dimanche 17 juillet 2022

Gn 18, 1-19

 Lectures bibliques : Gn 18, 1-19 ; Lc 10, 38-42 (voir textes en bas de cette page)

Thématique : Se rendre disponible au Seigneur lorsqu’il vient incognito à notre rencontre 

Prédication de Pascal LEFEBVRE – temple du Hâ / Bordeaux – 17/07/22

(Inspiré d’une méditation de Annette Preyer sur Gn 18)

 

*Cet été, nous sommes un peu comme Abraham… sous la pleine chaleur du jour !

Seulement lui est assis dans sa tente, sous des chênes.

Là, le Seigneur lui apparait. 

Abraham aperçoit alors trois hommes de passage qu’il s’empresse d’accueillir avec hâte et hospitalité. 

L’hospitalité est en effet un devoir sacré du croyant en ce temps-là. 

 

En s’adressant à ces hommes, Abraham emploi le singulier « Mon Seigneur » 

Puis le récit repasse au pluriel dans la réponse que font les 3 étrangers.

A plusieurs reprises, le texte passe du pluriel au singulier : ce qui fait qu’il est difficile pour le lecteur ou l’auditeur de deviner l’identité des convives : s’agit-il du Seigneur (c’est-à-dire de Dieu lui-même) ? de 3 inconnus ? d’un seul homme ? de 3 anges ? 

Il y a de fortes incertitudes dans le récit. 

Cela nous signale peut-être qu’Abraham n’a pas réalisé immédiatement que c’était Dieu qui venait à lui. 

 

Par contre, nous avons quelques informations sur Abraham.

Il est riche en troupeau. Il possède de nombreux serviteurs pour s’en occuper. Il est un nomade et doit certainement vivre dans un village constitué de tentes. 

Il est déjà vieux, puisqu’il a presque 100 ans, mais il est alerte. 

Et surtout – à la différence de notre époque – il a du temps. 

Sa vie est fixée sur le rythme de la nature et de ses nombreuses bêtes qui devaient paître à proximité.  

 

Ainsi, le Seigneur lui apparait, et voilà que 3 hommes se présentent devant lui. 

Suivant les lois de l’hospitalité, il leur fait préparer un véritable festin. 

Il fait servir à ses invités tout ce qu’il a à sa disposition : galettes, viande, lait. Il organise le service. 

Et c’est ensuite, une fois qu’ils ont mangé, que le Seigneur prend l’initiative, en prenant la parole. 

 

On lui annonce que sa femme Sara donnera naissance – que le fils tant attendu naitra l’année suivante - et que sa descendance sera nombreuse. 

Cette nouvelle est pour le moins surprenante compte tenu de l’âge de Sara. Au début, elle a certainement du mal à y croire. Ce qui fait qu’elle rit silencieusement.

 

Les mystérieux visiteurs s’en aperçoivent, mais ils confirment la promesse faite : Sara aura bien un fils. 

 

On peut retenir au moins 5 choses de cette belle histoire pour le moins étonnante : 

 

-      Premièrement, Dieu vient sans prévenir dans notre quotidien. Nous ne sommes pas forcément prêts pour l’accueillir. 

D’une certaine manière, il vient à l’improviste, il nous dérange, il débarque par surprise. 

Mais, à l’exemple d’Abraham, savons-nous le recevoir ? Nous rendons-nous disponibles pour l’accueillir dans notre cœur ? 

Peut-être que Dieu nous fait des signes, à nous aussi, aujourd’hui encore ?

 

Accueillir Dieu, c’est le découvrir là où je ne m’y attends pas.

C’est accepter de nous laisser surprendre et déranger, de nous rendre disponible à lui. 

Car Dieu peut apparaitre à travers le visage d’un autre, sans que nous le sachions… à travers le visage d’un inconnu, dans un contexte imprévu, sans que nous nous y attendions. 

 

-      Précisément – et c’est le deuxième point – Dieu arrive incognito. 

Comme je le disais, le récit laisse planer une sorte d’incertitude sur l’identité précise de l’interlocuteur d’Abraham : 3 hommes, 1 seul, des anges, Dieu lui-même ? 

L’auteur emploie tantôt le singulier, tantôt le pluriel, comme si les choses nous échappaient. 

 

Les manifestations de Dieu peuvent prendre de multiples visages dans la Bible :

Il manifeste sa présence par l’arc-en-ciel pour Noé ; par un buisson ardent pour Moïse ; par un ange pour Marie ; par un rêve pour Joseph ; par un jeune homme vêtu d’un vêtement blanc pour les femmes venues au tombeau, le matin de Pâques. 

 

Puisqu’il n’est pas clairement identifié a priori, cela nous oblige à veiller, à rester ouvert et vigilant, à sortir de nos schémas établis.

 

Accueillir Dieu, c’est se tenir prêt, comme Abraham… sur le seuil, prêt à accueillir l’étranger de passage, accueillir le prochain dans l’inattendu d’une rencontre. 

 

De cette rencontre peut surgir de la nouveauté ou la réalisation d’un projet cher à notre cœur... ou le désir profond – parfois encore inconscient – de notre âme. 

 

-      Troisièmement, quand Dieu vient sans prévenir, il nous parle du sens de notre vie, de sa direction, de l’avenir. 

Pour Abraham et Sara, c’est la promesse d’être le père et la mère d’Isaac, de donner naissance à un futur grand peuple. 

 

Cela signifie que Dieu mise sur Abraham, qu’il lui fait confiance. Et parfois cela peut être exigeant. Car sa promesse engage notre avenir. 

 

Il y a aussi pour nous une promesse : 

la promesse du Royaume, dont Jésus dit partout dans l’Evangile, qu’elle est à notre portée. 

Seulement cette promesse nous appelle au changement : à adopter une nouvelle mentalité et un style de vie plus altruiste, plein de générosité et de compassion. 

 

Et puis cette promesse, si elle est en train de se réaliser, elle entre en tension avec la réalité, avec le monde actuel, où règne encore le « chacun pour soi », la concurrence, mais aussi les rivalités, les conflits, la guerre en Ukraine, les pressions politiques qui cultivent la peur de la pandémie, ou encore l’urgence climatique, comme le montre les pics de pollution, le manque d’eau ou les incendies chez nous, en Gironde. 

 

Il y a parfois de quoi douter, parce qu’il y a un décalage entre les promesses de Dieu et la réalité présente. 

 

Abraham et Sara sont vieux. Ils avaient, eux aussi, de quoi douter devant la promesse d’une descendance. Ils avaient de quoi être septique face à l’annonce d’une nouvelle qu’ils n’attendaient plus. Et pourtant, ils ont cru. 

 

Dieu tient sa promesse. L’histoire d’Abraham le révèle.

Mais, c’est vrai, nous sommes encore en chemin. 

Le temps peut paraitre long lorsque les choses ne sont pas encore réalisées. 

Dieu nous invite à garder la foi et la patience. 

 

La promesse de Dieu est une ouverture dans notre vie : il nous révèle un autre avenir possible. 

Il vient manifester le sens, la beauté de notre vie, et il stimule notre désir de voir advenir cette nouveauté. 

Il nous révèle qu’un avenir nouveau peut s’ouvrir à nous, si nous nous mettons à son écoute. 

 

Parfois la présence de Dieu ne se comprend qu’après coup,a posteriori, en regardant notre histoire ou nos trajectoires dans le rétroviseur. 

Il est toujours bénéfique de relire sa vie, pour y repérer les tournants et peut-être les traces de la présence du Seigneur. 

C’est ce que l’on réalise parfois avec un peu de temps ou lors d’un accompagnement spirituel. 

 

-      Quatrième point, lorsque Dieu nous rencontre incognito, il nous parle de notre vie. Alors l’amour est en jeu.

 

Pour Abraham et Sara, le mystérieux visiteur parle d’amour et de grossesse. Il est évident que cela implique des ébats amoureux. Face à cette annonce, le rire de Sara est peut-être nostalgique ou amer, ou simplement amusé, car la perspective folle de nouvelles étreintes à son âge, ainsi que la naissance d’un bébé issu de sa chair flétrie, peuvent la faire sourire. Elle pensait sans doute que ce temps-là – ce temps de l’amour physique –était révolu. Alors, lorsque tout cela lui est annoncé, un rire intérieur la surprend. Peut-être est-ce un rire libérateur, de joie, après tant de décennies de veine attente et d’humiliation pour la belle Sara que tout le monde pensait stérile. 

 

Dieu est amour. Il nous appelle à aimer. 

« Qui demeure dans l’amour demeure en Dieu, et Dieu demeure en lui »affirme Jean, dans sa première épitre. 

L’amour concerne toutes les dimensions de notre vie : 

Pas seulement la dimension spirituelle, mais – puisque nous sommes des êtres incarnés – cela concerne aussi notre dimension charnelle, relationnelle. 

Ici, le couple a agi avec amour, en accueillant des étrangers avec bienveillance. Et il reçoit, à son tour, en retour, la promesse de l’amour. 

 

-      Cinquième et dernière remarque sur ce récit : quand Dieu vient sans prévenir à notre rencontre, il nous parle de la vie, plein d’amour, alors tout devient possible. 

 

Sara, très vieille femme, ne pouvait imaginer avoir un fils.

Marie, très jeune femme, ne pouvait imaginer déjà accoucher d’un fils.

Jésus dit souvent « ta foi t’a sauvé »ou« ta foi t’a guéri »ou « qu’il te soit fait selon ta foi » !

Alors, faut-il croire aux miracles ? Croire que tout est possible pour Dieu ?

 

Abraham et Sara l’ont cru !... Peut-être avec un peu de temps. 

 

Ce qui est sûr, c’est que nous sommes aimés de Dieu. Nous pouvons – tels Abraham et Sara – lui faire confiance, car il pourvoit à nos besoins et il veut le meilleur pour nous. Nous pouvons donc pleinement nous ouvrir à lui. 

 

Ce que nous dit ce récit, c’est que cette ouverture à Dieu, peut passer par des rencontres et des paroles inattendues, parfois surprenantes, dérangeantes, ou bien réconfortantes. 

 

Cette histoire nous donne du courage, car si Dieu est Dieu, s’il est l’Éternel, s’il est Souffle créateur, s’il est Amour, y aurait-il quelque chose qu’il ne puisse réaliser ? 

 

Ce qui nous manque parfois, c’est d’accueillir la bonne nouvelle qu’il nous adresse, d’être assez disponible pour l’entendre et la recevoir, et, c’est aussi la foi, la confiance pour y croire. 

 

Ainsi donc, Dieu vient dans notre vie de façon inattendue, et nous sommes en droit d’attendre quelque chose de lui, pour que notre vie soit bonne et pleine de belles surprises. 

Nous sommes en droit d’avoir une véritable espérance, puisque rien n’est impossible à Dieu.

 

*Je terminerai par quelques remarques sur l’autre passage biblique que nous avons entendu : l’histoire de Marthe et Marie, simplement pour en livrer quelques éléments. 

 

L’hospitalité est ici aussi mise en avant.

Marthe fait tout pour recevoir Jésus le mieux possible.

Elle se « plie en quatre ». Elle en fait même trop, puisque Luc précise qu’elle s’affaire à un service compliqué. 

L’agitation de Marthe peut nous faire penser à celle d’Abraham. Mais, la différence, c’est qu’elle finit par perdre patience, se sentant seule à l’ouvrage. Elle se plaint… elle aimerait l’aide de sa sœur Marie. 

 

Jésus lui répond qu’elle s’inquiète trop, qu’elle s’agite inutilement… autrement dit, qu’elle est excessive, que son intense activité lui cause du stress, et que tout cela est sans doute « disproportionné ». 

Et du coup, elle risque de passer à côté de l’essentiel :

-      Vivre l’instant présent avec celui qu’elle accueille

-      Rester calme et sereine 

-      Se mettre à l’écoute du Seigneur.

 

La meilleure place pour Jésus consiste à prendre le temps (ce qu’a fait Marie) :

Libérer du temps pour la rencontre…  Prendre le temps de se rendre disponible… pour se mettre à l’écoute du Seigneur.

Car précisément, cette disponibilité de l’esprit est nécessaire pour être à l’écoute de son enseignement, de sa bonne nouvelle, et de ses promesses. Et c’est ce qui a manqué à Marthe ce jour-là.

 

*Ainsi, chers amis, vous l’avez remarqué : ces deux passages parlent en fait de cette disponibilité du cœur nécessaire. 

Et cela nous interroge dans notre rapport au temps, surtout à notre époque où tout va si vite, où l’on a l’impression que le temps s’accélère. 

 

Est-ce que nous prenons le temps dans notre quotidien d’accueillir l’autre ? et de rencontrer le Seigneur ?

 

Il est parfois nécessaire de revoir l’ordre de nos priorités. 

Cessez de nous inquiéter, accepter de lâcher-prise des soucis matériels, pour prendre le temps de la rencontre qui peut apporter du changement et de la nouveauté, et aussi le temps de la méditation.

 

Il ne faut pas seulement nourrir notre être extérieur, mais prendre le temps d’ouvrir et d’élargir l’espace de notre être intérieur. 

D’ailleurs, l’épisode qui suit dans l’évangile de Luc, contient un enseignement sur la prière, avec le Notre Père.  

 

Ainsi, il me semble que ces deux passages qui parlent d’hospitalité, interrogent notre rapport au temps, notre disponibilité, et nous invite à prendre le temps de la rencontre avec le Seigneur…. En acceptant de laisser de côté nos soucis quotidiens.

 

Nous trouvons bien des passages dans la Bible qui nous invite à lâcher ces soucis, pour les confier au Seigneur : 

 

- Par exemple, dans le psaume 55 (v23) : « Rejette ton fardeau, mets-le sur le SEIGNEUR, il te réconfortera, il ne laissera jamais chanceler le juste. »

 

- Ou, dans la première épitre de Pierre (1 P 5,7) : « Déchargez-vous sur Dieu de tous vos soucis, car il prend soin de vous. »

 

Qu’il nous soit donné - chers amis - de prendre du temps dans notre vie personnelle… de choisir la « bonne part »… à la suite d’Abraham et de Marie : … celle qui nous permet d’entendre les promesses de Dieu, qui nous ouvrent à la nouveauté… celle qui peut nous transformer et nous rendre rayonnant de l’amour de Dieu.  

 

Amen. 

 

Textes bibliques

 

Gn 18, 1-19

 

1Le SEIGNEUR apparut à Abraham aux chênes de Mamré alors qu’il était assis à l’entrée de la tente dans la pleine chaleur du jour. 

2Il leva les yeux et aperçut trois hommes debout près de lui. A leur vue il courut de l’entrée de la tente à leur rencontre, se prosterna à terre 

3et dit : « Mon Seigneur, si j’ai pu trouver grâce à tes yeux, veuille ne pas passer loin de ton serviteur. 

4Qu’on apporte un peu d’eau pour vous laver les pieds, et reposez-vous sous cet arbre. 

5Je vais apporter un morceau de pain pour vous réconforter avant que vous alliez plus loin, puisque vous êtes passés près de votre serviteur. » Ils répondirent : « Fais comme tu l’as dit. »

6Abraham se hâta vers la tente pour dire à Sara : « Vite ! Pétris trois mesures de fleur de farine et fais des galettes ! » 

7et il courut au troupeau en prendre un veau bien tendre. Il le donna au garçon qui se hâta de l’apprêter. 

8Il prit du caillé, du lait et le veau préparé qu’il plaça devant eux ; il se tenait sous l’arbre, debout près d’eux. Ils mangèrent 

9et lui dirent : « Où est Sara ta femme ? » Il répondit : « Là, dans la tente. » 

10Le SEIGNEUR reprit : « Je dois revenir au temps du renouveau et voici que Sara ta femme aura un fils. » Or Sara écoutait à l’entrée de la tente, derrière lui. 

11Abraham et Sara étaient vieux, avancés en âge, et Sara avait cessé d’avoir ce qu’ont les femmes. 

12Sara se mit à rire en elle-même et dit : « Tout usée comme je suis, pourrais-je encore jouir ? Et mon maître est si vieux ! » 

13Le SEIGNEUR dit à Abraham : « Pourquoi ce rire de Sara ? Et cette question : “Pourrais-je vraiment enfanter, moi qui suis si vieille ?” 

14Y a-t-il une chose trop prodigieuse pour le SEIGNEUR ? A la date où je reviendrai vers toi, au temps du renouveau, Sara aura un fils. » 

15Sara nia en disant : « Je n’ai pas ri », car elle avait peur. « Si ! reprit-il, tu as bel et bien ri. »

16Les hommes se levèrent de là et portèrent leur regard sur Sodome ; Abraham marchait avec eux pour prendre congé. 

17Le SEIGNEUR dit : « Vais-je cacher à Abraham ce que je fais ? 

18Abraham doit devenir une nation grande et puissante en qui seront bénies toutes les nations de la terre, 

19car j’ai voulu le connaître afin qu’il prescrive à ses fils et à sa maison après lui d’observer la voie du SEIGNEUR en pratiquant la justice et le droit ; ainsi le SEIGNEUR réalisera pour Abraham ce qu’il a prédit de lui. »

 

Lc 10, 38-42

 

38Comme ils étaient en route, Jésus entra dans un village et une femme du nom de Marthe le reçut dans sa maison. 

39Elle avait une sœur nommée Marie qui, s’étant assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole. 

40Marthe s’affairait à un service compliqué. Elle survint et dit : « Seigneur, cela ne te fait rien que ma sœur m’ait laissée seule à faire le service ? Dis-lui donc de m’aider. » 

41Le Seigneur lui répondit : « Marthe, Marthe, tu t’inquiètes et t’agites pour bien des choses. 

42Une seule est nécessaire. C’est bien Marie qui a choisi la meilleure part ; elle ne lui sera pas enlevée. »

 

 

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