-même, cela vaut mieux que tous les holocaustes et sacrifices » (cf. Mc 12, 28-34).

Bien des passages bibliques nous montrent que Dieu n’attend pas de nous une charge, quelque chose d’éprouvant ou quelques peines, en vue d’expier nos erreurs.
Ce qu’il veut, c’est notre épanouissement et notre bonheur. Mais celui-ci ne peut advenir sans justice, sans amour. Car le bonheur évangélique n’est pas un bonheur individualiste, lié aux plaisirs égoïstes, au « chacun pour soi ». C’est un bonheur fraternel et solidaire, promis à tous… un bonheur dans la relation juste à autrui. C’est ce dont parlent les béatitudes ou le Psaume 1 : un bonheur lié à la justice.  

On comprend donc mieux pourquoi Jésus critique les Religieux et annonce la destruction du Temple. Ce qu’il annonce, c’est la disparition, un jour ou l’autre, de cette idée d’un Dieu marchand… un Dieu dont il faudrait acheter la vie… un Dieu qu’il faudrait payer pour racheter ses fautes… un Dieu qui demanderait et se satisferait de sacrifices.

De deux choses l’une : Ou Dieu est un Dieu d’amour, un Dieu de grâce, qui aime gratuitement et qui pardonne par amour… ou Dieu est un Dieu marchand, un Dieu dont il faut mériter le pardon, en rachetant nos péchés, et qu’il faut satisfaire par quelques sacrifices, pour obtenir réparation de nos fautes.

Le premier, c’est le Dieu de Jésus-Christ. Le second, c’est le Dieu de la Religion. Mais le problème, c’est que la Religion n’a pas supporté le message révolutionnaire de Jésus. Et, le paradoxe, c’est qu’elle a même tenté de récupérer son discours, en le détournant, puisqu’elle a osé interpréter sa mort sur la croix comme un sacrifice. Ce qui est totalement contraire à la manière dont Jésus parle de Dieu, son Père (comme un Dieu gratuit), mais aussi contraire à ses gestes, puisque Jésus avait chassé les marchands du Temple, pour mettre fin au commerce des sacrifices d’animaux destinés à Dieu : une manière de faire comprendre à ses contemporains que Dieu n’exige rien de tel.

En bref, Jésus annonce la ruine du Temple. Il annonce que cette Religion de l’échange – du commerce avec Dieu – va mourir, pour laisser place à un Dieu gratuit et accessible à tous. Un Dieu qui n’exige rien pour Lui-même, mais qui se donne totalement. Et c’est pour cela que le geste de cette femme est juste : elle est dans le don de soi. D’une certaine façon, sans le savoir, sans en avoir vraiment conscience, elle imite la manière d’agir de Dieu : elle se donne pleinement… elle donne ce qu’elle est, ce qu’elle a, sans compter.

Avant de conclure, je voudrais vous lire quelques phrases d’une prédication du pasteur Louis Simon, dont je partage la lecture. Il analyse le geste de cette veuve comme un acte fou, un acte hors norme de don de soi, un acte asocial, quasiment secret. Pour lui, cet acte redoutable est comme « une sorte de meurtre silencieux contre soi-même ». Il nous projette au-delà de toute morale, au-delà de toute religion. Exactement comme le fera Jésus en acceptant la mort sur la croix.
Et du coup, cela nous interroge et remet en cause notre manière de penser la croix, non pas comme un sacrifice, mais comme le don de soi radical de celui qui a déjà tout donné.

Je vous lis quelques lignes : « [il y a une] totale opposition entre deux lectures : ou bien Jésus sur la croix est offert en sacrifice, ou bien Jésus meurt comme cette veuve, n’ayant aucun sacrifice à offrir, car ayant réellement déjà tout donné : [c’est la] mort du Pauvre absolu.
[Mais] si Dieu n’est plus le Dieu des sacrifices, comment parler de lui désormais ? Pour l’Evangile, Dieu est celui qui donne. Il ne reçoit, ni ne prend rien, il donne tout ce qu’il a, tout ce qu’il est. Il est amour, même sans contrepartie, sans retour. Il est grâce. Rien que grâce. » [Sans le savoir, la pauvre femme agit à la manière de Dieu… comme le fera aussi Jésus. Ça s’appelle l’amour, la liberté, la gratuité !]

* Alors, pour conclure sur quelque chose de plus concret et de plus basique… puisqu’il s’agit avec notre passage d’offrandes au Temple… on peut se demander pourquoi donner de l’argent à l’Eglise, encore aujourd’hui ?

Vous l’avez compris, ce n’est certainement pas pour plaire à Dieu… pour avoir la certitude d’aller au paradis… ni pour acheter une bonne conscience ou l’indulgence de Dieu, par rapport à quelques fautes que nous aurions pu commettre. C’est inutile de ce point de vue. Soyez-en assurés : l’amour de Dieu nous est offert gratuitement !

Non. Si vous avez envie de donner quelques offrandes à l’Eglise, aujourd’hui, comme hier ou un autre jour, c’est pour lui permettre de poursuivre sa mission étonnante : annoncer la Bonne Nouvelle d’un Dieu gratuit, un Dieu qui aime sans sacrifice et sans condition.

Si nous donnons, ce n’est pas pour faire vivre, en tant que telle, une institution qui s’appellerait l’Eglise, permettant au passage de nourrir quelques pasteurs – ça c’est accessoire : c’est un moyen, pas un but –. C’est, avant tout, pour permettre à un message, à une Bonne Nouvelle de circuler, de se diffuser, d’être proclamé(e).

Le paradoxe, c’est que cette Bonne Nouvelle annonce la fin de la Religion du marchandage, du commerce avec Dieu, pour proclamer l’amour inconditionnel de Dieu, pour proclamer sa Grâce.

Le Dieu de Jésus-Christ ne demande jamais à être servi ou honoré aux dépens de la vie des humains – c’est ce que nous rappelle la diatribe de Jésus envers les scribes.
Dieu veut la miséricorde et la justice, pour la simple et bonne raison que nous sommes tous liés. D’un point de vue spirituel, tous les humains sont unis les uns aux autres… et nous sommes tous liés à Dieu (que nous voulions ou non le savoir).

Jésus a une formule pour exprimer cette communion invisible avec Dieu : « Je suis dans le Père, comme le Père est en moi » dit-il (Jn 14,10-11). Croyez bien que cette affirmation n’est pas réservée à Jésus, mais à tous les humains, tous les enfants de Dieu.
L’amour de Dieu agit en nous : Nous sommes dans le Père comme le Père est en nous.
C’est peut-être ce qu’avait compris cette pauvre veuve, en se donnant totalement dans son offrande. C’était sa manière de se sentir en pleine communion avec Dieu, de se savoir unie à Lui. 


Amen.

dimanche 9 octobre 2016

Mc 12, 28-34

Lectures bibliques : Mc 12, 28-34 ; Mt 5, 43-48 ; Q 6, 20-23 (ou Lc 6, 20-23)
(= Voir ci-dessous, après la prédication)
Thématique : l’amour universel du prochain, pour répondre à l’amour inconditionnel de Dieu
Prédication de Pascal LEFEBVRE / Marmande, le 08/10/16.
(Inspiré d’une méditation de Jean Marc Babut)

Prédication

* Nous abordons, aujourd’hui, avec ce passage de l’Evangile, ce qui est au cœur de l’enseignement de Jésus, ce qui est considéré comme « les commandements les plus importants » pour les croyants. Et c’est justement la question que pose le scribe à Jésus : Qu’est-ce qui est le plus important de tout ? Qu’est-ce qui est fondamental et prioritaire ?

Evidement, nous connaissons tous la réponse de Jésus – qui constitue ce qu’on appelle « le sommaire de la loi » : l’amour de Dieu et l’amour du prochain.[1]

Pourtant, en les relisant ce texte, deux choses peuvent nous interroger sur le fond :
-       Premièrement, comment est-il possible de nous demander d’aimer ? L’amour peut-il vraiment être commandé ? (puisque nous appelons ça un « commandement »)
-       Deuxièmement, que signifie vraiment le fait que dans ce passage de l’Evangile les deux « commandements » semblent intrinsèquement liés… que l’amour de Dieu et du prochain soient mis sur le même niveau d’exigence ?

* Le premier point porte sur l’exhortation, l’injonction « tu aimeras Dieu… » ou… « tu aimeras ton prochain… ». Il est évidement que cela pose difficulté, si nous pensons à l’amour tel que nous le concevons souvent, c‘est-à-dire comme un « sentiment ».

En effet, un sentiment ne se commande pas ; il ne se décrète pas… alors comment peut-on nous appeler à aimer ?
La réponse est relativement simple : pour la Bible, « aimer » est moins une affaire de sentiment qu’une façon d’être avec l’autre ou d’agir en sa faveur.

Lorsque Jésus appelle par exemple ses disciples à aimer sans condition, sans espoir de retour… jusqu’à « aimer ses ennemis » (Mt 5, 43-48)… il est évident qu’il ne nous demande pas d’éprouver un sentiment de sympathie ou d’attachement envers des ennemis ou des personnes qui nous font du mal. Ce qu’il demande, c’est de stopper la violence (c’est d’éviter d’entrer dans l’engrenage de la réciprocité, de la relation de miroir « donnant-donnant »)… c’est d’agir avec eux, comme s’ils n’étaient pas nos ennemis… c’est de les considérer d’abord comme des frères, comme des égaux.

« Aimer » est ici de l’ordre du faire, de l’agir… des actes… plutôt que d’un sentiment.

« Aimer Dieu », c’est chercher à faire ce qu’il attend de nous… à savoir, agir de la même manière que Lui. Ce que Jésus explique dans l’Evangile, lorsqu’il appelle ses disciples à imiter Dieu : « soyez miséricordieux, comme Dieu est miséricordieux »… soyez bons avec les autres, comme Dieu est bon avec vous et avec chacun… sans condition (cf. Lc 6,36 ; Mt 5, 45 ; voir aussi Ep 4,32).

Et « aimer notre prochain », c’est commencer par le considérer comme « notre prochain », comme « un frère »… et le traiter ainsi comme Dieu l’attend de nous, c’est-à-dire comme Dieu le traite lui-même, avec bienveillance.

Il ne s’agit donc pas d’un sentiment.
Pour la Bible, « aimer », c’est d’abord « agir », « faire », « entreprendre ».
Il s’agit d’entrer dans une nouvelle mentalité… où l’on prend l’initiative du bien, du « bien être » et du « bien faire », quelle que soit la personne en face de nous… qu’elle le mérite /ou non… qu’elle soit sympathique /ou non… qu’elle soit proche (de ma famille, de mon cercle d’amis, de ma religion, de mon pays) /ou non.
Pour la Bible, « aimer », c’est d’abord « faire »… agir positivement, de façon inconditionnelle.

En ce sens, l’exhortation « tu aimeras ton prochain, comme toi-même » peut nous éclairer. On peut la comprendre à la lumière de la « règle d’or ». Elle n’est qu’un manière abrégée de dire : « tu aimeras ton prochain, comme tu aimerais qu’on t’aime toi-même ».
Autrement dit, « tu agiras avec ton prochain, comme tu voudrais que l’on agisse pour toi… et comme tu agirais toi-même pour toi ».
Ce que Jésus affirme ailleurs en disant : « Tout ce que vous voulez que les homme fassent pour vous, faites-le vous-mêmes [d’abord] pour eux ! » (Mt 7,12 ; Lc 6,31). En d’autres termes : prenez l’initiative du bien !

* Le deuxième point à souligner, c’est que ce passage de l’Evangile semble lier les deux aspects : « l’amour de Dieu » et « l’amour du prochain », de façon inséparable l’un de l’autre… comme s’il s’agissait, en fait, d’une seule et même chose : comment et pourquoi ? (B) Et qu’est-ce qui est vraiment nouveau dans cet enseignement ? (A)

(A) Je commencerai par essayer de vous montrer qu’il y a ici deux nouveautés dans la manière de penser de Jésus. Si nous rapprochons ce que Jésus a fait (par ses actes et ses guérisons) de ce qu’il dit, ici (d’aimer notre prochain), nous pouvons reconsidérer la définition du prochain par rapport au Premier Testament :

« (1) Tout d’abord, quand Jésus parle du prochain, il ne se réfère pas seulement au compatriote coreligionnaire ou à l'étranger qui, vivant en Israël, s’est déjà plus ou moins assimilé, membre de la même communauté nationale, sociale ou religieuse.
Pour Jésus, on le voit en le suivant au fil de l’Évangile, le prochain c’est aussi, par exemple, le possédé de Gérasa de l’autre côté du lac – vous savez bien, celui qui couchait dans les cimetières et que personne ne pouvait maîtriser –.
Pour Jésus, le prochain c'est encore la femme syro-phénicienne qui venait le supplier de délivrer sa fillette d’un démon.
Pour Jésus le prochain, ce sont encore ces quatre mille païens qu’il a nourris en partageant avec eux ce que la petite troupe [des disciples] avait prévu pour son propre repas.
Cette façon que Jésus a de voir un prochain même dans l’étranger païen qu’il rencontre, ça c’est vraiment nouveau. »[2]

Et, bien sûr, cette nouveauté est d’une grande actualité pour nous. Car, dans notre situation contemporaine, nous comprenons, du coup, que nos prochains, ce ne sont pas seulement nos frères chrétiens, ni nos compatriotes de la République française… ce sont aussi les étrangers, les migrants, les réfugiés… que nous avons bien du mal à accepter ou à accueillir.
La tentation du repli sur soi et du communautarisme (même à l’échelle de la République ou de la Nation – on parle de « communauté nationale ») est grande, en ces temps difficiles. Même en Angleterre, un mouvement de « préférence nationale » se fait jour. (Nous en avons entendu parlé cette semaine aux infos sur Arte.) Certains militent pour donner prioritairement du travail aux uns plutôt qu’aux autres, en raison de leur origine ou de leur nationalité… oubliant du même coup que le prochain, ce n’est pas seulement celui qui a le même drapeau que moi sur sa carte d’identité, c’est plus largement tout être humain.

« (2) La seconde nouveauté qui apparaît quand Jésus cite lui-même et rapproche les deux commandements du sommaire de la loi, c'est ce qu'aimer veut dire pour lui.
Dans le livre du Lévitique la phrase « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » vient à la fin de toute une série de recommandations concernant précisément « le prochain » au sens étroit du mot : le compatriote, le coreligionnaire.
On s'aperçoit alors que pour le livre du Lévitique aimer son prochain, c'est essentiellement veiller à ne pas lui faire de tort. Mais pour Jésus, si on s'en tient seulement aux quelques exemples que j'ai énumérés il y a un instant, aimer son prochain va beaucoup plus loin.
Puisqu'on n'aime vraiment qu'avec des actes, aimer son prochain c'est d'abord ne pas faire de différence selon ses origines ou ses croyances. C'est travailler à le libérer des puissances cachées qui le maintiennent en servitude. C'est lui accorder le temps qu­'il faut, c'est partager avec lui ce que l'on a, etc.
C'est tout l'Evangile qu'on pourrait citer ici pour illustrer ce que Jésus entend par aimer son prochain. »

On le voit, aimer son prochain (à la manière de Jésus), cela n'a rien d'évident. C’est exigeant. Cela réclame des actes et cela engage toute la vie. C'est peut-être pour cela que nous y sommes rarement champions.

[ Et c’est peut-être pour cela aussi que Jésus annonce à ses disciples, qui adopteront cette nouvelle manière de voir les choses (cette nouvelle mentalité et ce nouveau comportement), qu’ils risquent de rencontrer un certain nombre de difficultés, d’oppositions et de critiques, voire de persécutions…  car quand on veut étendre la définition du prochain, de façon universelle, à tout être humain, on s’oppose forcément à ceux qui veulent limiter cette définition en fonction de leurs seuls intérêts : économiques, politiques ou religieux, pour protéger leurs privilèges, leur façon de voir, leur avoir et leur pouvoir.

On comprend donc mieux pourquoi Jésus, dans ce qu’on appelle habituellement « les béatitudes » (ici, reconstituées dans la Source Q, en Q 6, 20-23, ou aussi en Lc 6, 20-23), prévient ses disciples qu’ils risquent de rencontrer l’hostilité de tous ceux qui préfèrent privilégier leur communauté religieuse ou nationale.

Mais Jésus assortit cet avertissement, cette menace de persécution qui pèse sur ses disciples, d’une promesse : C’est pour ça qu’il dit « Heureux… » ou « quel bonheur pour vous… » à ses disciples. Cette promesse, c’est celle d’être du bon côté : celui des Justes… celui de Dieu, qui aime tout être humain de façon inconditionnelle, puisque, indistinctement, il fait lever son soleil sur les bons et les méchants, et pleuvoir sur les justes et les injustes (Mt 5,45).

Pour Jésus… ceux qui agissent en faveur de tous… et pas seulement d’eux-mêmes, de leurs intérêts ou de ceux de leurs proches… sont dans la bonne voie : celle du royaume, du monde nouveau de Dieu.
Même s’ils risquent l’hostilité de beaucoup, ils sont en réalité dans la lignée glorieuse des prophètes, des porte-parole de Dieu, qui, tels Esaïe ou Osée (par ex Es 1, 10-17 ; Os 6,6), appelaient à ne pas seulement aimer Dieu par des rites, des traditions religieuses ou des sacrifices, mais à véritablement agir envers le prochain avec bonté, générosité et solidarité, notamment envers les plus petits, les plus faibles, parmi nos frères. ]

(B) Enfin, pour essayer de répondre à la question que j’évoquais tout à l’heure… à savoir que l’Evangile – et même l’enseignement de l’Eglise – semble lier les deux « commandements » : « l’amour de Dieu » et « l’amour du prochain », de façon inséparable l’un de l’autre, comme s’il s’agissait, d’une seule et même chose… la raison en est explicitée à plusieurs endroits du Nouveau Testament :

- D’une part, Jésus l’affirme ici (Mc 12, 28-34) : Aimer Dieu et aimer son prochain sont aussi importants l’un que l’autre.

- D’autre part, la première épitre de Jean le confirme (cf. 1 Jn 2, 7-1 ; 4, 20) : On ne peut pas aimer Dieu, si on aime pas son prochain. Mais aimer son prochain ne remplace pas l’amour que nous devons à Dieu. Les deux commandements vont de pair. Ce que Jean dit de la façon suivante : « Celui qui n’aime pas son frère, qu’il voit, ne peut pas aimer Dieu qu’il ne voit pas » (1 Jn 4, 20b).

- Enfin, nous avons la parabole du jugement dernier (en Mt 25, 31-46) où il est fait un lien explicite entre le plus petit parmi nos frères et le Christ lui-même. Agir pour son prochain, c’est d’une certaine manière, agir pour le Christ lui-même. Nous ne sommes pas des êtres isolés, mais en communion les uns avec les autres. Il n’y a pas de séparation entre l’autre, le Christ et moi : nous sommes unis par Dieu, par le fait que nous soyons tous « enfants de Dieu ».

Ainsi, comme le souligne Jésus, si les deux commandements d’amour ne peuvent être honorés qu’ensemble, c’est pour nous rappeler que, contrairement à ce que nous pensons, nous sommes incapables de vivre seuls. C’est pour nous dissuader de penser « chacun pour soi », pour nous dissuader de comprendre notre vie, comme si nous étions le centre du monde et que tout ce qui est autour de nous n'était là que pour être à notre service.

Au contraire, l’Evangile affirme que notre vie n’est viable et épanouie que si elle est tournée vers un autre que nous, vers Dieu qui veut nous sauver de nos mauvais démons (de notre égocentrisme et de notre égoïsme, pour nous libérer et nous guérir) et vers celui que Jésus appelle « le prochain », qui nous permet de nous ouvrir au monde, de nous dépasser et d’élargir nos horizons… puisqu’il attend de nous que nous lui offrions un peu de notre personne : un peu de notre temps, un peu de ce que nous avons, un peu de notre cœur.

* En conclusion… je crois qu’il est important de garder en mémoire ce lien entre le commandement d’amour de Dieu et du prochain… parce qu’il est révélateur de ce que Dieu lui-même attend de nous.

Dieu n’exige rien de nous pour lui-même : il n’est pas un monarque, quelque part dans le ciel, qui attendrait que nous le servions ici-bas comme des esclaves et qui nous donnerait quelques récompenses ou quelques faveurs, en échange. Non ! Jésus nous parle de Dieu comme un « Père » (un Père bien-aimant) plutôt que comme un « roi ».

Le règne de Dieu – le monde nouveau de Dieu –, dit Jésus, est à notre portée… parmi nous… entre nos mains : il est en nous (Lc 17, 20-21). Et du coup, si Dieu est en nous comme nous sommes en Lui – c’est en tout cas ce que Jésus affirme dans l’évangile de Jean, lorsqu’il dit : « je suis dans le Père comme le Père est en moi » (Jn 14, 10-11 ; 14, 20 ; 10,30) – nous pouvons comprendre, comme l’Evangile nous le confirme à nouveau ce matin, que ce que Dieu veut et attend de nous, nous concerne « nous » (nous personnellement et nous tous) et pas Lui seul, comme s’il était indépendamment de nous.

L’amour universel du prochain est une manière de répondre à l’amour de Dieu, c’est un moyen de montrer à Dieu que nous l’aimons… un moyen aussi de répondre en conscience à notre lien, notre unité et notre solidarité de destin avec tous les humains et avec la création toute entière.

Ce que Dieu attend de nous… « ce qu’il veut de nous... c'est que nous changions notre manière de vivre et que nous apprenions enfin à aimer le prochain qui croise notre route. Et c'est en aimant ce prochain comme nous-mêmes que nous montrerons à Dieu que nous l’aimons vraiment, Lui.

Le scribe qui dialoguait avec Jésus avait déjà compris cela. C'est pourquoi Jésus conclut leur rencontre en lui disant : Tu n’es pas loin du monde nouveau de Dieu ».

Quand le double commandement d'amour sera pleinement entré dans notre vie, alors nous aussi, nous ne serons pas loin du monde nouveau de Dieu.

Amen.

Lectures bibliques

Mc 12, 28-34
Un scribe s’avança. Il les avait entendus discuter et voyait que Jésus leur avait bien répondu. Il lui demanda : « Quel est le premier de tous les commandements ? » Jésus répondit : « Le premier, c’est : Ecoute, Israël, le Seigneur notre Dieu est l’unique Seigneur ; tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta pensée et de toute ta force. Voici le second : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Il n’y a pas d’autre commandement plus grand que ceux-là. » Le scribe lui dit : « Très bien, Maître, tu as dit vrai : Il est unique et il n’y en a pas d’autre que lui, et l’aimer de tout son cœur, de toute son intelligence, de toute sa force, et aimer son prochain comme soi-même, cela vaut mieux que tous les holocaustes et sacrifices. » Jésus, voyant qu’il avait répondu avec sagesse, lui dit : « Tu n’es pas loin du Royaume de Dieu. » Et personne n’osait plus l’interroger.

Mt 5, 43-48
« Vous avez appris qu’il a été dit : Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi. Et moi, je vous dis : Aimez vos ennemis et priez pour ceux qui vous persécutent, afin d’être vraiment les fils de votre Père qui est aux cieux, car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et les injustes. Car si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense allez-vous en avoir ? Les collecteurs d’impôts eux-mêmes n’en font-ils pas autant ? Et si vous saluez seulement vos frères, que faites-vous d’extraordinaire ? Les païens n’en font-ils pas autant ? Vous donc, vous serez parfaits comme votre Père céleste est parfait. »

Q 6, 20-23 :
En regardant ses disciples, Jésus dit: « Quel bonheur pour vous, les pauvres, parce que c'est à vous qu'est le monde nouveau de Dieu [=le royaume] !
Quel bonheur pour vous qui souffrez de la faim, parce que vous aurez de quoi être rassasiés !
Quel bonheur pour vous qui êtes à la peine, parce que vous recevrez du secours !
Quel bonheur pour vous, quand on vous insultera, qu'on vous persécutera et qu 'on dira toute sorte de mal sur vous à cause du Fils de l'homme ! Soyez alors dans la joie, dans la plus grande joie, parce qu'il y a pour vous beaucoup à recevoir dans le ciel [= en Dieu]. C' est comme cela en effet qu'on a persécuté les prophètes qui sont venus avant vous. »



[1] Ce sont deux versets du Premier Testament. Le premier est tiré du Deutéronome : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta pensée et de toute ta force ». Le second vient du Lévitique : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même ».
[2] Les paragraphes entre « … » citent Jean Marc Babut, dans Actualité de Marc, Cerf, 2002, p.270-275.

dimanche 2 octobre 2016

Et votre récompense sera grande

Et votre récompense sera grande…

Lectures bibliques : Proverbes 11, 17-19 ; Lc 6, 31-38 ; Mt 6, 1-6 ; Mt 10, 42
Voir plus bas pour lire les textes = après la prédication
Thématique : la récompense ou la loi de cause à effet
Prédication de Pascal LEFEBVRE / Tonneins, le 02/10/16.

* La méditation que je vous propose aujourd’hui est un peu particulière. Elle va consister à nous interroger sur deux points : D’une part, sur les images et les représentations de Dieu que nous avons en tête – et voir ce que Jésus, lui, nous dit de Dieu –. Et, d’autre part, sur la notion de « récompense » qu’on trouve dans les différents passages entendus ce matin.

Beaucoup de croyants (de différentes religions) pensent que Dieu est comme un grand Juge dans le ciel : un Être suprême qui – lors d’un jugement, soit à notre mort, soit à la fin des temps – nous récompensera ou nous punira en fonction de nos actes. C’est le Dieu de la rétribution.
En conséquence, nous avons tout intérêt à obéir aux commandements et aux lois qui sont dans la Bible, pour faire parti des bons élèves et obtenir, en temps voulu, des récompenses. Et, dans le cas contraire, on peut s’attendre au pire.

Ce que je voudrais vous montrer, c’est que cette façon de voir ne correspond pas du tout à ce que Jésus pense et dit de son Père, de notre Père.

En fait, Jésus pense Dieu un cran au-dessus. Pour lui, Dieu n’est pas le dieu de la morale, un dieu qui juge de ce qui est bien ou mal, un dieu qui distribue des bons points ou des punitions, mais le vrai Dieu, le Dieu de la Vie, qui est au-delà, au-dessus de ce dieu moral. Il est tout-Autre que nous l’imaginons, nous les humains. C’est le Dieu au-dessus de dieu.

C’est un Dieu gratuit, un Dieu d’amour : un Dieu qui agit de façon inconditionnelle… autrement dit, le Dieu de la grâce.

Cela, Jésus l’exprime de différentes façons : par exemple, avec la parabole du fils prodigue (Lc 15), qui présente Dieu comme un père de famille bien-aimant, qui accueille son fils pécheur et « indigne », sans aucune condition, sans un seul reproche, mais qui, au contraire, se réjouit de son retour, et organise un grand festin pour fêter la résurrection, le retour à la vie de son enfant.

Ou encore, dans ses sermons, Jésus affirme et témoigne d’un Dieu gratuit : un Dieu qui « fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber sa pluie sur les justes et les injustes » (Mt 5,45), c’est-à-dire un Dieu qui n’est pas un comptable, qui donne à tous, sans distinction… au-delà des questions de bien et de mal (qui relèvent seulement du monde terrestre, du monde de la relativité, qui est le nôtre.)

Bien sûr, cela nous le savons tous… mais, je crois, en réalité, que nous avons du mal à l’accepter.
A notre niveau humain, nous pouvons nous dire : Si Jésus dit vrai… mais alors, tout est remis en cause. A quoi bon faire des efforts… s’il n’y a pas de récompense dans les cieux ? A quoi bon essayer d’être juste… s’il n’y a pas de punition pour les injustes ?

Nous avons bien des difficultés à penser et à accepter que Dieu n’agit tout simplement pas à la manière des hommes, mais selon d’autres critères… selon le critère de l’amour (cf. Mt 25, 34-40), puisque Dieu est amour.

Alors… me direz-vous… malgré tout… pourquoi faire des efforts (essayer de vivre de façon juste) ?
La réponse est simple : pour être heureux !
Je ne connais pas de personnes méchantes qui soient vraiment heureuses et épanouies.

En réalité, c’est n’est pas pour Dieu, pour lui plaire ou lui faire plaisir, qu’il faut essayer de vivre selon la justice présentée par les Ecritures, mais c’est pour Soi, pour trouver le chemin de l’accomplissement de notre vrai Soi (de notre être véritable) en relation avec les autres… pour trouver l’épanouissement et le vrai bonheur avec les autres… comme l’explique le Psaume 1 ou les Béatitudes.

D’accord… c’est vrai ! diront certains. Mais, il y a quand même ces textes dans la Bible qui parlent de « récompenses » : C’est bien que Dieu promet quelques gratifications à ceux qui font des efforts et agissent de façon juste. Non ?

En fait, tout dépend de la manière dont nous lisons et interprétons ces textes :
- S’agit-il de promesses de récompenses, pour plus tard… c’est-à-dire d’une sorte de rétribution post-mortem, dans un paradis ?
- Ou s’agit-il de l’énoncé d’une sorte de loi de l’univers… c’est-à-dire du fait que tout acte a toujours des conséquences… que des pensées, des paroles et des actes positifs auront forcément, un jour ou l’autre, des répercussions positives… et inversement ?
Autrement dit, ne s’agit-il pas simplement de l’explicitation de la loi de cause à effet… appelée aussi « la loi de la semence », que Paul explicite en disant que l’on récolte ce que l’on sème (cf. Ga 6,7) ?

* Prenons quelques exemples :

- Lorsque l’auteur du livre des Proverbes écrit : « Le méchant recueille un salaire décevant, une récompense est assurée à qui sème la justice. La justice mène à la vie, mais qui poursuit le mal va à la mort » (cf. Prov 11, 18-19), il ne dit pas « la justice mène à la vie éternelle, au paradis… et le mal à la mort éternelle, à l’enfer » Pas du tout !

Il ne parle pas de l’au-delà, d’une rétribution post-mortem : il affirme simplement, comme Jésus le fera plus tard, que celui qui fait du bien (qui est juste te bon) est comme un bon arbre, qui produira de la vie, de bon fruits – de bons fruits, pour lui et pour les autres – … et, à contrario, le mauvais arbre produira des fruits pourris ou amères.

En d’autres termes, ce qui est annoncé ou rappelé ici, c’est une loi de la vie, une loi de l’univers, et non le résultat d’une action divine, au sens d’un dieu qui récompenserait ou qui punirait.

La conviction de l’auteur du livre des Proverbes, c’est que la sagesse et la justice conduisent à des conséquences positives et heureuses. Il est donc nécessaire de se mettre à l’écoute du Seigneur, pour trouver ce chemin de la justice, pour être inspiré et guidé positivement par Lui.

- Autre exemple dans l’évangile :

A sa manière, Jésus affirme lui aussi cette loi de causalité : « donnez et on vous donnera » ; « acquittez et vous serez acquittés » ; « ne jugez pas et vous ne serez pas jugez ». (cf. Lc 6, 38.37)

Remarquez qu’on interprète souvent ces paroles selon nos propres présupposés ou ce que la religion nous a conduit à penser :
il est dit littéralement d’après le grec « donnez et il vous sera donné » ou « donnez et l’on vous donnera ». Mais, il n’est pas dit « Donnez et Dieu vous le rendra ».

Le « on » est indéterminé. Cela veut dire que c’est la vie ou les autres qui répondront à votre manière généreuse d’agir. Et non pas que Dieu vous récompensera… ou, au contraire, vous punira, si vous êtes égoïstes ou radins.

En fait, d’après cette logique, ce n’est pas Dieu qui vous punira, dans ce dernier cas. C’est simplement que vous risquez d’obtenir des résultats négatifs, si vous adoptez des comportements mauvais :
Si vous n’éprouvez aucune compassion, ni générosité envers autrui… il est probable que les gens n’éprouvent, en retour, aucune sympathie, ni générosité pour vous. Il est rare qu’on apprécie les gens égocentriques et cupides.  

- Mais peut-être n’êtes vous pas encore convaincus par ces exemples et avez-vous en tête des passages bibliques où il est question de récompenses, comme celui que nous avons entendu il y a quelques instants :

« Aimez vos ennemis, faites du bien et prêtez sans rien espérer en retour. Alors votre récompense sera grande, et vous serez les fils du Très-Haut, car il est bon, lui, pour les ingrats et les méchants ». (cf. Lc 6,35)

Remarquez que dans cet extrait, Jésus invite ses disciples à prendre exemple sur la manière d’agir de Dieu :
Comme Dieu agit – de façon inconditionnelle et gratuite, en étant bon même pour ceux qui ne le méritent pas, même pour les ingrats et les méchants – alors, faites de même ! … agissez de cette manière, vous aussi ! – dit Jésus à ses auditeurs.

Et du coup, il nous invite (en tant que disciples) à ne pas aimer seulement ceux qui nous aiment, ou qui sont aimables, mais à aimer aussi les gens pénibles, intolérants ou impatients, et même à aimer nos ennemis : puisqu’il s’agit d’être fils ou fille de Dieu, d’adopter le même comportement gratuit et généreux que Dieu, notre Père.

Autrement dit, Jésus nous invite à ne plus opérer ni distinction, ni séparation, ni de jugement entre les bons et les méchants, les justes et les injustes (cf. Lc 6,37), pour considérer tous les humains comme des frères, des enfants de Dieu, au même titre que nous. Car, c’est ainsi que Dieu voit et considère chacun de ses enfants : pour ce qu’il est, et non pour ce qu’il fait.

Il découle de ce nouveau comportement – fondé sur la grâce de Dieu – l’invitation lancée par Jésus d’agir, sans rien espérer en retour, c’est-à-dire de façon totalement gratuite.

Mais, ce qui est surprenant dans notre passage, c’est que Jésus ajoute cette petite phrase : « alors votre récompense sera grande… »
Comment expliquer cela ? D’un côté, Jésus appelle à agir sans rien espérer en retour. De l’autre, il nous permet d’espérer une récompense. Il la promet.

Certains ont pensé que Jésus voulait dire : il y aura une récompense pour vous au paradis. Mais, à mon avis, cette interprétation ne colle pas avec ce que nous avons vu précédemment. Et puis, on reviendrait en arrière à l’idée d’un Dieu qui juge, qui récompense ou qui punit.

Je crois, pour ma part, que l’explication est ailleurs :
L’explication c’est que, pour Jésus, toute action gratuite et positive – fondée sur l’amour – aura forcément des conséquences positives…. même si on ne s’y attend pas.
Qu’on le veuille ou non, si on agit de façon désintéressée, par altruisme, en faisant le bien … on produira de bons fruits pour les autres… mais, on récoltera aussi, d’une manière ou d’une autre, de bons fruits pour soi. C’est inévitable.

Nous pouvons comprendre cela, d’une part, comme une illustration de la loi de cause à effet, et, d’autre part, à cause du mot grec (mistos) employé dans le texte de l’évangile de Luc ou aussi chez Matthieu : Le mot qu’on traduit par « récompense » veut aussi dire « salaire », c’est-à-dire qu’il évoque le résultat… l’aboutissement… la conclusion d’une action.

Il ne s’agit pas tant, pour Jésus, d’affirmer que Dieu rétribuera nos bonnes actions par une récompense, que de souligner que toute bonne action, faite par amour, par grâce, débouche forcément sur un résultat bénéfique pour celui ou celle qui en est l’auteur.

Finalement, ce que Jésus affirme ici c’est qu’en agissant de façon ordinaire (en aimant seulement ceux qui nous aiment (cf. Lc 6,32), en faisant du bien à ceux qui nous en font (cf. Lc 6, 33), en invitant ceux qui nous invitent (cf. Lc 14,12)), on ne récolte que des choses ordinaires : c’est-à-dire la même chose. On reste dans la répétition. On retourne la pareille. Et donc on fait rien d’exceptionnel.

En revanche, en agissant de façon extraordinaire – en prenant l’initiative du bien, en agissant gratuitement (là où on ce n’était pas le cas) – on récolte des fruits plus grands, des choses extraordinaires, parce qu’on devient la source d’un changement… on a initié quelque chose de nouveau… on devient créateur, fils ou fille du Dieu créateur et bon.

Et c’est ce que Jésus nous appelle à être : des créateurs d’une vie positive et heureuse, des créateurs de nouveaux comportements, des initiateurs de bonté et de générosité.
Il nous invite à être la Source de ce que nous désirons voir se concrétiser dans notre monde :

« Fais aux autres ce que tu voudrais que l’on te fasse » 
« Tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites le vous-mêmes [d’abord] pour eux » (Mt 7,12)
Dit autrement : « Tout ce dont tu veux faire l’expérience en toi-même, sois en la source dans la vie des autres ».

- Mais revenons encore à cette histoire de « récompense » à travers deux autres passages du N.T… et nous finirons cette méditation par là.

Comme vous l’avez compris, l’hypothèse interprétative que je formule, c’est que Jésus n’affirme pas à travers le mot « récompense » une forme de gratification à venir dans un au-delà, un paradis – comme beaucoup le croient – mais qu’il explique, en fait, une loi de l’existence, à savoir que toute action positive a forcément des contrecoups positifs, non pas qu’il s’agisse d’une rétribution de la part de Dieu, mais d’une conséquence naturelle cachée, d’une loi secrète de l’univers.

Vous avez sans doute remarqué que les deux passages que nous avons entendus concernant l’aumône et la prière[1] sont construits sur le même schéma de pensée.
Jésus y affirme la chose suivante :

- Soit vous faites une action positive au grand jour – comme faire l’aumône, ou comme prier devant tout le monde – et vous en obtenez une récompense, par le fait que cette action suscite une forme de reconnaissance dans votre entourage. C’est ce que Jésus reproche aux hypocrites et aux pharisiens qui se montrent pour être vus de tous et qui, ainsi, obtiennent déjà une forme de résultat, de satisfaction, par une reconnaissance mondaine, par une sorte de glorification.

- Soit, vous faite une action positive dans le secret, avec un cœur confiant. Et là, vous pouvez vous attendre à obtenir des conséquences positives de vos actes bons pour vous-mêmes, dans votre vie.
La formule « et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra » signifie qu’on ne peut pas déroger à cette loi de cause à effet : celui qui n’a pas obtenu de « récompense » sous forme de reconnaissance mondaine, l’obtiendra en/pour lui-même, dans sa vie, sous une autre forme. Il aura forcément un retour positif, car « rien ne sert perd ». Toute action bonne revient, un jour ou l’autre, sur celui qui l’a déclenchée, puisque Dieu est le Dieu de la vie, puisque nous sommes intégrés au cycle de la vie créé par Dieu.

C’est ce qu’avait bien compris l’Ecclésiaste (Qohéleth) qui affirme dans ses écrits : « Jette ton pain à la surface des eaux, car avec le temps tu le retrouveras » (Ec 11,1).

* En conclusion, il me semble qu’à la lumière des textes que nous avons entendus aujourd’hui, nous pouvons changer – si ce n’est pas encore fait – notre manière de penser à la fois « les récompenses » et les représentations que nous pouvons avoir de Dieu.

- D’abord, nous pouvons contester, à juste titre, l’image du dieu Juge que l’Eglise ou les représentations picturales des siècles passés nous ont transmises : Dieu ne nous attend pas au tournant, pour nous récompenser ou nous punir, selon nos œuvres.

Jésus nous parle d’un Dieu d’amour en qui nous pouvons avoir entièrement confiance… Un Dieu de grâce – qui dépasse nos questions de morale, de bien et de mal – puisqu’il aime ses créatures, ses enfants, gratuitement, sans condition.

- D’autre part, nous devons peut-être envisager autrement les termes qui parlent de « récompenses » dans l’Evangile. A cause de la tradition de l’Eglise, nous avons souvent en tête des récompenses promises dans un au-delà, un paradis, alors qu’il semble que Jésus parle de notre présent, de notre monde, ici et maintenant.

Ce qu’il nous dit c’est qu’il n’y a pas besoin d’attendre la mort pour gouter au bonheur ou à la joie. Soyons certains que nos actions bonnes ont forcément des répercussions positives dans le monde, pour les autres, mais aussi pour nous-mêmes. 

La raison en est simple : c’est que nous sommes tous unis, tous enfants du même Dieu, du même Père.
Donc, ce que nous faisons à autrui, en réalité, d’une certaine manière, nous nous le faisons à nous-mêmes.[2]

C’est pourquoi Jésus nous appelle à nous dépasser, à agir de façon extraordinaire et grandiose, en surmontant les séparations, les distinctions et les catégories humaines, en aimant sans compter… car, à coup sûr, nous en récolterons des fruits.

« Ce que tu offres aux autres, tu te le donnes aussi à toi-même, puisque nous faisons qu’un » : c’est en substance ce qu’on peut déduire de tout cela.

Croyez-le ou non cette réflexion (en apparence « théologique ») n’a, en fait, rien de théorique :
si nous envisageons ce qui se passe sur terre, dans notre actualité… avec la guerre en Syrie qui s’intensifie… le conflit israélo-palestinien, dont il a été question cette semaine indirectement avec la mort de Shimon Peres… mais aussi la question des migrants et des réfugiés… nous devrions écouter ce que dit Jésus et arrêter d’agir de façon ordinaire, en aimant seulement ceux qui nous aiment, ceux qui sont dans notre « camp ». Car, ce n’est pas de cette façon que les choses peuvent changer et évoluer. Ce n’est pas de cette façon que peut surgir la paix et la justice.
Nous devrions plutôt essayer quelque chose de nouveau… essayer d’agir enfin de façon grandiose, à la manière de Dieu, en aimant même nos ennemis… Et alors, par notre confiance positive et agissante, nous récolterons vraiment des récompenses… Nous obtiendrons le salut pour tous.
C’est la promesse de Jésus !… et c’est pas seulement pour l’au-delà. C’est pour notre monde d’aujourd’hui, ici et maintenant !

Amen.


Lectures bibliques :

Proverbes 11, 17-19
17Un homme généreux se fait du bien à lui-même,
qui se tracasse se rend malheureux.
18Le méchant recueille un salaire décevant,
une récompense est assurée à qui sème la justice.
19Oui, la justice mène à la vie,
mais qui poursuit le mal va à la mort.

Lc 6, 31-38
Comme vous voulez que les hommes agissent envers vous, agissez de même envers eux.
32Si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle reconnaissance vous en a-t-on ? Car les pécheurs aussi aiment ceux qui les aiment. 33Et si vous faites du bien à ceux qui vous en font, quelle reconnaissance vous en a-t-on ? Les pécheurs eux-mêmes en font autant. 34Et si vous prêtez à ceux dont vous espérez qu’ils vous rendent, quelle reconnaissance vous en a-t-on ? Même des pécheurs prêtent aux pécheurs pour qu’on leur rende l’équivalent. 35Mais aimez vos ennemis, faites du bien et prêtez sans rien espérer en retour. Alors votre récompense sera grande, et vous serez les fils du Très-Haut, car il est bon, lui, pour les ingrats et les méchants.

36Soyez généreux comme votre Père est généreux. 37Ne vous posez pas en juges et vous ne serez pas jugés, ne condamnez pas et vous ne serez pas condamnés, acquittez et vous serez acquittés.38Donnez et on vous donnera.

Mt 6, 1-6
Gardez-vous de pratiquer votre religion devant les hommes pour attirer leurs regards ; sinon, pas de récompense pour vous auprès de votre Père qui est aux cieux [= qui est Dieu même].[3]  Quand donc tu fais l’aumône, ne le fais pas claironner devant toi, comme font les hypocrites dans les synagogues et dans les rues, en vue de la gloire qui vient des hommes. En vérité, je vous le déclare : ils ont reçu leur récompense. Pour toi, quand tu fais l’aumône, que ta main gauche ignore ce que fait ta main droite, afin que ton aumône reste dans le secret ; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra.

Et quand vous priez, ne soyez pas comme les hypocrites qui aiment faire leurs prières debout dans les synagogues et les carrefours, afin d’être vus des hommes. En vérité, je vous le déclare : ils ont reçu leur récompense. Pour toi, quand tu veux prier, entre dans ta chambre la plus retirée, verrouille ta porte et adresse ta prière à ton Père qui est là dans le secret. Et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra.

Mt 10, 42
Quiconque donnera à boire, ne serait-ce qu’un verre d’eau fraîche, à l’un de ces petits en sa qualité de disciple, en vérité, je vous le déclare, il ne perdra pas sa récompense.


Cantiques du 02/10/16

- Grâce : ARC 514 (1, 2)
- Louange : 174 (1 , 2)
- Annonce du Pardon : 405 (1 , 4)
- Volonté de Dieu : 153 (2 , 3)
- Lectures bibliques : 232 (1, 2)
- Prédication 
- Confession de foi : 566 (1, 3)
- Offrande / annonces
- Intercession / Notre Père
- Envoi / Bénédiction : 266 (1, 2)



[1] Il y a aussi celui sur le « jeûne » (Mt 6,16-18), mais nous ne l’avons pas lu, pour ne pas trop rallonger la liste des lectures bibliques.
[2] C’est une leçon qu’on peut tirer, par exemple, de la parabole du jugement dernier en Mt 25. A travers des images, Jésus fait comprendre à ses interlocuteurs (donc à nous-mêmes) que : ce que nous faisons aux plus petits parmi nos frères, nous le faisons au Christ lui-même. Et cela, potentiellement, nous rapproche de Dieu (« Venez les bénis de mon Père… »). C’est-à-dire que nous en retirons des fruits.
[3] Le ciel = Dans le judaïsme, on ne prononce pas le nom de Dieu. Le ciel est un des noms de Dieu. Il y a équivalence entre « le royaume de Dieu » et « le royaume des cieux ». Lever les yeux vers le ciel, c’est lever les yeux vers Dieu (= prier). Le ciel n’est pas un lieu ; il désigne Dieu lui-même. En ce sens, le ciel n’est pas au-dessus de nous, il est en nous (car Dieu peut régner en nous), tout en restant distinct de nous.
Aucun texte du N.T. n’affirme que l’homme, à la mort, monte au ciel. (Même si l’espérance chrétienne est celle de la vie éternelle = la vie avec Dieu, en Dieu.) Dans l’évangile de Jean, le « lieu » que Jésus va préparer pour ses disciples (Jn 14,3) ne désigne pas le ciel, mais l’assurance qu’il leur donne de pouvoir encore, après sa mort, aller au Père (Jn 14,6), c’est-à-dire de continuer de connaître Dieu, de lui faire confiance, de demeurer en Lui, comme Lui demeure en eux (Jn 14,23 ; 15,1ss) et de recevoir de Lui la vie (Jn 3,16 ; 10,10 ; 20,31).