dimanche 26 mars 2023

La colère ou la peur ?

Lectures bibliques : Mc 3, 1-6 ; Jn 2, 13-22 ; Mc 11, 12-14. 20-24 ; Ga 5, 13-16. 22-25. Voir textes ci-dessous, en bas de cette page. 

Thématique : une « sainte colère » ou la manifestation d’une peur ?

Prédication de Pascal LEFEBVRE – 26/03/23 – temple du Hâ (Bordeaux)



Ce matin, nous abordons avec ces passages bibliques le thème de la colère : un thème qui est malheureusement d’actualité en France. 


Alors, bien sûr, quand il s’agit de Jésus, on a tendance à adoucir les choses et à parler d’une « sainte colère », parce qu’on donne raison au Christ… et quand il s’agit des manifestations de la foule : on parle plutôt de la colère populaire, qui n’a certainement pas la même portée. 


Et puis surtout, on a tendance à se dédouaner un peu de notre part de responsabilité quand la colère gronde : car il faut toujours trouver un responsable. Et, en général, ce n’est pas nous. 


Ainsi, si je râle au milieu des embouteillages ou je me mets en colère parce que je suis en retard au milieu des bouchons… c’est toujours de la faute des autres, parce qu’ils me ralentissent… mais j’oublie que par ma présence, je participe et je contribue aussi à ce bouchon. 


Nous pensons le plus souvent que la colère répond à une cause, un stimulus extérieur : C’est souvent vrai, mais seulement en partie. 


Sur les réseaux sociaux, j’ai pu lire cette petite histoire : 


« Si vous mettez 100 fourmis rouges et 100 fourmis noires ensemble dans un bocal, rien ne se passera. 

Mais si quelqu’un se met à secouer le bocal, les fourmis vont commencer à s’entretuer. 

Les rouges croiront que les noires sont leurs ennemies, et les noires croiront que les rouges sont leurs ennemies, alors que le véritable ennemi est la personne qui a secoué le bocal. 

Il en va de même dans notre société.

Avant de nous battre entre nous, nous devons nous poser la question : qui a secoué le bocal ? »


Oui… qui a secoué le bocal ?... C’est une bonne question… mais pourquoi les fourmis rouges et noires, ont réagi ainsi à ce facteur déclenchant ?… C’est aussi une question à se poser. 


Les dernières semaines ont été marquées par de nombreuses manifestations contre le projet de loi visant la réforme des retraites. 

Le coup de force du gouvernement, qui a finalement eu peur de se retrouver minoritaire à l’assemblée nationale, et qui a actionné l’article 49-3 pour un passage en force, a constitué un élément déclencheur du mécontentement généralisé d’une grande majorité des français. 


Beaucoup ont vécu ces évènements comme « un déni inacceptable de démocratie ». D’autant que la mobilisation citoyenne active depuis plusieurs semaines s’est heurtée au silence des gouvernants et à une répression parfois violente des forces de l’ordre, comme moyen d’intimidation, avec des images choquantes des brigades de répression qui ont fait le tour du monde et scandalisé les défenseurs d’un État de droit. 


Là-dessus, l’intervention télévisée très tardive du président de la république, n’a rien arrangé. Bien, au contraire, elle a accentué la colère populaire. Et a suscité un élargissement de la base des mécontents et des manifestants, avec la jeunesse qui rejoint désormais le mouvement. 


Malheureusement, de nombreux débordements et l’intervention de casseurs et de Black blocs ont donné cours à des déchainements de violences contre des personnes (des policiers et des CRS) et contre de nombreux biens et locaux vandalisés. 


Toute cette violence est condamnée par la plupart des français : l’expression d’une violence physique (que ce soit celle des casseurs ou des BRAV-M) est jugée tout aussi inacceptable que la violence institutionnelle ou politique, par une grande majorité de français. 


C’est encore la démonstration que la violence est toujours une impasse : car elle suscite à son tour un engrenage et une escalade dans plus de violence.  La situation actuelle nous conduit donc dans une sorte d’impasse… impasse devant la colère de très nombreux français… et devant le manque d’écoute de ceux qui nous gouvernent. Tel est le constat que font aujourd’hui la plupart des journalistes. 


La question pour nous, ce matin, est de savoir d’où vient cette colère ? 

Car, nous pouvons éprouver une forme de colère collective (dans le sens qu’elle peut être partagée, comme c’est le cas, en ce moment), mais parfois aussi de façon individuelle, face à tel ou tel évènement. 


En effet, certaines situations, dans notre existence personnelle, (situations familiales, ou professionnelles, par exemple) peuvent nous agacer, nous bouleverser et même nous faire exploser : nous mettre en colère. 

Et d’ailleurs, il est étonnant de constater que, dans une situation particulière, certaines personnes restent neutres, calmes et ne semblent pas affectées par un évènement, tandis que d’autres, sont touchées et ne peuvent s’empêcher de manifester leur émotion. 


On le sait tous, la colère est un état affectif violent et passager, résultant d’un ressenti : d'une agression, d'un désagrément, d’un manque de considération, d’une frustration, traduisant un vif mécontentement pouvant entraîner des manifestations physiques ou psychologiques. 


La colère est une réaction : elle se manifeste par un courroux, une irritation, une exaspération… elle constitue un signal d'alarme lorsqu'un de nos besoins n'est pas comblé, ou que nous nous sentons en insécurité. 

La colère sert donc à mettre des barrières, à dire « stop » à une situation qui ne nous convient pas, que nous refusons ou que nous jugeons insupportable. 


Derrière la colère se cache souvent un besoin : le besoin de respect et de considération… le besoin d’écoute et d’attention… le besoin d’empathie et de compassion. 


La colère traduit, en réalité, une peur : la peur de ne pas être reconnu, de ne pas être pris en compte… la peur de vivre à nouveau une situation difficile, de vivre une situation d’injustice… et bien sûr, comme personne ne veut vivre cela : cette peur provoque un refus… qui peut faire ressentir une forme de révolte… un sentiment d’hostilité… quelque chose fait qu’on n’est plus soi-même : on dit « non » ou « stop »… et on est « hors de soi ». 


Une fois que la vague de la colère est là… il est trop tard…  elle peut être dévastatrice. Cette peur est alors transmise à autrui par la révolte ou la rage… et la peur peut alors changer de camp.


Si la colère est une émanation de la peur… une conséquence d’un stock de peurs qui envoie un influx… qui crée la colère… il est important d’essayer de comprendre son origine. 

Derrière la question : qu’est-ce qui me met en colère ? se pose l’interrogation : de quoi ai-je peur ? 


Si nous pensons à l’Evangile… et les passages que nous avons entendus… a priori, Jésus n’avait pas peur : 

il n’avait pas peur de mourir, il n’avait pas peur pour lui-même…  il vivait dans la confiance et le don de soi… 

Jésus n’avait pas peur , non plus, de remettre en question les habitudes et les traditions, surtout si elles lui semblaient déboucher sur des situations d’injustice… il n’avait pas peur de dire ses « quatre vérités » à ses interlocuteurs, ni aux malades ni aux gens haut-placés… 

il n’avait évidemment pas peur de Dieu, non plus : puisque pour lui, Dieu est comme un Père qui nous aime, comme une Force d’amour qui nous veut du bien, qui nous protège, nous nourrit, prend soin de nous…


Mais alors, me direz-vous : si Jésus n’avait pas peur… pourquoi s’est-il mis en colère, à différentes reprises ? 


Je crois, pour ma part, qu’il avait quand même peur de quelque chose : c’était de la Religion !... 

Il avait peur que la Religion, les Pharisiens et les Scribes, donnent une image tellement dégradée de Dieu que finalement on ne puisse plus croire au « bon » Dieu… en un Dieu « bon » compatissant et miséricordieux… 

Il avait peur que les hommes perdent la Foi (la confiance) à cause de la Religion… à cause des discours des Pharisiens, qui présentaient Dieu comme quelqu’un de dur, de sévère et d’exigeant… qui nous attend au tournant, pour nous juger ou nous punir. Il avait peur qu’on se trompe de Dieu. 


Et c’est pour cela qu’il dénonce l’hypocrisie des Pharisiens… qui font peser un lourd fardeaux sur les croyants… mais qui, eux, ne s’appliquent pas les mêmes règles (cf. Mt 11, 28-30 et Mt 23, 1-36)… il dénonce la loi absurde du sabbat, lorsqu’elle interdirait de faire quelque chose de bon, de délivrer ou de soulager d’un malheur… il dénonce le commerce des sacrifices au temple, qui empêche les plus pauvres, qui n’ont pas les moyens d’acheter des petits animaux, de pourvoir les présenter aux prêtres, afin de les offrir en sacrifice… il dénonce des institutions improductives qui sont devenues comme un figuier stérile, qui ne permet plus aux croyants de porter du fruit… il s’insurge contre toute cette hypocrisie, ces traditions ou ces lois, qui ne conduisent plus à la justice… et qui donnent une mauvaise compréhension de Dieu.  


Pour Jésus, Dieu est bon. On peut donc exprimer sa bonté et guérir, même le jour du sabbat… pour lui, l’accès à Dieu est gratuit : il n’y a donc pas besoin des sacrifices ou d’un marchandage, pour demander le pardon de Dieu, il suffit d’entrer dans la prière d’un cœur à cœur avec le Père céleste, dans le secret, et de désirer avec sincérité la conversion. 


Dans l’épisode de la guérison de l’homme à la main paralysé, Marc écrit : « Promenant sur eux un regard de colère, navré de l’endurcissement de leur cœur… il dit à cet homme « étend la main ». Il l’entendit et sa main fut guérie. »

Oui, Jésus était en colère ce jour-là : à cause de l’endurcissement du cœur des Religieux… à cause du manque de considération et du manque d’empathie à l’égard de cet homme handicapé… à cause de cette mauvaise compréhension du sabbat, qui nourrit les exigences et justifie l’immobilisme, plutôt que de libérer du malheur. 


Jésus était en colère non seulement pour les pauvres, les malades, les porteurs d’un handicap, toutes les personnes considérées comme « impures »… et donc exclues… mais il était aussi en colère pour Dieu : pour son règne et sa justice. Il était indigné !


Il avait peur que la religion et les religieux fassent à nouveau de Dieu et de sa Parole, une idole et une loi injuste… parce que devenue un carcan disciplinaire ou simplement quelque chose de mortifère, de routinier ou d’automatique… et non quelque chose qui ouvre le cœur. 


Alors, oui, Jésus aussi a pu laisser exploser sa colère… et devenir violent !... au point de tout renverser et d’utiliser un fouet… 

Il a eu peur que la religion dévoie et pervertisse l’image de la bonté de Dieu. Il n’a plus supporté toute l’hypocrisie et la fausseté religieuse… il a dit « stop » ; il voulait une transformation des regards et des cœurs… qu’enfin les choses changent : qu’on voit Dieu et la relation à Dieu d’une autre façon !


Et nous, qu’en est-il pour nous ? 

De quoi avons-nous peur, individuellement ou collectivement, 2000 ans plus tard ?


Avec la loi sur la Retraite… et l’activation du 49-3… derrière la colère qui gronde, on peut, par exemple, entendre bien des peurs actuelles : 

  • - La peur de ne pas être pris en considération, de ne pas être écouté.
  • - La peur de ne pas pouvoir y arriver… de devoir encore se battre et peiner… et que ce soit trop dur pour certains de travailler 2 ans de plus… alors qu’ils sont déjà fatigués… et qu’en réalité, le taux de chômage des séniors déjà très conséquent.
  • - La peur de se faire avoir… que ce soit encore les mêmes qui paient et qui trinquent… la peur de l’injustice : qu’à nouveau l’effort porte sur la classe populaire et la classe moyenne… pendant que les plus riches continuent tranquillement à s’enrichir… 
  • - La peur de ne pas pouvoir profiter de la vie et de la retraite, après une vie de labeur … et de devoir toujours repousser cette échéance : donc la peur que cela nous affecte, nous touche, nous prive de notre liberté. 
  • - La peur qu’on touche à nos acquis… et pour certains, que cela nous enlève « une part du gâteau ». 
  • - La peur aussi de la solitude ou de l’isolement face aux difficultés ou à la faiblesse : la peur d’être seul pour affronter les 2 années supplémentaires dans un travail parfois difficile et pénible… ou la peur de devoir être au chômage ou sans revenu deux années de plus : la peur d’une forme de précarisation. 
  • - En bref, c’est la peur de perdre, de ne pas se retrouver ou s’y retrouver… 


Et d’ailleurs, c’est pour ça que cette peur se transforme en ré-action : en perte de patience et en colère : on se fâche, on s’énerve, on se met « hors de soi »…. Autrement dit, on ne se retrouve plus ; on se sépare d’avec soi-même (on est littéralement « hors de soi »). 


Alors… une fois qu’on a dit cela… il faut distinguer les facteurs déclenchants de cette ré-action qu’est la colère. Et je crois qu’il faut différencier deux choses :

  • - Il y a souvent un stimulus extérieur – un facteur déclenchant – qui me pousse dans mes limites, dans mes retranchements… hors de ma zone de confort… et qui peut me bousculer violement. 
  • - Et il y a aussi une peur profonde, qui constitue la véritable cause, et qui indique, en fait, que je ne suis pas véritablement en paix avec moi-même. 


Il faut donc lâcher l’idée selon laquelle la colère viendrait exclusivement d’une source qui est hors de moi : d’un élément extérieur. 


Ce n’est évidemment pas le cas, et c’est la raison pour laquelle, nous réagissons différemment les uns les autres, face à une cause, une stimulation extérieure identique. 

La réalité, c’est que nous n’avons pas les mêmes peurs en nous, et que nous n’avons pas le même niveau de confiance… car nos vies et nos expériences de vie sont différentes. 


Le courage – face à la colère – ce n’est pas de désigner seulement un coupable, un stimulus extérieur (celui qui a remué le bocal), mais d’essayer de discerner la dissonance intérieure : Quelle est cette peur en nous ? De quoi ai-je peur ? 


Bien sûr, ce n’est peut-être pas le bon moment pour se poser ces questions… parce qu’il faut d’abord laisser passer la colère et la laisser retomber, pour pouvoir s’interroger ensuite… pour pouvoir prendre du recul : se recentrer… et trouver en soi des émanations de plus hautes fréquences : c’est-à-dire quelque chose qui surmonte la peur et qui vibre plus haut. 


Et qu’est-ce qui est le contraire de la peur et qui vibre plus haut : si ce n’est la confiance, la foi… l’amour et la lumière ?


Il faut donc à un moment donné… ne pas rester « hors de soi », passer ce cap… pour revenir à soi… et trouver quelque chose en soi… une information, une énergie de plus hautes fréquences, qui émane de notre être profond… qui est en lien avec Dieu…. avec le Père en Soi… qui nous ouvre à la lumière et la confiance. 


Seulement, la paix intérieure demande de la pratique… pratique du silence, de l’écoute, de la contemplation… pratique de la méditation ou de la prière. 

Il faut du temps pour apprendre à ne plus réagir aux stimuli extérieurs et à dépasser nos peurs les plus profondes. 


Encore une fois, les stimuli – les facteurs extérieurs – ne sont certainement pas les seuls responsables de nos réactions. Ce sont seulement des mises à l’épreuve, qui interrogent nos peurs.  


Développer sa confiance, sa paix intérieure, fait que l’on est moins esclave de nos réactions, de nos sentiments d’injustice, de notre vague émotionnelle (qu’elle soit individuelle ou partagée).  


Et un moyen d’acquérir la maitrise de soi, c’est de développer notre niveau de fréquences, de vibrer plus haut… par un recentrement… et l’accès à une forme de verticalité… de spiritualité. 


L’apôtre Paul nous explique que c’est grâce à l’Esprit saint :  c’est en accueillant le Souffle de Dieu, c’est-à-dire l’énergie de Dieu en soi, que nous pouvons développer notre niveau de confiance, nous ouvrir à l’amour et la lumière qui viennent de Dieu. 

C’est pour cela que Paul dit que la maîtrise de soi est un fruit de l’Esprit (cf. Ga 5, 22-23).


La maitrise de soi bannit la violence. Car on n’a pas besoin de blesser autrui, de lui faire du mal, pour se faire entendre. 

C’est ce qu’ont montré tous les grands témoins de la non-violence : Jésus, et bien après lui : Henri David Thoreau, Gandhi, Martin Luther king, et bien d’autres… même s’ils en ont payé le prix. 


Ils ont montré que la non-violence, qui est le fruit d’une confiance, peut changer radicalement les choses. 

Quand vous avez devant vous un grand nombre de personnes vraiment centrées, confiantes et non-violentes qui manifestent en silence – comme a pu le faire Martin Luther King et ses partisans – tout d’un coup, une puissance nouvelle émane de cette foule en communion. Et personne ne peut plus rien faire contre une confiance partagée.


Alors, celui qui est à l’origine d’un stimulus négatif d’indifférence, d’obstination, d’endurcissement du cœur (comme le décrit Jésus) va prendre conscience qu’il a face à lui une confiance à toute épreuve. 

Et la peur change de camp, parce que ceux qui n’étaient pas prêts à écouter, vont se rendre compte qu’ils n’ont pas eux-mêmes ce puissant niveau de confiance. 


La vraie force vient donc de la confiance et non de la peur. 


Bien souvent, les autorités ont tendance à manipuler les masses par la peur, comme nous l’avons vu, pendant la période de la crise du Covid. 

C’est une manière de retirer du pouvoir aux gens, de les empêcher de se connecter à eux-mêmes, à leurs ressources, à leur propre confiance, leur force intérieure liée au divin. Et ainsi de pouvoir les manipuler ou les maitriser. 


Et c’est aussi pour cela que les autorités ont toujours peur des martyres, de ceux qui acceptent la non-violence même dans les persécutions, et qui sont prêts à donner leur vie pour ce qu’ils défendent. Car ils ont, en réalité, un niveau d’énergie et de confiance bien supérieur aux peurs des élites. 


C’est d’ailleurs, ce que Jésus a fait : il a donné sa vie pour ses convictions, pour révéler qui était Dieu : un Dieu d’amour, bon et miséricordieux… à qui chacun peut se connecter par la prière… un Dieu auprès de qui, chacun, peut développer son niveau de confiance.


L’enjeu de la spiritualité est donc de permettre à chacun de se connecter au divin : d’apprendre à accueillir la sérénité de Dieu en soi, pour ensuite devenir une émanation de la sérénité autour de soi… et la faire rayonner.  


La paix intérieure et la confiance qu’on cultive en soi, permettent aussi d’occuper la place d’observateur : de discerner la peur autour de soi… de déceler les pourvoyeurs de colère…  et ceux qui réagissent à la peur. 


Ce que l’on voit en ce moment nous fait prendre conscience des effets délétères de la colère, qui envenime les choses. Car elle alimente, en réalité, la chose combattue : une forme de violence, non seulement subie, mais transmise. 


Au contraire, on constate la puissance infinie et pacificatrice qui émane de la verticalité, d’une paix intérieure liée à la confiance que nous donne le divin : notre Père intérieur… qui transforme progressivement et positivement notre être intérieur, par son amour et sa lumière. 


Alors, tout cela nous amène à un constat… et je conclurai par là :

S’il se passe tout ce qu’on voit dans le monde, en ce moment, et notamment en France, c’est certainement que les gens manquent fondamentalement de confiance… car, avec la foi, nous dit Jésus : il est possible de déplacer de montagnes de problèmes (Mc 11, 22-23). 


Ainsi, donc, chers amis, n’oublions pas que même si Jésus était pleinement connecté à Dieu… il lui est arrivé, lui aussi, d’avoir des tentations… il lui est arrivé aussi de se mettre en colère et d’avoir peur : d’avoir peur pour les petits et les exclus… et pour Dieu… 


Et c’est peut-être les conséquences de cette colère qui l’ont finalement condamné : 

Car, on ne critique pas les autorités impunément… on ne guérit pas impunément le jour du sabbat…  et on ne chasse pas impunément les marchands du temple… et on ne maudit pas impunément un figuier… la colère a toujours des conséquences. 


Mais, au-delà de sa mort, Jésus a fait bien plus que d’éprouver parfois une « sainte colère » : il a ressuscité la confiance et l’espérance… et nous appelle aussi à le faire : 

à recevoir cette confiance de Dieu en nous, dans notre intériorité… et à la propager et la faire rayonner généreusement autour de nous.  


Amen. 


Lectures bibliques 


Mc 3, 1-6 - Guérison un jour de sabbat

1Il entra de nouveau dans une synagogue ; il y avait là un homme qui avait la main paralysée.  2Ils observaient Jésus pour voir s’il le guérirait le jour du sabbat ; c’était pour l’accuser. 

3Jésus dit à l’homme qui avait la main paralysée : « Lève-toi ! viens au milieu. » 

4Et il leur dit : « Ce qui est permis le jour du sabbat, est-ce de faire le bien ou de faire le mal ? de sauver un être vivant ou de le tuer ? » Mais eux se taisaient. 

5Promenant sur eux un regard de colère, navré de l’endurcissement de leur cœur, il dit à cet homme : « Etends la main. » Il l’étendit et sa main fut guérie. 

6Une fois sortis, les Pharisiens tinrent aussitôt conseil avec les Hérodiens contre Jésus sur les moyens de le faire périr.



Jn 2, 13-22 - Jésus chasse les marchands du temple


13La Pâque juive était proche et Jésus monta à Jérusalem. 

14Il trouva dans le temple les marchands de bœufs, de brebis et de colombes ainsi que les changeurs qui s’y étaient installés. 

15Alors, s’étant fait un fouet avec des cordes, il les chassa tous du temple, et les brebis et les bœufs ; il dispersa la monnaie des changeurs, renversa leurs tables ; 

16et il dit aux marchands de colombes : « Otez tout cela d’ici et ne faites pas de la maison de mon Père une maison de trafic. » 

17Ses disciples se souvinrent qu’il est écrit : Le zèle de ta maison me dévorera

18Mais les autorités juives prirent la parole et lui dirent : « Quel signe nous montreras-tu, pour agir de la sorte ? » 

19Jésus leur répondit : « Détruisez ce temple et, en trois jours, je le relèverai. » 

20Alors ces Juifs lui dirent : « Il a fallu quarante-six ans pour construire ce temple et toi, tu le relèverais en trois jours ? » 

21Mais lui parlait du temple de son corps. 

22Aussi, lorsque Jésus se releva d’entre les morts, ses disciples se souvinrent qu’il avait parlé ainsi, et ils crurent à l’Ecriture ainsi qu’à la parole qu’il avait dite.



Mc 11, 12-14  - Le figuier stérile

12Le lendemain, à leur sortie de Béthanie, il eut faim. 

13Voyant de loin un figuier qui avait des feuilles, il alla voir s’il n’y trouverait pas quelque chose. Et s’étant approché, il ne trouva que des feuilles, car ce n’était pas le temps des figues. 

14S’adressant à lui, il dit : « Que jamais plus personne ne mange de tes fruits ! » Et ses disciples écoutaient. […] 


[Épisode des vendeurs chassés du temple]

Mc 12, 20-24 - Le figuier desséché. Foi et prière

20En passant le matin, ils virent le figuier desséché jusqu’aux racines. 

21Pierre, se rappelant, lui dit : « Rabbi, regarde, le figuier que tu as maudit est tout sec. » 

22Jésus leur répond et dit : « Ayez foi en Dieu. 

23En vérité, je vous le déclare, si quelqu’un dit à cette montagne : “Ote-toi de là et jette-toi dans la mer”, et s’il ne doute pas en son cœur, mais croit que ce qu’il dit arrivera, cela lui sera accordé. 

24C’est pourquoi je vous déclare : Tout ce que vous demandez en priant, croyez que vous l’avez reçu, et cela vous sera accordé. 



Ga 5, 13-16. 22-25 - Être conduit par l’Esprit 

13Vous, frères, c’est à la liberté que vous avez été appelés. Seulement, que cette liberté ne donne aucune prise à la chair ! Mais, par l’amour, mettez-vous au service les uns des autres. 

14Car la loi tout entière trouve son accomplissement en cette unique parole : Tu aimeras ton prochain comme toi-même

15Mais, si vous vous mordez et vous dévorez les uns les autres, prenez garde : vous allez vous détruire les uns les autres. 

16Ecoutez-moi : marchez sous l’impulsion de l’Esprit et vous n’accomplirez plus ce que la chair désire. […] 

22Voici le fruit de l’Esprit : amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, foi, 

23douceur, maîtrise de soi ; contre de telles choses, il n’y a pas de loi. 

24Ceux qui sont au Christ ont crucifié la chair avec ses passions et ses désirs. 

25Si nous vivons par l’Esprit, marchons aussi sous l’impulsion de l’Esprit.


dimanche 12 mars 2023

Changez de regard sur Dieu

Texte biblique : Lc 13, 1-5 (voir texte en bas de page)

Thématique : changez de regard sur Dieu 


Prédication de Pascal LEFEBVRE – temple du Hâ – Bordeaux – le 12/03/23

(La fin est inspirée d’une réflexion de Marc Pernot)



* Il y a 2000 ans… des Galiléens – sans doute des Juifs pieux – ont été massacrés sur ordre de Ponce Pilate. Étaient-ils coupables ?


Par ailleurs, dix-huit personnes sont mortes dans l’écroulement de la tour de Siloé. Qu’avaient-elles fait de mal pour mériter cela ?


Cela a longtemps été l’opinion dominante, et ça l’est peut-être encore aujourd’hui : rien n’arrive par hasard ! Les victimes doivent avoir mérité, d’une façon ou d’une autre, ce qui leur est arrivé. 


C’est la logique de la rétribution. 

On ne reçoit jamais que ce qu’on mérite !


Aujourd’hui, encore, c’est toujours le même réflexe. 

Nous sommes abreuvés de faits divers : meurtres, attentats, prises d’otages, tempêtes ou tornades, inondations ou catastrophes en tous genres. 


Le premier réflexe, c’est de chercher un coupable. 

S’il y a des victimes, c’est qu’il y a des coupables. 

Quand on peut trouver des coupables, on préfère : ça explique tout ! 


Et le plus simple – le mieux – c’est que les victimes soient elles-mêmes coupables, et donc responsables : comme ça, on peut se rassurer et se dire que c’est normal, que c’était bien mérité. 


Ainsi, en 2023, les séismes en Turquie et en Syrie, ont fait plus de 50 000 morts… en conséquence des tremblements de terre … et on a pu entendre sur Internet ou à la télévision, quelques témoignages stupéfiants… et même des phrases terribles et incompréhensibles de mère éplorées, qui affirmaient que c’était certainement Dieu qu’il l’avait voulu ainsi !

C’est Dieu… qui aurait pris leur maison et la vie de leur enfant. 


Qui pourrait croire en un tel Dieu ?


On ne peut qu’être athée de ce Dieu là… un Dieu qui causerait le mal, la destruction, la souffrance et la mort. 


Les contemporains de Jésus, avaient les mêmes réflexes :

Les Galiléens massacrés par Ponce Pilate devaient bien avoir commis quelques fautes pour avoir mérité ce sort !


* Mais ne faut-il pas changer du tout au tout, par rapport à cette façon de voir ? 


La réalité, c’est que nous sommes désarmés devant la puissance du mal.

Nous avons beaucoup de difficultés à accepter que des innocents puissent être victimes de catastrophes, d’accidents ou de violence aveugle. 


Et nous demandons alors ce que fait Dieu. 

Toute l’histoire de la théologie se résume à la question de la rétribution.


« Qu’est-ce que j’ai fait au « Bon » Dieu pour mériter ça ? »


La question est toujours la même :

Si Dieu existe, pourquoi y a-t-il tant de mal sur la terre ? 


Et alors, plusieurs types de réponses sont souvent apportées :

  • - 1ère possibilité, c’est que Dieu n’existe pas. 

Si le mal existe, c’est que nous sommes soumis au hasard. Il n’y a donc pas de Dieu. 

La vie, avec son cortège de souffrances, contredit l’existence d’un Dieu juste et bon.

  • - 2ème possibilité, c’est qu’il y a un Dieu… et que ce Dieu l’a voulu : il nous envoie une épreuve, un avertissement ou une punition… parce que nous avons dû faire quelque chose de travers… ou peut-être qu’il crée la souffrance pour notre bien ou pour nous inciter à changer. Mais ce Dieu là ne serait-il pas un peu cruel… un peu pervers ?
  • - 3ème possibilité, c’est que Dieu est incompréhensible et injuste. Ce n’est pas un « bon » Dieu, mais un tyran… un manipulateur, dont nous sommes des marionnettes… soumises à son bon vouloir. Il faut donc se méfier de Dieu ! Et bien se tenir. Car on ne sait jamais ce qui peut arriver. 


Ces différentes réponses débouchent, en réalité, soit sur l’athéisme… soit sur la conception d’un Dieu terrible, rancunier ou capable de punir. 


C’était vraisemblablement l’image de Dieu que pouvaient avoir les interlocuteurs de Jésus : l’image d’un Dieu dur, sévère et exigeant… Celui des Pharisiens.  


Alors… les dix-huit personnes qui ont perdu la vie, dans la chute de la tour de Siloé… étaient-elles plus coupables que les autres ?


* Jésus répond à cette question, mais il ne donne pas d’explication sur l’origine du mal.


La première partie de la réponse est claire : NON… non, les victimes de la boucherie ordonnée par Pilate… non, les victimes de l’écroulement de la tour de Siloé… n’étaient pas plus coupables que les autres. 


NON, ce n’est pas Dieu qui les a punis. Ce n’est pas Dieu qui l’a voulu et qui a orchestré leur mort. 

Dieu n’est ni un sadique, ni un manipulateur, ni un bourreau. 

Ça ne marche pas comme ça ! Dieu n’est pas comme vous le pensez !

Vous êtes complètement à côté de la plaque !

Dieu n’est pas un distributeur de récompenses ou de punitions. 


Et il ajoute, une deuxième partie de réponse :

Mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même !... ou plus exactement : vous vous perdrez tous de même !


Pour bien comprendre le sens des paroles de Jésus, il faut percevoir que le verbe grec utilisé ici a un double sens : il signifie « mourir / périr », mais aussi « se perdre ». 


Jésus n’est pas en train de dire qu’une épée de Damoclès est sur nos têtes ou que la colère de Dieu va bientôt frapper et s’abattre sur nous… si nous ne changeons pas de comportement.


Mais, il est en train de dire qu’il est urgent de changer de mentalité : il est urgent de convertir notre regard … et d’arrêter de regarder Dieu comme une réalité capable de punir… sans quoi nous risquons de nous perdre… de perdre la foi, de vivre dans la peur… et de vivre dans une illusion, en construisant, dans notre conscience, l’image d’un Dieu tyrannique et sanguinaire. 


Dieu : ce n’est pas cela. 

Ce n’est pas en cette réalité là qu’on peut croire. 

Car ce Dieu là… un Dieu qui punit… ne pourrait pas être le « bon » Dieu. 

En tout cas, ce n’est pas le Dieu de Jésus ! un Dieu en qui nous pourrions vraiment avoir confiance. 


* Cet épisode nous interroge donc sur l’image que nous pouvons avoir de Dieu. 


Tout d’abord, y-a-t-il un Dieu ? Beaucoup se le demandent. 


Beaucoup de grands scientifiques sont des croyants. 

D'un point de vue rationnel, il est probable que Dieu existe. 

Certaines choses sont invisibles, mais pourtant existent quand même. 


C'est, par exemple, le cas de l'air : on ne le voit pas, mais s'il manque, on s'en rend vite compte. Et quand on voit des branches bouger dans les arbres, nous en déduisons logiquement qu'il y a quelque chose qui les agite. 

De la même manière, Dieu est invisible, mais on a également besoin de sa présence et on peut voir son action.


La science nous apprend que le monde est en évolution. 

L'explication la plus vraisemblable de ce mouvement, de cette dynamique, est liée à l'existence de "quelque chose"… d’une force… d’une énergie… d’un dynamisme créateur…  qui en est la cause, l'origine et le sens.


Si Dieu existe… qui est-il ?


Chacun se fait une idée de Dieu, aucune n'est parfaitement exacte, aucune n'est d'ailleurs semblable, car la façon de voir Dieu est très personnelle…. Et surtout la connaissance de Dieu est hors de notre portée. 


Les théologiens… et même les scientifiques l’admettent :

Ces dernières décennies, les sciences dites exactes, notamment la physique et la mécanique quantiques, ont bouleversé tous les modèles de la physique traditionnelle. Ils admettent aujourd’hui que le « réel » nous échappe ultimement. 


Nous avons certes une perception de la réalité, mais celle-ci est partielle, fragmentaire et provisoire : elle relève tout autant de nos connaissances du moment, que de nos croyances ou de nos représentations. 

Même le scientifique le plus intègre est soumis aux limites de sa propre perception, à des modes de penser, des déterminismes, des conditionnements, des relativismes… qui fait qu’il n’est qu’un humble interprète de la réalité qu’il tente de comprendre. 


Il y a donc une prise de conscience de ce fait : nous n’avons qu’une perception limitée du « réel ». 


Pour la Bible et le christianisme… il est inévitable d’employer des images et des métaphores pour parler de Dieu. Elles sont toujours limitées. On trouve ainsi différentes manières d’en parler, qui peuvent être complémentaires : Dieu est l’Éternel… il est comme un Roi : il règne…. Il est comme un Juge : il est juste… il est comme un Berger : il prend soin des siens (de ses brebis, de sa création et ses créatures). 


Le point commun des Chrétiens est de faire confiance à Jésus de Nazareth, pour savoir qui est Dieu. 

Certes, la réalité de Dieu reste cachée et insondable, mais le Christ nous révèle quelque chose de Dieu : en quelque sorte, il nous présente « le dos de Dieu », dira le réformateur Luther. 


Pour l’Evangile (et plus largement le Nouveau Testament), Dieu est comme un Père ou une Mère, qui nous aime, qui prend soin de nous, qui nous apporte ce dont nous avons besoin … Dieu est Amour, Dieu est Lumière. 


Dieu est plus qu’une personne : il est comme une force, un Souffle, une énergie, un dynamisme de vie… qui peut agir en nous et dans la création. 


Il est possible de se connecter à Dieu… de le rencontrer… de sentir sa présence en nous, dans notre intériorité. 


Pour Jésus, Dieu n’est pas une vague idée… un Dieu spéculatif et intellectuel, auquel je peux croire… mais une réalité existentielle… que je peux rencontrer… à qui je peux m’ouvrir… en qui je peux me fier… et qui peut m’influencer. 


Je peux le rencontrer dans sa révélation… dans la splendeur de la création… dans la Bible… en Jésus-Christ… dans la méditation et la prière, au creux de mon intériorité… et même dans le visage des autres. 


Il est possible de laisser une place à Dieu dans sa vie… et même de choisir de lui faire confiance… car si Dieu est bon… s’il est une réalité qui me veut du bien… je peux choisir de lui donner une place, pour me guider, pour donner une orientation à mon existence. 


En résumé… pour Jésus, Dieu s’intéresse à l’être humain… il a un projet de vie pour l’humanité… et il voit chacun de nous comme un être unique et précieux. 

Même si je ne crois pas en Dieu… Lui, croit en nous… par grâce. 


* C’est très bien… me direz-vous… mais tout cela ne répond pas à la question du mal et de la souffrance :


Quelles sont les réponses de la théologie chrétienne face à la question de l’existence du mal ? 


Difficile de répondre à cette question en quelques minutes :


  1. 1) Première réponse : c’est une impasse… car cette question nous dépasse. 


Notre point de vue est toujours partiel et limité. Nous ne sommes pas Dieu. Nous devons faire preuve d’humilité. 


Il y a plusieurs types de maux ou de malheurs autour de nous :


  • - Il y a le mal « innocent ». Le mal « innocent », c’est, par exemple, le mal présent dans la nature… et qui peut tomber sur n’importe qui. Ainsi, un tremblement de terre est, en quelques sortes, un mal « innocent », parce qu’il peut tuer des milliers de personnes… si ces personnes habitent sur une faille ou une zone sismique… elles peuvent se retrouver particulièrement exposées, en étant malheureusement au mauvais endroit, au mauvais moment. Il y a encore la maladie génétique, qui est aussi, en quelques sortes, un mal « innocent », qui frappe au hasard d’une naissance… parce qu’elle appartient au patrimoine génétique d’un groupe d’individu… et va ou non se manifester. 
  • - Et puis, il y a le mal de l’homme. Et là, la liste est beaucoup plus longue : rivalités, concurrence, précarité, exploitation, violences, destructions de l’environnement, famines, guerres, conflits en tout genre, etc… Le mal de l’homme est lié à l’ignorance, l’indifférence, l’inconscience, à la convoitise, l’avidité, l’égoïsme, le manque de compassion, le chacun pour soi, la jalousie, la soif d’en avoir toujours plus : plus d’avoir et de pouvoir, etc. 


La plupart des malheurs que nous rencontrons dans notre existence est provoquée par d’autres personnes ou par notre propre attitude. L’homme est souvent « un loup pour l’homme ». 


Alors, bien sûr, on peut toujours remettre la faute sur Dieu, mais n’est-ce pas un peu facile ? N’est-ce pas une manière de se dédouaner de sa propre responsabilité ?


Si Je conduis en état d’ivresse et produit un grave accident…

S’il y a des tensions entre nations et la guerre en Ukraine avec tant de destructions et de souffrances…

S’il y a de l’inflation, de la pauvreté ou un effondrement boursier ou monétaire…

S’il les conflits en Afrique provoquent des migrations de population, des conséquences économiques désastreuses ou des famines… 

Dois-je en imputer la faute à Dieu ? 


Qui suis-je pour juger Dieu ? 

C’est la question que pose le livre de Job dans la Bible. 


En réalité, nous avons facilement tendance à penser que Dieu devrait agir selon nos attentes et nos critères… mais n’est-ce pas plutôt l’homme qui n’agit pas comme Dieu pourrait s’y attendre… et provoque ainsi tant de malheurs et de souffrances ?


La vérité, c’est que l’action de Dieu ne se laisse pas mettre en équation. Et que le soin que Dieu prend de sa création dépasse infiniment nos possibilités de compréhension. 


L’injustice du monde n’est donc pas la preuve de l’absence ou de l’inexistence de Dieu, mais bien plutôt le résultat de l’injustice de l’homme, de sa volonté insatiable de toute-puissance, de l’absence de bornes ou du refus des limites, de son orgueil et de son avidité. 


  1. 2) A côté de cette réponse qui dit que l’existence du mal nous dépasse, une deuxième réponse peut être apportée : elle dit que Dieu n’est pas indifférent au sort de l’être humain… et au mal présent dans la création… qu’en réalité Dieu lutte aussi contre le chaos. Il serait toujours en train de poursuivre son œuvre de création. 


Dans la Bible (le 1er livre de la Bible s’appelle la Genèse), Dieu est présenté comme une force créatrice. Pour créer, Dieu sépare ce qui est bien de ce qui est mal. Il agit pour mettre en valeur le bien, et pour faire reculer le mal.


Mais la création est-elle achevée ? 


Certains théologiens expliquent l’existence du mal par le fait que Dieu n’aurait pas achevé son œuvre. Il est un dynamisme créateur, il est la cause du bien, mais il y a encore du chaos dans ce monde que Dieu est en train d'organiser progressivement. La création est toujours en devenir, en évolution. 


Par amour, Dieu crée l'homme dans ce chantier en cours, et il l'appelle à participer à cette œuvre et à se développer lui-même.

Cette théologie affirme que Dieu est du côté du bien… qu’il est solidaire de l’humanité… et elle nous mobilise pour lutter contre toute souffrance avec Dieu.

Mais à nouveau, il faut avouer humblement qu’on ne peut pas avoir de réponse définitive à toutes les questions… Ce qui ne nous empêche pas d’y réfléchir… et d’accepter de faire confiance à Dieu.

L’idée que Dieu nous appelle à être des co-créateurs avec Lui est positive et mobilisatrice. 

Elle signifie que Dieu nous adresse un appel, pour se mettre à son écoute, et choisir ce qui fait vivre et ce qui libère du mal. 


* Je voudrais conclure cette méditation par l’existence du bien. 


L'existence du bien dans l'univers est beaucoup plus extraordinaire que l'existence du mal. Les choses ne sont pas du tout symétriques :


  • - Pour créer un être humain, libre et capable d'aimer, il faut des dizaines d'années de travail, d’apprentissage et de progression, et des dizaines voire des centaines de participants actifs dans son développement.


  • - Pour tuer un être humain, il suffit d'une tuile qui tombe d'un toit, ou d'une défaillance d'un des organes vitaux pendant quelques instants.


Il est donc beaucoup facile de faire le mal, que nous ne voulons pas faire… que de construire le bien, que nous projetons de faire. 


Malgré ce constat, Dieu nous influence positivement et nous aide, pour agir dans le bon sens. 


Le bien dans la Bible, c’est ce qui va dans le sens de Dieu : 

Le bien, c’est la vie, la bienveillance, la confiance, l’élan créateur, la fraternité, la solidarité… 


Et c’est pour cela que Jésus invite ses interlocuteurs à changer de mentalité et de regard sur Dieu : Se convertir, c’est comprendre le dessin bienveillant de Dieu… et vouloir s’associer à Lui. 


Cela doit induire aussi un autre changement : un changement dans notre être et nos relations avec les autres… pour sortir des rivalités, de la réciprocité, du donnant-donnant. 


Jésus nous invite ainsi à retrouver notre juste place face à Dieu avec nos frères et sœurs. 


Se convertir, est un acte d’humilité et de confiance : 


C’est reconnaitre que l’amour de Dieu dépasse notre intelligence. 

Malgré cela, nous pouvons choisir nous fier à Lui… et nous mettre à son écoute : ça s’appelle la foi.  


Amen.


Luc 13, 1-5 - Changer de mentalité… ou se perdre

1 A ce moment survinrent des gens qui rapportèrent à Jésus l’affaire des Galiléens dont Pilate avait mêlé le sang à celui de leurs sacrifices. 

2 Il leur répondit : « Pensez-vous que ces Galiléens étaient de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens pour avoir subi un tel sort ? 

3 Non, je vous le dis, mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez / vous vous perdrez / tous de même.

4 « Et ces dix-huit personnes sur lesquelles est tombée la tour à Siloé, et qu’elle a tuées, pensez-vous qu’elles étaient plus coupables que tous les autres habitants de Jérusalem ? 

5 Non, je vous le dis, mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez / vous vous perdrez / tous de la même manière. »