dimanche 8 septembre 2024

La possibilité offerte d'exister autrement

Lectures bibliques : Mt 22, 1-14 : Mc 8, 35 ; Jn 10,10 (voir textes en bas de cette page)

(Volonté de Dieu : Ep 4, 17-18, 22-24, 32)

Thématique : la possibilité offerte d’exister autrement / Un appel transformateur à la joie


Prédication de Pascal LEFEBVRE - le 08/09/2024 à Bordeaux & le 15/09/2024 à Dax. 



* Avez-vous changé de vêtements pour venir au culte ce matin ? Avez-vous revêtu votre plus bel habit, pour venir ici… fêter la fraternité et entrer en dialogue avec Dieu ? 


Si vous ne l’avez pas fait : rien de grave ! Car - au-delà de toute apparence physique - Dieu nous appelle surtout à changer de mentalité, à élargir notre conscience et à ouvrir notre coeur…  C’est ce que nous découvrons ce matin à travers nos lectures… 


* Comme souvent dans l’Evangile du Royaume, Jésus parle en paraboles, pour nous dire quelque chose de décisif pour notre vie… pour nous transmettre une Bonne Nouvelle et pour nous appeler à un chemin de transformation. C’est ce qu’il fait avec la parabole que nous venons d’entendre. 


Il ne faut donc pas rester bloqué sur la fin de la parabole qui semble s’achever sur une note plutôt sombre et dramatique… qui pourrait nous peiner, nous effrayer ou nous scandaliser… Mais regardons davantage le message qu’elle nous délivre. 


Et c’est d’abord une Bonne Nouvelle : Dieu nous appelle ; il nous invite. 

Le royaume de Dieu est comparé à un évènement joyeux auquel nous sommes conviés : A l’image d’un roi qui invite des convives au festin de noces pour son fils, nous sommes appelés à entrer dans une relation joyeuse avec Dieu… à entrer dans sa Présence, qui est source d’amour, de paix, de joie, de partage convivial et fraternel. 

La vie véritable serait comme une invitation à se réjouir avec Dieu de ce qui nous est offert dans la vie en Jésus-Christ. 


Mais la parabole pose une première question : acceptons-nous de répondre à l’invitation de Dieu à entrer en relation ?… une relation de Grâce, synonyme de joie et de gratuité ? 


La petite histoire racontée par Jésus montre que les invités ont souvent d’autres choses à faire : Soit ils sont happés par le travail quotidien et les tâches matérielles… Soit ils n’ont que faire de cette invitation, car il ne reconnaissent pas vraiment Qui est celui qui les invite. Ils n’ont pas conscience de la portée de cette invitation ou ils s’en moquent carrément.


Mais le Roi est persévérant. Il ne se laisse pas décourager par ces refus. 

Ils élargit l’invitation à tout être humain… à toutes celles et ceux que ses serviteurs vont croiser, quels que soient leurs chemins ou leurs parcours. 

Ainsi, les bons comme les mauvais sont invités au grand festin de noces. Personne n’est jugé ; personne n’est laissé sur le bord de la route. 


C’est là la Bonne Nouvelle communiquée par le Christ : Dieu nous met en mouvement… l'Eternel - force d’amour et de vie - est à l’image d’un Père de famille qui aime inconditionnellement les siens… ou d’un Roi qui invite chacun à entrer dans la joie d’une relation personnelle avec lui et avec les tous les invités… afin de partager et de fêter la noce, c’est-à-dire le mariage, l’alliance que Dieu propose aux humains, à travers son fils Jésus-Christ, qui est venu révéler son amour. 


Après ce premier message joyeux - que le Protestantisme n’a eu cesse de répéter, en mettant toujours en avant la Grâce de Dieu - la parabole nous entraine dans un deuxième temps (plus questionnant), avec un rebondissement inattendu, qui part d’un constat fait par le roi. 


Fait insolite : il y a là, parmi les convives, un homme qui ne porte pas de vêtements de noces. 

Le maitre s’en émeut et s’interroge : comme cela est-il possible ? Pourquoi cet invité n’a-t-il pas changé et adapté son vêtement ? 


Il questionne personnellement l’intéressé. Mais il n’obtient aucune réponse. Celui-ci reste muet. 

L’homme est alors chassé de la fête et de la joie… et se retrouve « dans le dehors », c’est-à-dire à l’extérieur de la noce, où règne le repli sur soi, l’obscurité, la peur et l’angoisse.  


Cette dernière partie de la parabole nous questionne personnellement : 

Et toi, quel est ton Roi ? Es-tu capable d’entrer en dialogue avec Lui ? 


Elle laisse entendre que les invités à la joie de la noce - qui bénéficient de la Grâce abondante du roi - ont - malgré tout - quelque chose à faire, pour s’accorder avec l’ambiance de la fête. 

Ils sont appelés à changer leurs habits, à revêtir un vêtement nouveau, un vêtement de joie. 


Dans la Bible, le vêtement est souvent synonyme d’identité. Les convives sont donc appelés à revenir une nouvelle identité : celle d’invités à la noce. 

En d’autres termes, ils sont appelés à se laisser transformer par Celui qui les invite. Ils ne peuvent pas continuer à vivre comme avant, comme si de rien n’était… ils ne peuvent pas accepter de venir à la noces, sans franchir le pas d’un changement : accepter de lâcher ses vieux habits (son égo, ses habitudes, ses soucis, ses préoccupations, …) pour revêtir le vêtement du partage et de la joie… et se réjouir de la Grâce offerte.


A bien y regarder… cet élan, ce mouvement… c’est un peu le nôtre dans la prière (qu’elle soit personnelle ou communautaire) : 

Souvent, lorsque nous prions, dans un premier temps, nous confions à Dieu nos soucis et nos voeux… nous lui remettons ce que nous avons sur le coeur (nous lui confions nos vêtements habituels, nos fatigues, nos pesanteurs) et nous entrons dans le lâcher-prise… 

Et ensuite - alors - nous sommes disponibles, pour autre chose… pour nous mettre à son écoute et entrer dans une vraie relation, dans la paix et la joie de Sa présence. 


La parabole montre donc qu’une double réponse est attendue : Premièrement, accepter de se rendre disponible et répondre à l’invitation… à la Grâce de Dieu… 

Et, deuxièmement, accepter de se laisser transformer par cette Grâce… accepter de changer son vêtement de tous les jours, sa mentalité et ses vielles habitudes… - peut-être l’habit des soucis… ou l’habit de la peur, de la méfiance ou de la distance - … pour revêtir une nouvelle identité d’enfants de Dieu, de frères et soeurs de Jésus-Christ… Ce qui signifie d’entrer pleinement dans la confiance et la joie du maître. 


Dans la parabole, il y a encore un détail qui peut attirer notre attention… C’est le fait… qu’au-delà du vêtement inchangé… le fameux convive -  à côté de la plaque - n’est pas non plus capable d’entrer en communication avec le maître. 

Sa langue est muselée - nous dit l’évangile de Matthieu. Il reste muet lorsqu’il est interrogé. Ce qui indique qu’il n’est pas vraiment entré dans une relation personnelle, ni dans la joie de la rencontre. 


C’est assez inimaginable ! Comment peut-on être invités à une noce, sans avoir envie de parler et de dialoguer avec le maître de maison, avec celui qui nous invite ? 

Si Dieu nous invite à la joie du Royaume, comment ne pas avoir le désir de lui répondre, d’accepter son invitation, de vouloir aller à sa rencontre et d’entrer en dialogue avec Lui ?


Deux points retiennent donc notre attention dans la dernière partie de cette parabole : 

c’est, à la fois, l’appel à se laisser transformer par Dieu et son invitation… et l’appel à entrer en dialogue avec Lui… à prendre la parole avec Dieu (en exprimant ce qui se joue en nous, nos joies, nos peines, nos difficultés, nos blessures, nos colères ou nos projets) pour entrer ensuite dans la confiance et l’écoute.


La parabole nous rappelle ainsi ce que le Seigneur attend de nous : 

Il veut faire de nous des partenaires à part entière, des convives pleinement impliqués… Ils nous appellent à prendre la mesure de cette invitation, en y prenant toute notre place. 


En d’autres termes, la Grâce de l’invitation… nous ouvre à l’alliance offerte par Dieu… et nous oriente vers un chemin de conversion, de transformation : Il s’agit de revêtir une nouvelle identité de disciples du Royaume, de frères et soeurs de J-C… et d’entrer en dialogue avec le Maître. 


* J’en viens à présent - et pour aller plus loin - aux autres textes que nous avons entendus - à commencer par celui de l’évangile de Marc (Mc 8,35) - Car il peut contribuer à éclairer notre lecture de la parabole reprise par Matthieu.


Je cite à nouveau ce verset bien connu : « Qui veut sauver sa vie, la perdra ; mais qui perdra sa vie à cause de moi et de l’Evangile, la sauvera »… 

un verset qui se trouve juste après cette parole singulière et dérangeante : « Si quelqu’un veut venir à ma suite qu’il se renie lui-même… » 


Rien de plus fort que ce verset pour exprimer la nécessité d’une transformation !

Mais que faudrait-il donc accepter de perdre, de lâcher… si ce n’est soi-même… si ce n’est son « moi », son égo ? 

Et pour gagner quoi ?


Qui aurait-il à y gagner si ce n’est la vie… la vie en abondance, la vie en plénitude. Ainsi que Jésus le promet dans l’évangile de Jean. 

Je cite à nouveau : « Je suis venu pour que les hommes aient la vie et qu’ils l’aient en abondance » (Jn 10,10). 


On l’entend à travers ces versets, l’évangile s’adresse à chacun pour lui dire qu’il est possible d’exister autrement. 

Et cette possibilité est donnée par celui-là même qui l’a expérimentée. Puisque Jésus-Christ a vécu une existence d’être humain (pleinement humain), en étant pleinement uni au divin. 


En ce sens, on peut dire que le Christ est non seulement un modèle, mais il est l’à-venir de l’être humain.


Non… Ce n’est pas l’homme augmenté ou modifié par la science, ni le transhumanisme, qui est l’à-venir de l’homme. Mais c’est le Christ, en tant qu’il nous révèle la possibilité d’être humain et d’être en même temps pleinement connecté et uni à Dieu. 


Si nous sommes là, ce matin, c’est que nous le savons :

Être chrétiens, c’est accepter de suivre Jésus-christ, c’est s’engager à suivre la voie de l’Evangile du Royaume… c’est entrer dans une vie vécue sous les espèces du don et de la gratuité… c’est une invitation à lâcher ses sécurités, pour le risque de la foi… pour entrer et cheminer dans une vie nouvelle. 


Le moteur de cette foi, c’est l’intuition que nous avons en nous… qui sait que la vie véritable est plus que la vie matérielle (biologique et consumériste)… C’est la soif du divin (du Dieu d’amour) qui est en nous… au creux de notre désir. 

C’est la soif d’une vie en plénitude, la soif de l’infini, au sens d’une vie véritablement intense et vivante… telle que le Christ l’a vécue et la promet : une vie abondante, synonyme de présence du divin dans l’humain. 


En effet, si Dieu est le Vivant, le fondement de l’être et de la vie… c’est lui qui peut vivifier notre être et notre existence… Si Dieu est Lumière, si Dieu est Amour… c’est en se connectant à Lui que nous pouvons recevoir ses dons… et recevoir cette vitalité qui vient de Lui ! 


Le christianisme est un appel à entrer en relation avec Dieu, avec le divin, pour accueillir en nous la foi, l’espérance, l’amour et la joie qui viennent de Dieu. 

Cela implique de faire de la place en nous-mêmes, de lâcher ce qui nous encombre, pour pouvoir accueillir Dieu et tous ses dons. 


Oui.. l’Evangile de Jésus-Christ annonce une heureuse nouvelle : il annonce la possibilité d’exister autrement !

Ce n’est pas seulement une parole de consolation ou d’encouragement… c’est bien plus que cela, c’est une Parole susceptible de produire une transformation. 


En ce sens, être croyant, ce n’est pas seulement une adhésion à un beau message réconfortant et stimulant… ou à des valeurs humanistes et fraternelles… C’est un chemin qui nous appelle à un déplacement, à un changement, à une transformation intérieure, orientée par le Christ. 


Puisque l’Evangile nous promet la vie en plénitude… il nous ouvre à une possibilité nouvelle (que nous ne pourrions pas réaliser nous-mêmes)… 

Il ouvre notre désir à ce qui l’excède, à savoir la Grâce de pouvoir exister pleinement avec Dieu et avec les autres. 


Il nous invite ainsi, à la fois, à réorienter notre désir (pour une vie plus consciente et plus aimante), à suivre Jésus-Christ, en expérimentant concrètement sa Parole : 

« Qui veut sauver sa vie, la perdra ; mais qui perdra sa vie à cause de moi et de l’Evangile, la sauvera ». 


Il y a une radicalité dans ces paroles paradoxales : c’est certain ! 

Pour trouver, il faut d’abord accepter de perdre !


Accepter de perdre le « moi », de lâcher l’égo… pour trouver le vrai Soi, pour trouver cette part de nous-mêmes (le Soi) qui est connectée au divin. 


Il y a donc un déplacement à opérer, un inconfort à accepter, un abandon à consentir. 

Accepter de faire confiance à Dieu… d’abandonner son « moi »… pour qu’il fasse émerger en nous « le soi » : c’est-à-dire la meilleure part de nous-mêmes, celle qui est connectée au divin et qui est créée à l’image de Dieu. 


Comme le rappelait la parabole, avec l’image du vêtement de noces… pour revêtir le vêtement du Royaume (vêtement de paix, de joie et d’amour), il faut accepter l’inconfort provisoire de se mettre à nu, en quittant son vieux vêtement (celui de l’égo, des apparences, des masques « sociaux » bien comme il faut… celui des habitudes, des choses bien rangées et cadrées, susceptibles de cacher les peurs, les inquiétudes ou les angoisses existentielles sous-jacentes). 


En bref… il est difficile pour nous d’entendre que l’Evangile ne devient une heureuse nouvelle que pour celui ou celle qui accepte de tout lâcher et d’ouvrir son coeur à Dieu…  


Il ne devient Bonne Nouvelle que pour celui qui accepte de se déprendre de lui-même… celui qui ose abandonner le terrain connu de la sécurité… qui ose tourner le dos au « moi » qu’il est… pour s’aventurer en direction du « soi » qu’il n’est pas encore… et qu’il pourrait devenir (dans la relation à Dieu). 


Oui… il y a une radicalité à abandonner l’illusion qui me fait croire que je suis quelqu’un par moi-même… pour accepter de croire que je peux enfin devenir quelqu’un d’authentiquement humain - et goûter ainsi la vie en plénitude - dans et par la relation au Dieu d’amour. 


La foi est ainsi à comprendre comme un chemin de transformation, qui implique des lâcher-prise… (à commencer par ce « moi » qui prend souvent tant de place). 


Même s’il y a des insécurités et des inconforts sur ce chemin… il pointe une direction infiniment prometteuse… une direction qui est susceptible de nous ouvrir à la joie du Royaume… Et c’est là l’essentiel : Garder en vue le cap et les promesses de Vie du Seigneur !


Nous sommes donc appelés - chers amis - à revêtir le Christ… pour expérimenter la joie du Royaume.


Osons confier toute notre vie et tout notre être au Seigneur, pour qu’il fasse, en nous, toute chose nouvelle !


Laissons-nous transformer par Lui !

Soyons porteurs de paix, de joie, d’espérance et d’amour ! 


Amen. 


Textes bibliques


Volonté de Dieu 

Ep 4, 17-18, 22-24, 32. 

Voici donc ce que je dis et atteste dans le Seigneur : ne vivez plus comme vivent les païens que leur intelligence conduit au néant. Leur pensée est la proie des ténèbres, et ils sont étrangers à la vie de Dieu, à cause de l'ignorance qu'entraîne chez eux l'endurcissement de leur cœur. […] Il vous faut, renonçant à votre existence passée, vous dépouiller du vieil homme qui se corrompt sous l'effet des convoitises trompeuses ; il vous faut être renouvelés par la transformation spirituelle de votre intelligence et revêtir l'homme nouveau, créé selon Dieu dans la justice et la sainteté qui viennent de la vérité. […] 

Soyez bons les uns pour les autres, ayez du cœur ; pardonnez-vous mutuellement, comme Dieu vous a pardonné en Christ.


Lectures bibliques 

Matthieu 22, 1-14 - Le festin nuptial


Et Jésus se remit à leur parler en paraboles : « Il en va du Royaume des cieux comme d'un roi qui fit un festin de noces pour son fils. Il envoya ses serviteurs appeler à la noce les invités. Mais eux ne voulaient pas venir. Il envoya encore d'autres serviteurs chargés de dire aux invités : “Voici, j'ai apprêté mon banquet ; mes taureaux et mes bêtes grasses sont égorgés, tout est prêt, venez aux noces.” Mais eux, sans en tenir compte, s'en allèrent, l'un à son champ, l'autre à son commerce ; les autres, saisissant les serviteurs, les maltraitèrent et les tuèrent. Le roi se mit en colère ; il envoya ses troupes, fit périr ces assassins et incendia leur ville. Alors il dit à ses serviteurs : “La noce est prête, mais les invités n'en étaient pas dignes. Allez donc aux places d'où partent les chemins et convoquez à la noce tous ceux que vous trouverez.” Ces serviteurs s'en allèrent par les chemins et rassemblèrent tous ceux qu'ils trouvèrent, mauvais et bons. Et la salle de noce fut remplie de convives. Entré pour regarder les convives, le roi aperçut là un homme qui ne portait pas de vêtement de noce. “Mon ami, lui dit-il, comment es-tu entré ici sans avoir de vêtement de noce ?” Celui-ci resta muet. Alors le roi dit aux servants : “Jetez-le, pieds et poings liés, dans les ténèbres du dehors : là seront les pleurs et les grincements de dents.” Certes, la multitude est appelée, mais peu sont élus. »


Marc 8,35

« Qui veut sauver sa vie, la perdra ; mais qui perdra sa vie à cause de moi et de l’Evangile, la sauvera ». 


Jean 10, 10

« Je suis venu pour que les hommes aient la vie et qu’ils l’aient en abondance »


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