Lv 19, 33-34
Lectures bibliques : Ex 23,
9-12 ; Lv 19, 9-10.33-34 ; Dt 24, 17-22 ; Es 58, 7
Thématique :
tu aimeras l’émigré comme toi-même (Lv 19,34)
Prédication de
Pascal LEFEBVRE / Marmande, le 06/09/15 – culte de rentrée, fête paroissiale
Prédication = voir plus bas, après les lectures
Lectures bibliques
Ex 23, 9-12 (voir aussi Ex 22, 20)
9Tu
n’opprimeras pas l’émigré ; vous connaissez vous-mêmes la vie de l’émigré,
car vous avez été émigrés au pays d’Egypte. 10Six années durant, tu ensemenceras ta terre et tu
récolteras son produit. 11Mais,
la septième, tu le faucheras et le laisseras sur place ; les pauvres de
ton peuple en mangeront et ce qu’ils laisseront, c’est l’animal sauvage qui le
mangera. Ainsi feras-tu pour ta vigne, pour ton olivier. 12Six jours, tu feras ce que tu
as à faire, mais le septième jour, tu chômeras, afin que ton bœuf et ton âne se
reposent, et que le fils de ta servante et l’émigré reprennent leur souffle.
Lv 19, 9-10. 33-34 (voir aussi Lv 23, 22 ;
Dt 10,19)
9Quand
vous moissonnerez vos terres, tu ne moissonneras pas ton champ jusqu’au bord et
tu ne ramasseras pas la glanure de ta moisson ; 10tu ne grappilleras pas non
plus ta vigne et tu n’y ramasseras pas les fruits tombés ; tu les
abandonneras au pauvre et à l’émigré. C’est moi, le SEIGNEUR, votre Dieu.
33Quand
un émigré viendra s’installer chez toi, dans votre pays, vous ne l’exploiterez
pas ; 34cet
émigré installé chez vous, vous le traiterez comme un indigène, comme l’un de
vous ; tu l’aimeras comme toi-même ; car vous-mêmes avez été des
émigrés dans le pays d’Egypte. C’est moi, le SEIGNEUR, votre Dieu.
Dt 24, 17-22
17Tu
ne biaiseras pas avec le droit d’un émigré ou d’un orphelin. Tu ne prendras pas
en gage le vêtement d’une veuve. 18Tu
te souviendras qu’en Egypte tu étais esclave, et que le SEIGNEUR ton Dieu t’a
racheté de là. C’est pourquoi je t’ordonne de mettre en pratique cette parole.
19Si
tu fais la moisson dans ton champ, et que tu oublies des épis dans le champ, tu
ne reviendras pas les prendre. Ce sera pour l’émigré, l’orphelin et la veuve,
afin que le SEIGNEUR ton Dieu te bénisse dans toutes tes actions. 20Si tu gaules tes oliviers, tu
n’y reviendras pas faire la cueillette ; ce qui restera sera pour
l’émigré, l’orphelin et la veuve. 21Si
tu vendanges ta vigne, tu n’y reviendras pas grappiller ; ce qui restera
sera pour l’émigré, l’orphelin et la veuve. 22Tu te souviendras qu’au pays d’Egypte tu étais
esclave ; c’est pourquoi je t’ordonne de mettre en pratique cette parole.
Es 58, 7
[Le jeûne que
je préfère…] N’est-ce pas partager ton pain avec l’affamé ?
Et
encore : les pauvres sans abri, tu les hébergeras,
si tu vois
quelqu’un nu, tu le couvriras :
devant celui
qui est ta propre chair, tu ne te déroberas pas.
Epître à Diognète (écrit non-canonique /
c’est un écrit apologétique de la fin du 2e siècle)
"Les
chrétiens résident, chacun dans sa propre patrie, mais comme des étrangers
domiciliés. Ils s'acquittent de tous leurs devoirs de citoyens, et supportent
toutes les charges comme des étrangers.
Toute terre
étrangère leur est une patrie, et toute patrie leur est une terre étrangère.
Ils sont dans la chair, mais ne vivent pas selon la chair. Ils passent leur vie
sur la terre, mais sont citoyens du ciel."
Prédication
* Tous les
jours ou presque, les actualités télévisées et les journaux parlent de ces
milliers de personnes qui arrivent aux portes de l’Europe. Cette semaine,
c’était la Hongrie et la gare de Budapest qui ont été au cœur de l’actualité.
C’est aussi une nouvelle tragédie en Méditerranée… avec les images de cet
enfant retrouvé noyé sur une plage turque.
On ne peut évidemment
pas resté insensible et indiffèrent au sort de ces milliers d’hommes, de femmes
et d’enfants qui arrivent sur nos côtes. Depuis le début de l’année 2015, plus
de 2500 migrants sont morts noyés en méditerranée. On compte 22000 morts à nos
frontières depuis 2000.
La France et
l’Europe doivent répondre aujourd’hui à la question humaine des migrants et des
réfugiés qui arrivent plus nombreux sur le continent européen.
Venus de
Syrie, d’Irak, d’Afghanistan, d’Erythrée ou d’ailleurs, le plus souvent pour
fuir la misère, la violence ou la guerre… de toutes professions – médecins,
professeurs, ouvriers, salariés - … on estime que jusqu’à 3000 migrants par
jour arrivent à nos portes, en passant par la Méditerranée pour débarquer en
Italie ou en Grèce… ou en passant par la Macédoine et la Serbie pour arriver en
Hongrie.
Selon les
spécialistes, cet afflux de réfugiés n’est pas prêt de s’arrêter.
Rien que dans
le sud de la Syrie, 4 millions de réfugiés veulent quitter leur pays pour
trouver refuge en Europe (essentiellement au Royaume uni, en Suède ou en
Allemagne), et tenter une nouvelle vie sur un contient plus prospère, sans
conflits armés.
En réalité,
les ¾ de ces migrants ont déjà trouvé asile en Turquie, au Liban ou en
Jordanie, qui accueillent à eux seuls dix fois plus de migrants que l’Europe.
Les chiffres
donnés par certains journaux (par exemple, La Croix, pour les chiffres de 2013
et 2014) parlent d’un phénomène en forte croissance : 435 000 migrants en
2013, plus de 620 000 demandeurs d’asiles en Europe en 2014. Et
vraisemblablement, ce chiffre sera supérieur à 750 000 en 2015. La guerre en
Syrie et en Libye constitue une des raisons de cette augmentation.
Face à ce
phénomène en croissance, l’Europe doit répondre à plusieurs difficultés :
- Répondre de
façon humaine à cet afflux
- Sur le plan
politique, s’entendre et trouver des arrangements entre pays européens, pour
une répartition équilibrée des réfugiés. Il semble qu’une politique de « quotas »
soit de retour.
- Lutter
contre les mafias des passeurs
- Sensibiliser
l’opinion publique, majoritairement contre l’accueil de nouveaux émigrés.
Essayons d’analyser
ce matin ces différents aspects :
*1er
point : Les journaux ont d’abord mis en avant le problème politique
provoqué par cet afflux de réfugiés. La règle européenne selon laquelle le
premier pays de l’UE où le demandeur d’asile a mis le pied doit prendre les
empreintes de ce dernier et traiter son dossier ne suffit plus, car l’Italie,
la Grèce, la Hongrie … et les autres pays frontaliers ne sont pas en capacité
de répondre, à eux seuls, aux problèmes soulevés par un afflux de migrants.
Cette semaine,
la France, l’Allemagne, l’Autriche et l’Italie se sont concertées pour
accueillir de nouveaux migrants. Rappelons déjà qu’en 2014, l’Allemagne,
première destination, a reçu plus de 200 000 demandes, soit 60 % de plus qu’en
2013. Numéro deux, la Suède en a reçu 81 000. En troisième et quatrième
positions, l’Italie et la France en ont reçu respectivement plus de 64 000 et
plus de 62 000. (Parmi eux, la France – qui semble très sélective – n’a accordé
un statut de « réfugié » qu’à 28% des demandeurs.)
La politique
des « quotas » proposée par certains gouvernements se heurte à
l’opposition d’autres pays européens – notamment à l’Est – qui entendent
conserver leur souveraineté sur cette question. La République tchèque, la
Slovaquie, la Pologne et la Hongrie ont exprimé leur refus d’accueillir de
nouveaux réfugiés.
Quelles que
soient les propositions des différents pays européens, même ceux qui acceptent
des quotas, il semble que les chiffres proposés soient très en deçà des réels
besoins et des nombreuses demandes.
La réalité,
c’est que pendant que les différents pays européens se divisent sur cette question
des « quotas »… sur la répartition de ceux qui ont survécu à leur périlleux
voyage vers l’Europe… d’autres continuent à mourir en chemin ou à être entassés
dans des camps de fortune.
On a
finalement l’impression que le sort de ces êtres humains dépend du bon vouloir
de quelques hommes politiques et de leurs marchandages, alors qu’il s’agit ici non
de marchandises, mais de familles, d’enfants, d’êtres humains, comme vous et
moi.
* Autre aspect
aussi évoqué cette semaine : l’Europe doit agir face aux réseaux des
passeurs qui organisent les migrations et qui s’enrichissent de façon injuste
et scandaleuse sur le dos des réfugiés, n’hésitant pas à les abandonner ou à
les laisser périr en mer, dans des soutes ou des camions. L’exploitation des
émigrés est devenue un véritable trafic – un business – contre lequel l’Europe et les gouvernements doivent agir
rapidement. Cela n’est évidemment pas du ressort des citoyens, mais dépend de
la volonté et de l’efficacité des gouvernements, qui doivent travailler
ensemble pour démanteler les filières des passeurs. (C’était l’objet d’une
émission de « C dans l’air » cette semaine.)
* Autre difficulté encore : Les différents gouvernements européens
doivent faire face à une sorte d’hostilité des citoyens qui sont
majoritairement contre l’accueil de nouveaux immigrés. C’est par exemple le cas
en France. Selon un récent sondage, l’opinion publique française reste
majoritairement (à 56 %) opposées à l’accueil d’immigrés clandestins et de
réfugiés sur le territoire français.
Mais il faudrait nuancer ce sondage et distinguer justement « les
immigrés clandestins » et « les réfugiés politiques ».
Malgré tout, plusieurs raisons expliquent ces chiffres : Nous sommes
dans une période de difficultés économique. La croissance n’est pas au
rendez-vous. Beaucoup de français pensent que dans la conjoncture actuelle,
nous n’avons plus les moyens d’accueillir de nouvelles personnes, qui
bénéficieront d’ici peu des aides sociales qu’offre la France.
D’autres ont peur que ces nouveaux arrivants prennent le travail des
français, dans une période où les offres d’emploi sont plutôt rares et le
nombre de chômeurs conséquent… En d’autres termes, certains craignent que ces
réfugiés viennent manger notre pain.
D’autres, enfin, trouvent que les étrangers sont déjà trop nombreux en
France et qu’on ne peut pas accueillir des personnes supplémentaires… que cela
créera, tôt ou tard, des problèmes en terme d’intégration.
On entend toutes ces peurs – la méfiance et la suspicion – dans les
débats ici ou là, relayés par les médias. Mais, il faut rappeler que la peur
est souvent « mauvaise conseillère » et que la plupart de ces craintes
sont fondées sur des préjugés.
La venue de réfugiés ne constitue pas un danger pour notre société ou un
péril pour notre civilisation, comme certains voudraient nous le faire croire,
en brandissant la menace d’une « invasion ».
Il faut, en effet, relativiser
les images que nous montrent les médias. Face aux 620 000 demandeurs d’asiles
en Europe en 2014, il faut rappeler que l’Union Européenne compte plus de 500 millions
d’habitants. Ce qui veut dire que ces réfugiés représentent (si leurs demandes
étaient toutes acceptées) 0,12 % de la population européennes.
(A côté de
cela, le Liban a accueilli un nombre de réfugiés correspondant au quart de sa
population.)
Des
spécialistes parlent de 60 millions de personnes aujourd’hui déplacées dans le
monde, à causes des guerres ou de la famine. Sur ces 60 millions, l’union
européenne en accueille seulement 6 % ; l’essentiel des réfugiés étant
dans les pays du sud (en Turquie, au Liban, en Jordanie, ou au Kenya qui
accueille le plus grand camp de réfugiés du monde).
Par ailleurs, que serait l’Europe, si elle renonçait à ses valeurs
humaniste d’universalité ? « Que
serait notre civilisation si elle renonçait à assumer la dimension universelle
de la dignité humaine? Que serait l'héritage du christianisme s'il se fermait
devant le pauvre à sa porte? ».
La Bible, la Torah nous appelle
– non à la peur – mais à la confiance… à l’accueil de l’autre, de l’étranger,
de celui qui est dans la pauvreté et la misère.
Il faut rappeler que le continent européen compte parmi les pays les plus
industrialisés et les plus riches de la planète. Alors, notre économie traverse
peut-être une période difficile – c’est une réalité – mais nous avons toujours
les moyens d’accueillir de nouveaux entrants sur notre territoire.
D’autres part, parmi les réfugiés syriens, il faut préciser que les
personnes qui frappent à nos portes sont, pour beaucoup, des personnes éduquées
et qualifiées, qui avaient, il y a peu, un travail dans leur pays (des
médecins, des professeurs, des chercheurs) : une classe moyenne qui a les
moyens de payer des « passeurs ». Les plus pauvres sont
malheureusement pour eux restés en Syrie.
Par ailleurs, ces réfugiés ne viennent pas chez nous, par profit, pour
bénéficier de prestations sociales plus attractives, mais pour fuir la mort… parce
que la vie est tout simplement devenue invivable chez eux… en raison de
l’insécurité, de la violence, des persécutions, de la guerre. C’est notamment
vrai pour la plupart des syriens et des irakiens, et un certains nombres de
ressortissants d’Afrique.
Nous avons peut-être en mémoire la fameuse phrase prononcée par Michel Rocard
qui disait que « la France ne peut pas accueillir toute la misère du monde ».
Et cela est vrai. Mais on oublie souvent la 2ème partie de son affirmation,
lorsqu’il ajoutait « mais, elle peut en prendre sa part ».[1]
Oui… la situation privilégiée de notre pays (par rapport à certains pays d’Afrique ou
du Proche-Orient, d’où viennent les réfugiés) nous permet d’accueillir des étrangers. C’est non seulement possible d’un
point de vue humain et économique, mais la Torah
nous rappelle que c’est un devoir en tant qu’être humain... pour ne pas dire un
commandement de Dieu. Nous avons à nous préoccuper du sort de nos frères
humains. Nous ne pouvons pas les laisser mourir dans l’indifférence. C’est une
question de justice et de fraternité.
Dans l’évangile, Jésus nous invite à chercher « le royaume et la justice de Dieu » (Mt 6, 33) dans
notre vie de tous les jours. Il nous donne aussi la parabole du bon samaritain (Lc
10) qui nous appelle – entre autres – à nous mettre à la place d’autrui… à nous
faire le prochain de l’autre, de l’étranger, de celui qui est blessé ou meurtri.
Nous-mêmes, que ferions-nous si nous étions nés en Syrie ou dans un pays
d’Afrique et que notre vie ou celle de notre famille se trouvait tout d’un coup
menacée par des combattants armés ? Ne fuirions-nous pas aussi la
violence ? N’aimerions-nous pas trouver sur notre chemin une main tendue pour
nous accueillir ? … et pouvoir tenter de reconstruire une nouvelle vie,
après avoir déjà tout perdu… après avoir enduré un certain nombre de
souffrances et de traumatismes ?
Les textes bibliques que nous avons entendus aujourd’hui nous appellent à
l’accueil et au partage, à changer de mentalité, en dépassant nos peurs et nos
inquiétudes.
Nous devons avoir conscience que la plupart des personnes qui se
présentent à nos frontières ne le font pas par confort, mais par nécessité…
parce que notre mode de vie européen – qui offre sécurité, liberté de
mouvements et de penser, possibilité de travail et solidarité – correspond à ce
qu’elle n’ont plus dans leur propre pays, soumis à la misère à cause de
l’oppression de la terreur ou de la guerre… des violences dont les politiques
étrangères européennes et américaines sont sans doute en grande partie
responsables.
Nous avons une chance inouïe de pouvoir vivre dans notre pays, sans
craindre pour notre vie, sans manquer de rien, de pouvoir participer à la
construction de notre avenir librement, de pouvoir éduquer nos enfants, de
penser et d’agir librement. Acceptons de partager cette possibilité avec
d’autres ? C’est ce à quoi nous appellent les paroles de la Bible.
Je crois que ce n’est pas avant tout une question « morale » –
de bien et de mal – mais une question « relationnelle ». Ces hommes
et ces femmes qui débarquent sur nos côtes ou à nos frontières sont des frères
et sœurs humains, ce sont des enfants de Dieu, au même titre que nous.
L’Evangile nous appelle à les aimer et les aider, uniquement à ce titre… sans
autre condition.
* Pour terminer la question se pose : que pouvons-nous faire
concrètement ?
Même si certains gouvernements décident d’accueillir des réfugiés en
nombre… la construction de centres pour ces réfugiés n’est pas une véritable
solution. Dans le passé, certains y sont restés des mois ou des années durant,
avant qu’un gouvernement n’étudie leur demande d’asile politique.
Il faut souhaiter que les associations et les citoyens – comme vous et
moi – se mobilisent, en proposant des solutions alternatives : certaines
associations et même des particuliers se proposent d’accueillir des réfugiés
chez eux, dans leur résidence secondaire ou leurs locaux vacants… pour que ces
réfugiés puissent trouver refuge, apprendre le français et retrouver un emploi.
Partout en
Europe, les choses ont commencé à bouger cette semaine : on voit des
témoignages de solidarité, un tissu associatif capable d’organiser l’accueil
des étrangers et d’aider leur insertion. C’est une bonne nouvelle que nos
concitoyens se remobilisent. Il nous faut retrouver les vertus d’hospitalité de
nos ancêtres : ceux de la France, comme ceux de la Bible.
En fonction de
nos moyens personnels, nous avons la possibilité d’agir, de donner du temps
(des cours de langues), de l’argent, ou de mettre à disposition des moyens (une
chambre, une compétence particulière, des vêtements, etc.) pour favoriser un
accueil plus humain de ces réfugiés.
Dans le
protestantisme, la FEP (fédération de l’Entraide Protestante) et la FPF
(fédération protestante de France) peuvent nous accompagner. Elles proposent et
recensent des initiatives.
Je laisse
également à votre disposition des tracts de l’association « Bienvenue »
créée à Agen. Cette association (qui travaille entre autres avec l’Entraide,
l’Acat, le CCFD) a déjà accueilli une famille. Des démarches sont en cours pour
accueillir une autre famille sur Agen.
Vous pouvez
les soutenir financièrement. Il y a aussi plusieurs associations sur Internet
qui vous proposent d’aider de différentes façons les réfugiés (en donnant de
l’argent, en soutenant les associations, en proposant des services, en
s’engageant dans le bénévolat, en hébergeant des réfugiés, en signant des
pétitions, en participant à des rassemblements citoyens).
A notre
niveau, nous pouvons toujours contribuer à changer les mentalités et agir
localement.
* Conclusion : Pour conclure, je voudrais juste rappeler
que la liberté de circulation est normalement un droit fondamental. C’est à la
fois une question de liberté fondamentale et une question d’égalité.
Aujourd’hui, le destin des uns et des autres reste avant tout déterminé par
l’endroit où ils/elles sont né-e-s. C’est la fermeture des frontières qui crée
cette inégalité insupportable, ce privilège du lieu de naissance.
Le droit de
quitter son pays est inscrit dans la Déclaration
universelle des droits de l’homme.[2] A ce
titre, chacun devrait légitimement pouvoir migrer dans un autre pays, surtout
quand sa sécurité et sa liberté sont menacées.
Cela doit nous
interroger sur la politique de fermetures de frontière de l’Europe. Bâtir
l’Union européenne comme une forteresse imprenable est aussi absurde
qu’inefficace… On voit bien que des gens risquent leur vie pour trouver la paix
sur notre continent et cela malgré des frontières fermées. Loin de décourager
ceux qui n’ont plus rien à perdre, la fermeture des frontières favorise en
réalité le trafic des passeurs.
Je lisait
cette semaine l’article d’un chercheur en sciences sociales. Je cite : « Faire croire que l’ouverture ou la
fermeture des frontières permet la maîtrise des flux migratoires est un
mensonge électoraliste. La construction du mur entre le Mexique et les
Etats-Unis n’a nullement ralenti les flux migratoires entre les deux pays, pas
plus que l’ouverture de la frontière entre l’Inde et le Népal n’a provoqué
d’afflux massifs de migrants »[3].
Les migrants ne viennent pas dans un pays en raison de leur politique
frontalière, mais parce qu’ils pensent que c’est là – dans ce pays – qu’ils
auront un nouvelle de chance de vie.
Au delà de la
politique… à notre niveau individuel, nous pouvons agir. En tant que Chrétiens,
nous sommes appelés à vivre la fraternité et la solidarité avec ceux qui
demandent notre aide. Nous sommes appelés à exercer nos responsabilités en
agissant avec nos moyens et les talents que Dieu nous a confié pour les mettre
au service d’autrui.
Pour agir de
façon juste, regardons l’actualité et notre monde Bible à la main : Dans
le livre de la Genèse, Abraham n’est-il pas présenté comme un émigré ? Jacob
n’a-t-il pas trouvé refuge en Egypte avec Joseph et ses frères au temps de la
famine ? Jésus ne nous entraîne-t-il pas à porter une attention
particulière vers le pauvre ou celui qu’on rejette ? Ne sommes-nous pas
seulement sur terre étrangers et voyageurs de passage (cf. 1 P 2,11) ?
Amen.
Pour Prolonger la réflexion (http://www.evangile-et-liberte.net/elements/archives/159.html)
Étrangers et voyageurs sur terre
L'étranger est
celui qui met en question ma manière de vivre et de penser, ou qui du moins les
relativise, qui me déstabilise dans mes certitudes culturelles et dans mes
valeurs quotidiennes, celui qui dit ce qu'il ne faut pas dire, qui met ses pas
là où il ne faut pas marcher, dont le comportement étonne, dérange ou fait
rire.
C'est notre
rôle à nous chrétiens d'être des étrangers, de fragiliser, de décaler, de
déstabiliser les valeurs de ce monde. Et peut-être l'humour est-il une de nos
armes ?
Car si on se
plonge dans l'Évangile, si on y plonge son esprit, sa raison, son coeur, sa
vie, on ne peut éviter de prendre ses distances par rapport à ce monde pour le
comprendre d'une autre façon que celle dont il se comprend lui-même, à partir
d'une Parole qui lui est extérieure et qui le met radicalement en question.
Jésus est cet
étranger inintégrable, qui finit sa vie rejeté par tous, vaincu, humilié,
ridicule. Le Dieu dont il parle, dont il nous montre le visage, est et doit
rester l'inconnu, l'étranger, qui fait de nous des étrangers, citoyens d'un
monde parallèle "aux frontières du réel" ou de ce que chaque homme
croît être le réel et qui est le regard d'une culture sur des personnes, des
objets et des évènements dont la vérité profonde nous échappe ("la vérité
est ailleurs").
Et parce que
notre rôle de chrétien est d'être des étrangers, nous ne pouvons qu'être
proches de tous les étrangers, ceux qui viennent d'un autre pays, ceux qui ont
une autre couleur, une autre religion, d'autres moeurs, d'autres références
culturelles, mais aussi ceux qui sont étrangers parce que "pas dans la
norme", ceux que notre société a isolés ou marginalisés dans des ghettos
(prisons, hôpitaux, maisons de retraite, asiles, internats, etc...), et
également ceux qui sont décalés par rapport à une image sociale de référence
plus rigide et bornée qu'il ne paraît, par exemple les mous, les gros, les
laids, les lents, tout simplement différents, quelle que soit leur différence.
Parce que
notre rôle à nous est d'être différents, tous les différents sont nos proches,
nos frères et nos soeurs.
Je pense pour
ma part que notre christianisme est encore le meilleur (ou le pire) facteur
d'étrangeté et d'inadaptation aux valeurs principales de ce monde, celles qui
restent les plus naturelles et fondamentales, celles du droit du plus fort, du
plus riche, du plus malin, celles des rejets de ce qui n'est pas conforme aux
normes de la masse.
Si on a la
folie de suivre -ou d'essayer- le chemin tracé par le Christ, dont le critère
unique est l'amour, on ne peut être qu'"étranger et voyageur sur
terre..."
Jacques Juillard
[1] En ce qui concerne les
demandeurs d'asile – c’est à dire des personnes ayant fui leur pays parce
qu’elles y ont subi des persécutions ou craignent d’en subir et qui sont
en quête d’une protection internationale – la France a enregistré 62800
demandes d’asile en 2014, loin derrière les Etats-Unis (88400) ou d’autres pays
d’Europe comme l’Allemagne par exemple (202 700 demandeurs), la Suède (81200)
ou l'Italie (64600).
Et si on rapporte ce chiffre a la proportion de la
population de chaque État membre de l’UE, ce qui est plus significatif, les
taux les plus élevés de demandeurs ont été enregistrés en Suède (8,4 demandeurs
d’asile pour mille habitants), devant la Hongrie (4,3), l’Autriche (3,3), Malte
(3,2), le Danemark (2,6) et l’Allemagne (2,5). La France n’arrive qu’en
douzième position (1 demandeur d’asile pour mille habitant). La France est donc
loin de “ployer” sous le poids des demandes comme on ne cesse de nous le
répéter.
La France n’est pas non plus le pays qui accorde le
plus de statuts de réfugié (ce qui constitue l’aboutissement “positif” de la
demande d’asile) : en 2014, dans l’UE, 45% des demandes d’asile ont été
reconnues positives. Le taux d’accord en France pour 2014 était quand a lui de
28%.
[2] Déclaration universelle des droits de l'homme - Article premier
Tous
les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont
doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans
un esprit de fraternité.
Article
3
Tout
individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne.
Article
13
1.
Toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l'intérieur
d'un Etat.
2.
Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de
revenir dans son pays.
Article
14
1. Devant la
persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de bénéficier de
l'asile en d'autres pays.
[3] http://www.lalibre.be/debats/opinions/migrants-voici-dix-raisons-d-ouvrir-les-frontieres-55d6040335708aa4379f81c9
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