dimanche 11 septembre 2011

Mt 13, 44-46

Mt 13, 44-46

Lectures bibliques : Mt 5, 3 ; Mt 7, 7-8 ; Mt 6, 19-21 ; Mt 13, 44-46  / Culte avec baptême
Thématique : être chercheur … en quête de Dieu et du royaume
Prédication de Pascal LEFEBVRE / Tonneins, le 11/09/11

« Cherchez, vous trouverez » !

Chers amis, frères et sœurs,

Sommes-nous des chercheurs ? … des chercheurs qui cherchent en profondeur le fondement, le sens, le socle de notre existence ? Sommes-nous des chercheurs à la recherche de notre propre profondeur, à la recherche du roc sur lequel fonder notre existence, à la recherche de Dieu ?

Voilà que l’évangile ce matin nous invite à être des chercheurs, des explorateurs, des quêteurs…en quête de nous-même, en quête de notre véritable humanité en relation avec Dieu, en quête de Dieu, en quête du royaume.

« Cherchez, vous trouverez » ! nous dit Jésus (Mt 7,7).

Précisément, l’évangile nous appelle à ne pas chercher uniquement des trésors sur la terre, des trésors périssables, soumis à l’épreuve du temps et aux aléas… aux mites, aux vers, à la rouille ou aux voleurs. Mais à chercher et à amasser des trésors dans le ciel, des trésors qui durent, des trésors pérennes, qui apportent profondeur et sens à notre existence, qui lui donne une orientation, une direction.

L’évangile nous appelle à orienter notre vie … notre quête… en direction de l’ultime, du vrai trésor… et non simplement vers des réalités provisoires, éphémères, secondaires ou accessoires…
« où est ton trésor, là aussi sera ton cœur » (Mt 6,21).

Sortir et dépasser ses préoccupations préliminaires… pour s’orienter et concentrer sa quête vers une préoccupation ultime… c’est ce que fait cet homme dans la parabole du trésor ou dans celle de la perle.

La parabole de la perle ne nous dit pas grand chose de l’homme en question : c’est un marchand… mais elle précise l’essentiel, à savoir que c’est un chercheur… un homme qui se met en marche en quête de perles fines.

L’autre homme qui travaille dans un champ est aussi d’une certaine manière un chercheur.
La parabole ne nous dit pas si l’homme cherchait vraiment quelque chose dans ce champ ou s’il a trouvé un trésor … un peu par hasard… à force de labourer la terre sur laquelle il travaille. Peut-être est-il un chercheur qui s’ignore, un chercheur chanceux, qui a fait une trouvaille extraordinaire.

Mais quoi qu’il en soit, il reconnaît immédiatement la valeur de sa découverte. Tout comme le marchand qui a trouvé la perle de grand prix, l’homme qui découvre le trésor en reconnaît immédiatement l’importance et la valeur, et, l’un comme l’autre mettent alors tout en vente pour l’acheter.

L’évangile nous fait sentir ici l’importance de la trouvaille, et la radicalité de l’acte qui s’ensuit :
Pas de demi-mesure, mais lorsque le trésor véritable est découvert, les deux hommes mettent tout en œuvre pour faire aboutir leur quête, pour contempler ce trésor ultime… quitte à se dépouiller de tout le reste, quitte à renoncer à toutes les autres choses.

La rupture, la vente de tout ce qui apparaît finalement accessoire, comparé au trésor authentique, à la véritable perle, l’abandon de tout le reste – de tout ce qui ne constituait en définitive qu’un intérêt provisoire – ne sont pas ressentis ici comme une perte ou un sacrifice destiné à acquérir ce plus grand bien. Mais c’est la « joie » qui domine (Mt 13, 44) : joie de la trouvaille devant la reconnaissance de la valeur inestimable de la découverte, devant le gain que représente le trésor infiniment précieux, découvert dans la grâce d’un instant béni, et immédiatement reconnu pour sa valeur sans pareille.

Dans ces paraboles, le royaume des cieux n’est donc pas comparé au trésor caché, ni à une perle de grand prix, mais à un homme qui a découvert un trésor et qui va au bout sa démarche pour l’acquérir, ou à un marchand en quête d’une perle extraordinaire et qui fait de même devant la découverte de sa précieuse trouvaille.

Autrement dit, le royaume des cieux est comparé à une quête, à une aventure humaine… à l’élan, à la dynamique du chercheur, au cheminement du marchand qui a force de quête … d’effort et de travail … de persévérance et d’espérance… a trouvé son véritable trésor… ce qui compte vraiment pour lui… ce qui est précieux à ses yeux et qui donne sens à sa vie.
Parce que cette perle ou ce trésor ultimes ne sont pas comme les autres, ils valent la peine d’être cherché et ils procurent une véritable joie quand on les trouve.

Le royaume des cieux est donc comparé à une quête. Et cette quête n’est pas la recherche d’un trésor comme les autres, de quelque chose de commun, mais de quelque chose d’incomparable, qui a une valeur infinie et ultime, quelque chose qui relativise finalement tous les autres trésor et toutes les autres perles, quelque chose qui est plus important, plus essentiel, plus vital que tout le reste, quelque chose qui transforme la vie de ceux qui la cherchent et finissent par la trouver.

L’évangile ne nous dit pas ce qu’est ce trésor, mais nous invite à le découvrir, et, avant tout, à le chercher, à participer à cette quête du royaume des cieux.

En d’autres termes, l’évangile nous appelle à être des chercheurs… des chercheurs de Dieu et de son royaume.

A ce titre, je trouve que la parabole de l’homme qui a découvert le trésor caché est pleine d’humour :
Dans cette histoire que nous raconte Jésus, il nous est dit que l’homme a trouvé un trésor caché dans un champ, que cet homme – qui n’est sans doute pas propriétaire, mais qui est un laboureur qui travaille sur une terre qui ne lui appartient pas – est obligé de le cacher à nouveau – sans doute pour ne pas éveiller l’attention du propriétaire – et de vendre tout ce qu’il a, afin de pouvoir acheter ce champ et contempler ce trésor incomparable.
Autrement dit, une fois qu’il aura acquis cette terre, l’homme va être obligé de chercher une seconde fois le trésor qu’il a découvert et qu’il a lui-même dû enfouir et cacher à nouveau. Ce qui fait de lui doublement un chercheur… qui n’a cesse de labourer son champ pour y trouver ce trésor.

On voit ici l’insistance de Jésus pour nous dire que le royaume des cieux est finalement comparé à un chercheur… un chercheur patient qui déploie constance et ténacité pour faire aboutir sa quête.

Alors, comment être un chercheur ?

Je crois que la première béatitude que nous avons entendue nous donne une réponse.

Pour être un chercheur, et être en capacité d’accueillir le royaume, il faut déjà reconnaître sa pauvreté, son manque.

« Heureux les pauvres de cœur : le royaume des cieux est à eux » (Mt 5,3).

Celui qui est plein de lui-même, plein d’autosuffisance, d’arrogance, ou qui a un égo démesuré, n’est pas en état de se comprendre comme un chercheur ; il n’y a plus de place en lui-même pour une quête de l’Autre, une quête de la relation à l’Autre, une quête du sens ultime de sa vie, une quête du royaume.

Le chercheur – au contraire – c’est celui qui reconnaît – consciemment ou inconsciemment – avoir perdu Dieu, la vérité et le sens de la vie... ou qui se trouve en un point quelconque sur le chemin de cette perte.

En effet, Dieu et la grâce de Dieu ne sont pas réservés à ceux qui l’ont trouvé, qui ressentent sa présence ou qui affirment avoir la foi. 

Dieu est autant présent sur mon chemin de chercheur, dans mon doute et mon incrédulité, que dans mes moments de lucidité et de foi.

Lorsque je désespère sur le sens de mon existence, que je suis envahi par un sentiment d’incompréhension, de colère, de révolte ou par le sentiment d’absurdité de la vie, je dois savoir que, malgré tout, en dépit de tout, Dieu est encore là, que je ne suis pas séparé de lui.
C’est ce que nous révèle le langage des psaumes ou le livre de Job.

La justification par grâce, par le moyen de la foi – qui est un pilier de la foi protestante – veut dire que les mérites et les bonnes œuvres ne justifient pas le pêcheur, mais que seule la grâce de Dieu le justifie.

La doctrine de la justification par grâce, par le moyen de la foi – que l’apôtre Paul ou que le Réformateur Luther ont soutenue – veut dire que Dieu nous accepte, nous justifie et nous sauve par grâce, tels que nous sommes, sans condition, qu’il s’agit là de l’initiative première de Dieu, et que nous recevons cette grâce par le canal de la foi, que nous acceptons d’être aimés et acceptés par Dieu même si nous sommes pécheurs et indignes, et que nous recevons et répondons à cette acceptation par le moyen de foi.

Ce n’est donc pas nos bonnes œuvres, nos actes ou nos mérites qui nous justifient, mais la seule grâce de Dieu, à laquelle nous répondons dans la foi.

Il en est de même de celui qui a trouvé Dieu et de celui qui le cherche :
Celui qui prétend avoir trouvé Dieu n’est pas plus justifié que celui qui affirme être en recherche, car dès lors, par cette prétention, il risquerait de mettre en avant son propre mérite : avoir trouvé Dieu, alors que c’est Dieu qui l’a d’abord trouvé et justifié, et que celui qui a trouvé Dieu n’a fait que répondre à l’appel de Dieu.

Ainsi, celui qui met trop en avant sa foi court le risque de ne plus être un chercheur en quête de Dieu, mais un croyant qui se satisfait de lui-même, et de sa réponse à la grâce première de Dieu.

Le chercheur n’est pas moins justifié par Dieu que celui qui lui a répondu dans la foi.
Mais le chercheur est celui qui doit encore reconnaître et accepter le trésor que sont l’amour et la grâce de Dieu ; il doit encore accepter que Dieu lui offre cet amour gratuitement, sans condition.

En réalité, je crois que la parabole de la perle – qui montre que c’est le même marchand qui cherche et qui trouve – nous révèle que nous sommes chacun, à la fois, des chercheurs et des "trouveurs", et que le véritable chercheur comme le véritable "trouveur" ont un point commun :

Pour être un "trouveur", il faut d’abord être… et il faut rester … un chercheur.

Être un chercheur, c’est être en quête de Dieu, de la réponse de Dieu à nos questions. Et Dieu ne peut me répondre et me rejoindre – en tout cas, je ne peux entendre sa réponse – que là où je pose déjà la question, là où il y a un trou, une absence, un manque, un espace vide.

Si je n’ai pas de question, et que je suis plein de moi-même, le centre de moi-même et de mon monde – autrement dit, si je suis comme dieu… si j’ai pris la place de Dieu… comme le propose le serpent à Eve, dans le récit de la Genèse (Gn 2,5)  – en quoi Dieu peut-il m’apporter une réponse, si je ne lui pose pas de question, si je ne suis pas moi-même en question, si je ne me reconnais pas moi-même comme une question adressée à Dieu.

La réponse de Dieu ne peut être perçue que dans la mesure où je reconnais ma pauvreté, mon manque, mon incomplétude, ma dépendance radicale vis-à-vis de Dieu, là où je pose la question, là où je laisse un espace vide.
C’est cet espace vide que le chercheur désigne comme un creux, un manque, et qu’il cherche en réalité non a bouché, par un dieu bouche trou, mais à creuser, pour creuser le désir de Dieu.

C’est ce que fait, d’une certaine manière, l’homme de la parabole du trésor lorsqu’il cache à nouveau le trésor qu’il a découvert dans le champ :
Il sait, dans le secret, que le trésor est là, et il est déjà dans la joie, dans le désir de devoir creuser à nouveau son champ pour le retrouver. Finalement sa situation l’oblige à vivre et à creuser son désir.

Si nous cherchons Dieu, la relation à Dieu, la relation à l’Autre, c’est que nous ressentons l’incomplétude de l’existence – une existence séparée de Dieu, une existence où nous ne parvenons pas à vivre en communion avec Dieu, une existence où nous avons du mal à vivre sereinement toutes nos relations avec les autres.

Si nous sommes des chercheurs – plus ou moins conscient de notre quête du royaume – c’est que nous vivons dans le manque, que nous sommes dans le désir de vivre pleinement et authentiquement notre humanité, que nous voulons vivre notre vocation d’enfant de Dieu.

Chercher Dieu, chercher à vivre cette vocation d’enfant de Dieu, chercher d’abord le royaume (Mt 6,33), c’est être en quête de lien avec notre fondement créateur, c’est être en quête de ce qui donne sens et profondeur à notre existence.

A nous de mettre en adéquation notre trésor et notre cœur… à nous de chercher ce qui a du prix… à nous de chercher la vraie perle fine… celle qui a plus de prix pour notre existence que toutes les autres perles.

Chers amis, frères et sœurs, la parole que nous avons entendu le jour de notre baptême… et qui nous a été redite aujourd’hui à travers le baptême d’Emily … c’est que Dieu nous a trouvé, c’est que l’amour de Dieu nous précède et nous accueille éternellement.

Dieu nous a trouvé….mais nous… le cherchons-nous ?
Sommes nous encore et toujours des chercheurs, sommes-nous en quête du royaume ?

Amen.                                                                                                                             
   P.L.

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