dimanche 16 juin 2024

Mc 4, 26-34

 Lectures bibliques : Lc 17, 20-21 ; Marc 4, 26-34 ; Mt 5, 1-10 (voir textes en bas de cette page)

Thématique : un Evangile qui fait grandir et qui transforme 

Prédication de Pascal LEFEBVRE / Bordeaux, le 16/06/24 - culte avec baptême 



Dans les passages que nous méditons aujourd’hui, il est question d’ouverture au « règne de Dieu ». 


Pour Jésus, le Royaume de Dieu est une réalité qui vient : elle peut advenir et s’incarner dans notre vie. Nous pouvons nous y ouvrir. 


Là où souffle l’Esprit de Dieu  (et sa Parole) … là où l’être humain accepte de le (la) recevoir dans la foi… là où l’amour et la justice triomphent dans le cœur de l’homme… là se manifeste et grandit le Royaume de Dieu. Il devient « réalité » lorsque Dieu règne sur notre vie. 


Pour le dire autrement… la plus grande illusion de l’être humain, est liée à son égo et à sa prétention (son orgueil) : c’est de croire qu’il peut se sauver tout seul, par lui-même. 

Pour Jésus, la première posture du croyant est « l’humilité » : la foi consiste à accepter de faire confiance à un Autre que soi-même… à se décentrer de son égo… pour s’ouvrir à Dieu et Le mettre au centre (de notre existence, de nos préoccupations)… pour Le laisser régner sur notre vie… afin qu’elle soit pleine et abandonnante. 


En quatre points / quatre flash -  examinons un peu mieux les paraboles de ce jour : 


1) premier point : 


Dans l’évangile de Luc (cf. Lc 17) - en fonction de la traduction choisie - le règne de Dieu peut être compris et envisagé comme une réalité intérieure : il serait accessible en nous / au-dedans de nous ; il est (en tout cas) parmi nous / à notre portée. C’est quelque chose qui peut advenir et grandir. 


Dans l’évangile de Marc (cf. Mc 4), Jésus compare le règne de Dieu à quelqu’un qui jette la semence dans la terre… donc à quelque chose - à une réalité - dynamique… qui comprend deux actions : une initiative (donner, jeter) et une croissance quasi automatique ou naturelle (il s’agit de laisser pousser)… pour produire de la vie. 


L’auditeur de l’évangile est interpellé par cette parabole a priori très simple : 

Mais qui donc est celui qui jette la semence : Est-ce que ce ne serait pas Jésus ? 

Et quelle est cette semence ? Est-ce l’Esprit saint (le Souffle de Dieu) ? Est-ce la Parole de Dieu, l’Evangile lui-même ? 

Et quelle est cette terre - ce terrain - susceptible d’accueillir la semence ? N’est-ce pas le coeur de l’être humain ?


L’interrogation porte également sur le processus : « les graines germent et poussent sans que personne ne sache comment ». 

Il y a donc une confiance à avoir, à donner : si la semence est jetée et si la terre est bonne et accueillante… il va forcément se produire quelque chose… une germination, une croissance, une fructification… 

Il suffit donc de vivre le temps présent en faisant confiance à la potentialité contenue dans la graine et à la fertilité de la terre. 


Il y a ainsi une promesse offerte : l’advenue du Royaume de Dieu (symbole de vie en plénitude) pour celui qui reçoit la semence… après un temps de réception et de maturation nécessaire. 


Plus loin, dans une autre parabole, Jésus compare aussi la petitesse initiale de la graine de moutarde (considérée comme une des plus petites) avec la taille finale - plutôt grande - de la plante potagère. 

C’est le contraste qui est mis en avant… une croissance importante est envisagée malgré la petitesse du début… Il y a, à nouveau, une promesse : ce qui est planté peut produire un résultat prodigieux. 


2) Deuxième point / deuxième aspect : 


Ces deux paraboles peuvent facilement être mises en lien avec la parabole (bien connue) du semeur qui est au début du même chapitre (cf. Mc 4)… et qui porte sur la question du lieu d’accueil de la Parole : est-ce que notre coeur est disposé à l’accueillir ? 

Est-il comme une bonne terre accueillante ? Ou est-il trop sec ou trop préoccupé (trop encombré) par d’autres choses (par d’autres soucis, d’autres préoccupations) qui font qu’il n’y a peut-être pas de place pour accueillir la parole du Royaume ? 


Jésus pointe donc des promesses… promesses de vie, de transformation, de croissance, de fruits… mais il pose la question initiale de l’ouverture et de la disponibilité de coeur. 


On peut d’ailleurs faire un lien étymologique entre la terre, « l’humus » et « l’humilité » (dont je parlais en introduction)… car c’est la même « racine ». 

L’humilité et la disponibilité du coeur, signifient l’ouverture possible à l’altérité. 

Celui qui a un coeur trop encombré (par lui-même ou ses soucis) n’a pas de place pour accueillir l’Esprit saint (le souffle divin) ni la Parole du Christ (son envoyé, son porte-parole). 


C’est en ce sens qu’on peut comprendre la première béatitude : « heureux les pauvres de coeur / les humbles de coeur - le royaume des cieux est à eux » (cf. Mt 5).


Cette affirmation (cette promesse de bonheur) est une question posée à chacun… car nous sommes dans une époque où le temps s’est accéléré et nous avons tellement d’occupations, de préoccupations (de distractions dirait Blaise Pascal)… que je ne suis pas sûr que nous nous rendions vraiment disponibles - que nous prenions du temps au quotidien - pour le mettre à part… pour accueillir l’Evangile et l’Esprit saint dans notre vie. 


Il est donc nécessaire - si nous prenons au sérieux les paroles de Jésus - d’accepter de ralentir un peu, et de s’offrir à soi-même un temps « consacré » (mis à part) dans notre vie, pour nous ressourcer… pour entrer dans la méditation, la prière ou la lecture de textes bibliques ou méditatifs… Car si le Christ nous promet une transformation de notre être intérieur… en vue de croitre et de produire du fruit (quelque chose de beau et de bon)… il serait non seulement utile, mais souhaitable, de nous rendre disponibles à sa promesse, à sa Parole et à l’Esprit saint. 


Ces petites paraboles sont donc une manière de nous rappeler l’essentiel : de nous dire que le Souffle de Dieu et sa Parole sont comme une sève qui peut nous nourrir, comme une lumière qui peut nous élever (ou nous relever) et nous faire grandir. 

L’Esprit saint - pour autant que nous nous ouvrirons à lui - nous apportera de la vitalité, une belle énergie… pour nous permettre d’atteindre la pleine maturité. 


N’est-ce pas d’ailleurs une des signification du mot « salut », qui signifie - dans le jargon religieux - à la fois, libération et guérison, mais aussi vie, vitalité, « vitalisation » ou « vivification »… 


C’est en ce sens - de « vie », de « vitalité » - qu’on peut également envisager les Béatitudes… non pas comme la promesse d’un bonheur naïf… exempt de soucis ou de malheurs… mais comme la promesse d’un bonheur à recevoir (malgré tout, en dépit des épreuves)… un bonheur qui est un don… et qui prend son sens quand on vit avec le Seigneur… sous l’égide de l’Esprit du Christ : la compassion, l’amour, la générosité, le pardon, la douceur, la paix et la justice. 


Expérimenter ces vertus relationnelles et solidaires… dans la communion avec l’Esprit saint… cela est susceptible de nous rendre heureux !


3) Troisième point / troisième flash avec ces petites paraboles  : 


Il y a aussi une autre perspective développée dans l’image de la petite graine qui devient la plus grande des plantes potagères, c’est la question des potentialités qui sont contenues - mais encore cachées - dans cette petite chose qu’est la graine. 


Et cette question des potentialités nous intéressent tous. Car nous avons tous des désirs et des rêves : Est-ce que nous sommes parvenu à être, à devenir, qui nous voulions être ? 


Dit autrement, qu’est-ce qui peut-être nous a manqué - ou nous manque encore - pour être la personne que nous rêvions d’être ? 

Quelles caractéristiques souhaiterions-nous accueillir ou acquérir pour être celui ou celle qui nous permettra de nous déployer pleinement, pour vivre selon les valeurs qui nous semblent vraies, justes et bonnes ? 

De quoi avons-nous besoin pour incarner la plus belle version de nous-mêmes ?


Il semble que Jésus réponde à cette question : incarner la meilleure version de nous-mêmes est possible, pour autant que nous soyons à l’image de la bonne terre (humble, confiante, disponible) qui accueille la semence, pour la laisser croitre. 

Cela nécessite de nous ouvrir au Souffle de Dieu - à l’Esprit saint - qui peut nous aider à réaliser nos plus belles potentialités. 


Car il n’y a pas que le corps et la vie matérielle et biologique. Il n’y a non plus pas que l’âme (la psyché), la vie intellectuelle et émotionnelles, avec ses motivations et ses désirs. Il y a aussi notre part spirituelle - cette part essentielle de notre être (notre vrai Soi) connectée au divin - que nous sommes appelés à laisser croitre. 

C’est elle qui va élargir notre conscience, ouvrir notre coeur, et nous offrir plus de paix, de compassion, d’amour et de joie. 


Dans ses lettres, l’apôtre Paul parle aussi des fruits de l’Esprit. 

Je cite : « Ce que l'Esprit saint produit, c'est l'amour, la joie, la paix, la patience, la bienveillance, la bonté, la fidélité, la douceur et la maîtrise de soi » (cf. Ga 5, 22-23). 


L’image de la graine est intéressante, car elle nous rappelle que toutes ces potentialités sont inscrites en nous… - si Dieu a créé l’homme à son image, cette image se trouve en germe, en potentialité, à l’intérieur de nous - …. et pour que la graine se développe… pour qu’elle atteigne sa vocation et sa perfection… elle doit, à la fois, aller creuser dans l’humus et l’humilité de la terre (à l’image du Christ qui s’est abaissé)… et aller chercher la lumière du Ciel (à l’image de celui qui s’est tourné vers le Père et qui a été élevé et relevé par Lui). 


Il nous faut donc la Source de l’Evangile du Christ (qui garde la foi face à l’adversité, aux tempêtes et à la mort)… et la lumière de Dieu (qui nous inonde de sa grâce, de sa paix et de sa joie)… pour avancer vers la Vie. 


4) Quatrième point / et dernier flash : 


Il faut aussi que la graine se débarrasse de sa coquille pour pouvoir se déployer. 

En ce sens, les anciens pensaient que la graine devait mourir à elle-même pour pouvoir germer 

(C’est ce que l’évangéliste Jean exprime, par exemple - cf. Jn 12, 24 : « Oui, je vous le déclare, c'est la vérité : à moins qu'un grain de blé ne tombe en terre et ne meure, il ne reste qu'un simple grain. Mais s'il meurt, il produit beaucoup de fruits »). 


Se défaire de sa coquille - pour la gaine - c’est une image pour dire qu’il est nécessaire de laisser aller - de laisser tomber -  tout ce qui risque nous nous amoindrir, de nous restreindre ou de nous paralyser - afin de pouvoir déployer tout notre être et nous réaliser pleinement. 


Au départ, la coquille de la graine est là pour la protéger. 

Elle fait de son mieux, pour maintenir intacte la vie, mais la graine devra s’en débarrasser pour exprimer son plein potentiel. 


Cette coquille protectrice, ça peut être l’image de l’égo - notre égo - qui a ce rôle protecteur, car il permet de sauvegarder notre identité, notre personnalité. Il peut ainsi manifester ses instincts de survie, mais il a la fâcheuse tendance de fonctionner sur ce mode basique et égocentrique, et de nous maintenir dans la peur. 


Dans le mode egotique, nous cherchons d’abord notre intérêt particulier… mais ni l’intérêt général, ni le bien commun. 

En aucun cas, ce mode de fonctionnement, ne peut nous apporter ce que les Béatitudes nous promettent, à savoir la compassion, la douceur, la paix et la justice. 


Entre parenthèses… nous avons malheureusement eu - cette semaine - une triste illustration de ce mode egotique, dans les actualités françaises… avec le spectacle affligeant (pour ne pas dire « le cirque médiatique ») que le monde politique a donné à voir…, nous révélant combien les ambitions des uns ou des autres sont essentiellement gouvernées par des questions de personnes, d’égo ou de places à prendre. 

Ceux qui avaient encore quelques illusions, les ont totalement perdues cette semaine, face aux luttes d’influence ou aux « copinages » pour les investitures en vue des élections législatives. Je n’en dirai pas plus…


Alors, si on veut exprimer la plus belle version de nous-mêmes, il faudra accepter de lâcher-prise et se détacher de cet égo (qui nous maintient le plus souvent à la surface de nous-mêmes)… pour aller davantage à la recherche de notre être profond - notre vrai Soi. 

Et c’est la confiance en l’Esprit saint et la Parole du Christ, qui va nous permettre cette ouverture : l’épanouissement de notre être spirituel. 


Dans la graine, toutes les potentialités sont rassemblées… il y a tout ce que nous souhaitons incarner… la meilleure version de nous-mêmes, qui est là, en attente… mais nous ne pouvons pas la réaliser tout seul… nous avons besoin de nous connecter au divin (au Souffle de Dieu et à sa Parole), pour naitre de nouveau, pour grandir et croître. C’est Dieu qui va nous transformer !


Quelques mots … pour conclure… 


On voit donc - chers amis - que Jésus brosse à travers ces images - ces petites paraboles - une promesse de développement, de fécondité… et qu’il nous propose un Evangile de transformation (l’Evangile du règne de Dieu au-dedans de nous, pour advenir à l’image du Christ)… 


Cela signifie pour nous… d’accepter de répondre à cet appel de Jésus… de laisser de la place à l’Esprit saint - au Souffle de Dieu - dans notre vie… cela signifie entrer dans la pleine confiance en Lui…


C’est en accueillant l’Esprit de Dieu - Son Souffle vital, « dynamiseur » et transformateur - dans notre vie quotidienne - que nous verrons des changements : une promesse nous est offerte !

La promesse que nous pouvons faire advenir la meilleure version de nous-mêmes, en accueillant l’Esprit de Dieu en nous. 


Et il n’est pas inutile de rappeler que accueillir l’Esprit de Dieu signifie s’ouvrir et accueillir la Source de l’Amour en nous, dans notre intériorité… car Dieu est Amour. C’est donc Lui qui va élargir notre conscience et notre coeur. 


Cela signifie… préparer le terrain… essayer de lui faire de la place… en nous rendant disponibles… par l’écoute, la méditation et la prière.  

Amen. 


Lectures bibliques 


Lc 17, 20-21


20 Les pharisiens demandèrent à Jésus quand viendrait le règne de Dieu. Il leur répondit : « Le règne de Dieu ne vient pas comme un événement qu'on pourrait voir venir. 21 On ne dira pas : “Voyez, il est ici !” ou bien : “Il est là !” Car, sachez-le, le règne de Dieu est au milieu de vous / en vous / à votre portée. »

Marc 4.26-34


26 Jésus disait encore : « Voici à quoi ressemble le règne de Dieu : quelqu'un jette de la semence dans son champ. 27 Nuit et jour, qu'il dorme ou qu'il se lève, les graines germent et poussent sans qu'il sache comment. 28 La terre fait pousser d'elle-même d'abord la tige des plantes, puis l'épi, et enfin plein de blé dans l'épi. 29 Dès que le blé est mûr, on se met au travail avec la faucille, car le moment de la moisson est arrivé. »

30 Jésus disait encore : « À quoi comparerons-nous le règne de Dieu ? Avec quelle parabole en parlerons-nous ? 31 Il est comme une graine de moutarde ; quand on la sème dans la terre, elle est la plus petite de toutes les graines du monde. 32 Mais quand on l'a semée, elle monte et devient la plus grande de toutes les plantes du jardin. Elle pousse des branches si grandes que les oiseaux des cieux font leurs nids à son ombre. »

33 Jésus donnait son enseignement en utilisant beaucoup de paraboles de ce genre, selon ce que ses auditeurs étaient capables de comprendre. 34 Il ne leur parlait pas sans paraboles ; mais il expliquait tout à ses disciples quand il était seul avec eux.

Mt 5, 1-10


1 Quand Jésus vit les foules, il monta sur une montagne et s'assit. Ses disciples vinrent auprès de lui, 2 il prit la parole et leur donna cet enseignement :

3 « Heureux ceux qui sont humbles de cœur,

car le royaume des cieux est à eux !

4 Heureux ceux qui pleurent,

car ils seront consolés !

5 Heureux ceux qui sont doux,

car ils recevront la terre en héritage !

6 Heureux ceux qui ont faim et soif d'un monde juste,

car ils seront comblés !

7 Heureux ceux qui sont pleins de bonté pour les autres,

car on sera plein de bonté pour eux !

8 Heureux ceux qui ont le cœur pur,

car ils verront Dieu !

9 Heureux les artisans de paix,

car ils seront appelés enfants de Dieu !

10 Heureux ceux qu'on persécute à cause de leur combat pour la justice,

car le royaume des cieux est à eux !

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