Lectures bibliques : Ephésiens 2 (extraits) ; Jacques 3 et 4 (extraits) ; Matthieu 5 (extraits) = voir lectures en bas de cette page.
Thématique : Heureux les artisans de paix !
Prédication de Pascal LEFEBVRE - Bordeaux, le 16 mars 2025 (temple du Hâ)
Je vous propose aujourd’hui de méditer sur le thème de la paix… en contraste avec tous les discours politiques actuels qui parlent de réarmement et de guerre.
Dans le contexte présent, nous avons besoin de l’éclairage de l’Evangile… quitte à remettre en cause les croyances les plus répandues :
* Pourquoi Jésus affirme-t-il que les artisans de paix seront appelés « fils de Dieu » ?
La réponse est relativement simple. Dans l’antiquité « le fils » est celui qui est, à la fois, le « représentant » et l’« héritier » du père.
Or, pour Jésus, Dieu est Amour, il est pure Conscience d’Amour.
Seul celui qui incarne l’amour - et donc la paix - est vraiment le digne représentant de Dieu. Il incarne sa conscience, son Esprit et sa volonté.
Jésus proclame « bien heureux » ceux qui réalisent et édifient la paix - en renonçant à la violence, à la guerre et aux divisions produites par l’ego humain - car ceux qui agissent de la sorte, racontent vraiment qui est Dieu : ils le révèlent. Ils apparaissent donc comme des « fils » ou des « filles » de Dieu, semblable au Père.
* Maintenant, qu’est-ce qu’un artisan de paix ?
Le père de l’Eglise du IVe siècle - Grégoire de Nysse - donne la réponse suivante : « L’artisan de paix, c’est celui qui donne la paix à autrui ; et l’on ne saurait offrir à un autre ce que l’on ne possède pas soi-même. Il faut donc d’abord être soi-même rempli des biens de la paix, et l’offrir ensuite à ceux qui sont privés d’un tel trésor » (cf. Homélie sur les Béatitudes 7,3).
Le théologien pointe là deux dimensions… et un mouvement qui part de l’intériorité pour aller vers l’extériorité :
- trouver la paix et l’unité en soi, la vivre intérieurement - comme un préalable.
- Et ensuite, l’offrir autour de soi.
Pour le Christ, c’est dans notre rapport au divin, dans la spiritualité, que nous pouvons trouver la paix. C’est grâce au contact avec Dieu - Source d’amour et de paix - que nous pouvons recevoir son Souffle, sa conscience, son énergie de Grâce, de sérénité et d’apaisement.
Dans la méditation et la prière, Dieu nous offre son Souffle et ses dons… Il nous transmet sa paix et nous transforme progressivement…
C’est seulement ensuite que nous pourrons diffuser cette paix de l’âme autour de nous.
* La paix entretient forcément un rapport avec la non-violence. Car la paix s’offre ; elle ne s’impose pas.
Ça semble assez évident !… Pourtant bien des hommes politiques imaginent - aujourd’hui encore - pouvoir imposer la paix à autrui… par la pression ou la force.
Entre parenthèses… soulignons que, pour les croyants, la paix est souvent liée à nos représentations :
« Dis moi quel est ton Dieu, et je te dirai qui tu es ! »
Pour devenir « artisan de paix »… il faut déjà croire en un Dieu de paix… en un Dieu non-violent. Et donc en un Dieu qui offre inlassablement sa Grâce et son pardon… un Dieu qui ne punit pas.
C’est ce Dieu là qu’est venu révéler Jésus, en tant que Christ.
Aussi - en nous appuyant sur l’Evangile - nous pouvons oser questionner le littéralisme biblique et remettre en cause la vision mythique de l’Ancien Testament, qui a parfois contribué à transmettre de vieilles images - issues du paganisme - comme celles d’un Dieu capable de violence ou de punition. Ces éléments anciens et traditionnels n’ont rien à voir avec ce que Jésus a enseigné et ce qu’il est venu manifester. Cette contestation lui a d’ailleurs valu de vives polémiques avec les Scribes et les Pharisiens.
Jésus ne dit jamais que Dieu punit… mais il responsabilise ses auditeurs, en les avertissant des conséquences de leurs actes.
Tout en transmettant le visage d’un Dieu bienveillant, qui aime sans condition… il affirme clairement que l’humanité - comme toute la création - est prise dans une loi universelle : la loi de cause à effet.
Dit autrement - et pour reprendre les mots de l’apôtre Paul - « Ce que l’homme sème, il le récoltera » (cf. Ga 6,7-9).
Ce qui signifie que les bonnes choses - comme les mauvaises - que nous semons… produiront inévitablement des fruits, des conséquences… Mais celles-ci ne sont pas une punition de Dieu… Elles sont simplement le résultat de ce que génèrent nos vibrations : notre état de conscience, nos paroles et nos actes.
C’est la raison pour laquelle la violence - comme moyen - ne peut jamais produire une situation positive… comme une paix sincère, véritable et durable.
Le fruit de la violence (fondé sur un rapport de force, un abus de pouvoir, provoquant crainte ou stupeur), comportera nécessairement en lui des aspects « violents », qui se manifesteront tôt ou tard.
C’est l’erreur de tous les chefs de guerre ou de gouvernement, qui imaginent pouvoir aboutir à une paix forcée ou durable, en usant de moyens contraignants ou violents. C’est une illusion !
On peut toujours faire taire un ennemi par la force, mais on ne peut pas obtenir la fraternité ni la paix… puisqu’on suscite forcément du ressentiment, de la rancoeur ou de la rancune.
* D’autre part, la notion de paix doit être distinguée - sans être complètement dé-corrélée - de celle de justice.
Vouloir la paix ne signifie pas « rendre justice ».
La justice consiste, entre autres, à mettre en lumière une situation et à trancher les choses… à comprendre les circonstances… à rechercher des responsabilités… à désigner une victime et un coupable… en vue de rétablir le droit de chacun et l’équité… et donc une relation d’équilibre ou une forme de réparation.
Logiquement on peut penser que la paix est un fruit de la justice.
Mais, dans les faits, il est rare qu’une situation conflictuelle à laquelle on souhaite mettre fin, aboutisse à une décision juste et équilibrée, approuvée par chacune des parties.
Il faut donc distinguer « la justice » et « la paix » qui n’opèrent pas sur le même registre.
En réalité, « offrir la paix », c’est parfois surmonter une situation d’injustice… et même renoncer à son bon droit…
Pour offrir la paix… on peut accepter - comme le dit Jésus dans son sermon sur la montagne - de donner son manteau à celui qui prend ou réclame notre tunique… ou faire 2000 pas avec celui qui nous force à en faire 1000 (Cf. Mt 5, 38-48).
En d’autres termes, la paix peut surmonter l’absence de réciprocité… et même l’injustice… car elle veut dépasser une situation de division.
C’est le paradoxe de la paix : accepter et promouvoir l’union et l’unité… malgré des difficultés, des séparations ou des conflits.
Après chacun est libre de recevoir le cadeau de la paix… d’y répondre en l’acceptant… ou de le refuser.
Ecoutons cette citation du Pseudo-Chrysostome (un père d l’Eglise) : « Sont appelés artisans de paix non seulement ceux qui rétablissent la paix entre les ennemis, mais aussi ceux qui oublient les maux subis : ceux-ci aiment vraiment la paix.
Nombreux sont ceux qui travaillent volontiers pour la réconciliation des ennemis d’autrui, mais ne se réconcilient jamais dans leur coeur avec leurs propres ennemis. (…) La paix bienheureuse est celle qui se trouve dans le coeur. (…) »
Le père de l’église met en avant l’idée d’une force - d’une dynamique de réconciliation - capable surmonter une situation. Il parle même « d’oublier » le passé ! Je ne sais pas si cette notion d’oubli est bien choisie - mais il s’agit, en tout cas - à un moment donné - de faire le choix de passer à autre chose… de dépasser une offense ou une injustice… pour retisser un lien.
Ce qui nécessite déjà de surmonter nos divisions intérieures.
* Dans le Nouveau Testament, l’adjectif grec « artisan de paix » (eirenopoios), faiseur de paix ou pacificateur … utilisé dans les Béatitudes… est, par exemple, employé au sujet de Jésus Christ dans l’épitre au Ephésiens (Ep 2) : Il est présenté comme celui qui a réussi à réconcilier les païens et les Juifs, sous l’égide du Père céleste, dans le même Esprit.
Dans le Premier Testament - notamment dans le livre des Psaumes (cf. Ps 36,37) - cet adjectif correspond au titre d’ « homme de paix » - ‘ish shalom . Il est attribué à celui qui met la concorde entre les hommes, qui « fait » concrètement la paix.
Voici ce qu’en dit Enzo Bianchi, le prieur de la communauté monastique de Bose :
« "Faire la paix", c'est travailler pour que le shalom, qui est la vie en plénitude, sûre, harmonieuse, heureuse, soit la situation de vie des hommes. Le shalom, en effet, est bien plus que la simple absence de guerre ; c'est la santé, la joie, le bien-être spirituel et matériel, l'harmonie avec soi-même, avec les autres et avec la création tout entière, c'est la vie dans son intégrité, digne d'être vécue. […]
« Faire la paix » est [parfois] une action qui coûte, dont le prix peut aller jusqu'à la perte de la condition de paix dans laquelle on se trouve, jamais en répondant au mal par le mal, mais en cherchant toujours à y répondre par le bien (voir Rm 12, 17.21).
« Faire la paix », c'est intervenir dans les conflits, en en subissant la violence, pour ouvrir des sentiers vers le dialogue, la réconciliation, la pacification. C'est un comportement actif qui tente de détruire l'inimité, mais sans anéantir ou blesser l’ennemi.
C’est l’exemple de Jésus [donné par l’auteur de l’épitre aux Ephésiens] : "qui des deux ennemis séparés et opposés n'a fait qu'un, détruisant la barrière qui les séparait, supprimant en sa chair la haine. Ainsi [...] il a créé en sa personne les deux en un seul homme nouveau, en établissant la paix, et les a réconciliés avec Dieu, tous deux en un seul corps, par la croix : en sa personne il a tué la haine" (Ep 2, 14-16). » (cf. E Bianchi - Chemins d’humanité, p.126-127).
* Il y a d’autres passages du Nouveau Testament qui nous délivre un enseignement sur la paix.
Dans l’épitre de Jacques - par exemple - la sagesse - et donc la paix…. puisque la sagesse est « pacifique, douce et raisonnable » (cf. Jc 3,17) - …. la sagesse et la paix sont envisagées comme un don de Dieu :
elles viennent d’en haut, c’est-à-dire qu’elles viennent de la sphère divine… Elles sont un fruit de l’Esprit (voir aussi Ga 5, 22-23).… dans le sens où elles se développent en nous, dans notre coeur…au fur et à mesure de l’intimité de notre relation à Dieu… lorsque nous mettons à l’écoute de notre âme (connectée au divin).
Or, ce qui s’opposent à la paix, c’est notre égo :
- Dans le monde de l’égo, l’être humain est en mode « survie, sauvegarde du moi et des apparences » ou en mode « satisfaction des désirs, avidité, plaisir, séduction, conquête, rapports de force ». Ce qui le conduit à obtenir gain de cause, y compris par la domination ou la rivalité.
- Dans le monde de l’âme - lorsque nous sommes connectés au divin - nos défenses s’abaissent. Nous passons de la peur à la confiance. Nous plaçons notre vie non plus entre nos mains, mais dans les mains de Dieu.
Du coup, nous pouvons accepter nos vulnérabilités et les confier à Dieu. Nous savons que nous n’avons rien à prouver ni à défendre, puisque Dieu s’occupe de tout.
Nous n’avons pas à gagner sur l’autre, ni à avoir toujours raison… parce que nos erreurs ou nos failles ne nous menacent plus… puisque nous dépendons entièrement de Dieu… qui, peu à peu, nous transforme positivement.
Jacques explique à ses lecteurs que les conflits et les guerres viennent de notre égo… de nos tendances égoïstes et de notre avidité (cf. Jn 4,1-2).
Il reprend à sa manière l’enseignement de Jésus qui appelait ses disciples à lâcher-prise, à abandonner leur égo, pour entrer dans la confiance de Dieu (cf. Mc 8,34-35 ; 10, 35-45).
Ce discours est éclairant, aussi bien pour nos relations individuelles, personnelles avec notre entourage… car nous pouvons remarquer que quand une tension ou une dispute apparait, c’est souvent une question d’égo (le sentiment d’être attaqué, critiqué ou remis en cause ou le sentiment de devoir se justifier) … que dans le domaine collectif et social… car l’ego et les rapports de domination, ce sont aussi ceux des chefs d’état, qui gouvernent le monde, et qui veulent sauvegarder ou étendre leurs pouvoirs, leurs privilèges et leur zone d’influence… tout en maintenant les étiquettes ou les apparences.
Aussi, l’épître de Jacques interroge le lecteur sur ses motivations : quels sont nos désirs ?
S’agit-il de désirs égoïstes - qu’il qualifie de « désirs mauvais » - de désirs orgueilleux ou mondains - ou s’agit-il de susciter la vie et la paix autour de nous… donc d’étendre le Règne de Dieu ?
Lorsque nous en venons à exiger des autres des choses, contre leur gré ou leur consentement… en se montrant autoritaire ou imposant… ou à user de moyens de pression, de violence ou d’offenses verbales… ou encore d’indifférence, de manque d’attention ou de considération à l’égard d’autrui… ce qui peut arriver au sein des familles, du milieu professionnel, comme des communautés … il est fort à parier que notre égo (notre orgueil ou nos désirs) nous joue des tours.
En conséquence, l’apôtre nous invite à tourner nos désirs vers le Père céleste… afin de recevoir la paix du coeur… qui vient d’en haut… pour retrouver sagesse et humilité.
Il nous propose ainsi de nous tourner vers le Ciel, pour l’accueillir en nous, dans notre intériorité… pour développer notre capacité à aimer et des rapports pacifiés avec soi-même… et avec les autres.
* D’un point de vue éthique, le rapport pacifique à autrui prend son fondement - selon Paul - dans la loi d’amour (cf. Rm 13, 8-10), et il se construit - selon Jésus - par l’initiative du bien et la règle d’or : faire d’abord à autrui ce qu’on voudrait qu’il fasse pour nous (cf. Mt 7,12).
Ce qui veut dire - a contrario - que la guerre, la haine et la violence naissent souvent d’un manque de compassion et d’amour du prochain.
Pour étendre le règne de l’amour… il faut parfois accepter de lâcher sa raison, son bon droit… en sortant de la réciprocité.
C’est cet élan qui permet d’aimer (ou au moins d’aider)… même ceux qui nous traitent en ennemi… ceux qui nous offensent… ou ceux qui peuvent être la cause de nos souffrances (cf. Mt 5, 38-48).
Le coeur de l’enseignement de Jésus, est fondé sur le franchissement d’un pas… d’un cap… d’une nouvelle mentalité…. qui consiste à être tellement sûr de l’amour et de la Providence de Dieu… qu’il est désormais possible de lâcher-prise… de renoncer à obtenir gain de cause, par la lutte, par soi-même… et donc de renoncer à la violence ou la vengeance… en décidant de ne pas rendre le mal pour le mal.
Plus encore, il s’agit de promouvoir le bien, envers et contre tout… de bénir, même celui qui nous maudit… de prier, même pour celui qui nous persécute… et de tendre une autre face : la joue de la douceur et de la réconciliation (cf. Mt 5, 38-48).
Ce discours parait souvent utopique ou inatteignable… mais Jésus veut nous faire comprendre que la paix ne naît pas d’une relation de miroir ou de réciprocité… elle ne naît pas d’un rapport de force… Elle nécessite, au contraire, un abandon de l’égo… le dépassement de ses préjugés et ses habitudes…
La paix est une quête, un dépassement que le Saint Esprit nous aide à vivre avec audace et courage. Il nécessite une élévation de notre niveau de conscience, qui implique de réellement rechercher l’unité, de la poursuivre ou de la renouveler.
Il me semble que le « lâcher prise » que propose Jésus repose sur deux fondements :
- d’une part, sa pleine confiance en la Providence de Dieu… La certitude que le Père céleste, d’une façon ou d’une autre, pourvoira au bien des Justes.
- et, d’autre part, la conviction que l’univers va répondre à nos intentions et nos vibrations… par la loi de cause à effet (dont j’ai déjà parlé, il y a quelques instants) : Si nous récoltons inévitablement ce que nous avons semer (cf. Ga 6,6-9), cela signifie que tout recours à la violence est proscrit.… Car le risque - avec le temps - ce serait que la violence se retourne contre son auteur, comme un boomerang.
* Après cette réflexion qui nous rappelle que Dieu nous ouvre à la paix… au plan individuel et collectif… peut-on avoir un nouveau regard sur notre actualité ?… avec les conflits et les guerres sur notre planète… et notamment en Ukraine ?…
Peut-on oser dire que les positions d’un certain nombre de chefs d’Etats en Europe sont tout simplement à rebours (à l’envers) de ce que nous propose l’Evangile ?
Il apparait, en effet, que tout discours martial, qui excite les rivalités et encourage la violence ou la guerre - même sous l’apparence de la légitimité ou d’une volonté de réarmement - va à l’opposé des textes que nous avons entendu ce matin !
En tant que disciples du Christ, nous ne pouvons pas cautionner le fait que la France soit le 2ème exportateur d’armes au monde… et qu’elle incite désormais à un réarmement massif de l’Europe.
Il ne faut pas être dupe des discours de peur, qui excitent les ego… en pointant une « pseudo-menace », susceptible de peser sur nous, en France ou en Allemagne. Tout ça est purement hypothétique !
Il est vrai que - dans son entourage immédiat - la Russie a employé la force, en envahissant l’Ukraine… en choisissant d’élargir son influence sur la partie orientale de l’Ukraine… en entrant dans la guerre. C’est une chose terrible pour tous les civils ukrainiens !
La guerre - avec son lot de destructions, de souffrances et de crimes - est toujours une monstruosité et une horreur ! Et ce que se passe là-bas (en Ukraine) depuis 3 ans est d’une violence inouïe.
Mais cette guerre entre deux pays voisins, ne signifie pas que la Russie veuille un jour envahir les pays européens - plus à l’ouest - qui ne sont pas frontaliers et n’ont rien de commun avec son histoire. Ça ne tient pas debout ! [cf. NOTE 1]
Même les experts militaires sont partagés sur le fond de ces discours alarmistes et sur la nécessité d’un réarmement… parce que la France dispose déjà d’un arsenal nucléaire conséquent. [Elle est aujourd’hui au quatrième rang des États nucléaires.]
La réalité, c’est que la Russie fait déjà deux fois la taille de l’Europe. En terme de matières premières, elle est peut-être le pays le plus riche du monde. Elle n’a certainement pas besoin d’un petit pays comme la France.
Historiquement - à part l’époque des conquêtes napoléoniennes - la Russie n’a jamais été notre ennemie. Elle a plutôt sacrifié 15 à 20 millions de ses ressortissants pendant la seconde guerre mondiale, pour lutter contres les nazis.
Elle ne représente pas un danger pour la France… alors pourquoi utiliser la peur, pour influencer l’opinion publique ?… pourquoi vouloir entrer dans un plan d’endettement européen de 800 millards d’euros… pour renforcer les capacités de défense de l’Europe… face à une menace incertaine et conjecturale ? Ne faudrait-il pas davantage choisir une autre orientation et promouvoir la diplomatie ? [cf. NOTE 2]
Plus fondamentalement… est-ce que cette « rhétorique » de guerre ne contribue pas à mettre au second plan - en arrière plan - toutes les difficultés de notre pays ?… qui sont essentiellement des problèmes de politique intérieure… et qui concernent notre vie quotidienne :
350 000 SDF (sans domicile fixe)… près de 10 millions de français sous le seuil de pauvreté… plus de 3 millions de chômeurs… un endettement colossal et intenable… une désindustrialisation du pays… des entreprises qui ferment en masse depuis plusieurs mois ou qui délocalisent… des agriculteurs qui n’arrivent plus à faire face et qui se suicident… une classe moyenne qui s’appauvrit… un pays qui détient le record mondial des impôts, taxes et charges…. avec des services publics en dégringolade et une éducation nationale partiellement défaillante… sans parler d’une insécurité en une hausse (avec une augmentation des actes de délinquances… et des trafics de drogue…).
On nous dit - par ailleurs - que la planète souffre de graves atteintes à la biodiversité et d'un dérèglement climatique… que la précarité est en augmentation chez nous… que nos finances publiques sont exsangues… et on veut quand même essayer de trouver des milliards et des millards d’euros, pour acheter des armes supplémentaires, des canons, des avions de combats ou des chars…. quitte à endetter davantage les jeunes générations…
Tout cela ne peut que nous interroger !
Encore une fois… ne faudrait-il pas plutôt déployer des efforts et faire tout notre possible, pour négocier la paix ?
Non… l’extension de la guerre n’est pas une fatalité !
La paix est à notre portée !
Pour ma part, je trouve assez stupéfiant que la majorité des journalistes se relaient sur les chaines d’information, en cédant à la même atmosphère guerrière et sécuritaire… comme si c’était l’unique solution.
Je crois - au contraire - qu’il nous appartient - en tant que disciples du Christ et promoteurs de la « non-violence »… d’oser remettre en question les discours de surenchère… et de porter la contradiction… en proposant une autre voie que celle de la rivalité et de la course aux armements
Plutôt que d’instiller la peur… en appelant à rassembler les Français et les Européens… pour faire front commun face à un adversaire potentiel… Ne devrions-nous pas plutôt nous unir sur des objectifs constructifs ?… Faire cause commune autour du développement de notre pays et de notre jeunesse… penser à l’éducation et à la justice… favoriser la prévention et le bien commun… investir dans l’avenir et déployer une vision à moyen terme ?
On voit bien - chers amis - qu’être « artisan de paix » n’est pas seulement une question spirituelle, mais existentielle… c’est une question qui touche tous les plans de notre vie… les choix individuels, comme les choix collectifs et politiques. Et cette paix commence d’abord en nous-mêmes, dans notre coeur.
* Pour conclure… je voudrais redire que l’Evangile est aux antipodes de la plupart des discours politiques et médiatiques, fondés sur les rapports de force et de domination. C’est certainement inconfortable pour nous… mais nous devons l’accepter… et oser porter une autre voix !
Pour être un homme ou une femme de paix, il faut opérer une conversion : un changement complet de mentalité… qui consiste à accepter de baisser la garde et de devenir des personnes « désarmées ».
C’est ce que Jésus nous enseigne par son exemple… lui qui n’avait pas d’autres armes que celle de l’Esprit saint et qui a pourtant accompli l’impossible.
Certes, c’est un chemin étroit, un itinéraire à contre-courant… car il faut apprendre « à perdre », pour éviter de propager le mal et pour finalement pour gagner (cf. Mc 8, 34-35)… pour gagner la vie… pour gagner des frères et des soeurs.
Accepter de devenir un artisan de paix, c’est oser se dépouiller de nombreuses prétentions, même apparement justes… c’est renoncer à de nombreuses attentes, même légitimes…. c’est lâcher totalement ses peurs, pour entrer dans la confiance, qui consiste à s’abandonner à Dieu, en le laissant agir…
Ce n’est pas une reddition… c’est une soumission à la volonté divine… à la non-violence voulue par le Père.
Ainsi désarmé - comme Jésus - on devient capable de se faire instrument de paix… de la paix de Dieu, plus forte que notre volonté ou nos propres sentiments.
Ce chemin - et cette béatitude - débouche sur une promesse : ne l’oublions pas ! Les artisans de paix seront appelés « fils de Dieu ».
Être appelé « enfants de Dieu », ce n’est pas seulement essayer de ressembler au Père bon et compatissant… c’est aussi exprimer « la certitude de la protection de Dieu, Conscience d’amour universel »… et c’est devenir comme Jésus-Christ, reconnu comme « Fils de Dieu »… c’est entrer dans la conscience christique et devenir véritablement conforme à l’image du Christ… en collaborant à l’accomplissement du projet divin… qui est un dessein d’amour et de grâce pour l’humanité.
Soyons certains - chers amis - que les rapports de force individuels, comme l’efficacité militaire au plan collectif, ne nous apporteront jamais ni la paix ni la fraternité…
Chacun devrait apprendre des erreurs du passé, pour ne pas risquer de les répéter indéfiniment.
Alors… qu’il nous soit donné… qu’il soit donné à ceux qui s’appuient sur la confiance de Jésus-christ… de goûter à la paix de l’âme… et de transmettre cette paix autour d’eux ! Amen.
NOTES :
- Note 1 : Par ailleurs, le fait que la position des Etats Unis ait changé vis-à-vis de ses alliés européens et de cette guerre en Ukraine… dans l’intention d’aboutir prochainement à un arrêt du conflit… ne signifie pas que les intentions de la Russie soient différentes ou plus menaçantes. Cela veut seulement dire que nous ne pouvons plus compter sur une alliance transatlantique… et donc que nous avons « peur »… que nous sommes provisoirement « insécurisés » … du fait du changement de cap de l’allié américain.
- Note 2 : La sagesse ne serait-elle pas ailleurs ? Cf. Luc 14, 31-32 : « Quel est le roi qui, partant en guerre contre un autre roi, ne commence par s’asseoir pour voir s’il peut, avec dix mille hommes, affronter l’autre qui marche contre lui avec vingt mille ? S’il ne le peut pas, il envoie, pendant que l’autre est encore loin, une délégation pour demander les conditions de paix. »
Lectures bibliques au cours du culte
Louange - Ps 36 & Ps 37 (extraits)
8 Mon Dieu, ta bonté est si précieuse !
Les humains cherchent refuge sous tes ailes.
9 Tu les combles des richesses de ta maison,
tu les fais boire au fleuve de tes délices.
10 C'est auprès de toi qu'est la source de la vie,
c'est ta lumière qui éclaire notre vie !
11 Les doux posséderont la terre et jouiront d'une abondante paix. […]
27 Évite le mal, fais ce qui est bien, et tu auras une habitation pour toujours,
28 car le Seigneur aime le bon droit, il n'abandonne pas ses amis. Ceux-là seront préservés à jamais. […]
29 Les justes posséderont la terre et toujours l'habiteront.
30 Les lèvres du juste redisent la sagesse et sa bouche énonce le droit.
31 La loi de son Dieu est dans son coeur ; il va, sans craindre les faux pas. […]
34 Espère le Seigneur, et garde son chemin : il t'élèvera jusqu'à posséder la terre […]
37 Considère l'homme droit, vois l'homme intègre : un avenir est promis aux pacifiques.
39 Le Seigneur sauve les justes, il est leur refuge au temps de la détresse.
40 Il leur vient en aide, il les met à l’abri.
Volonté de Dieu - Romains 12, 14-18. 21
14 Bénissez ceux qui vous persécutent ; souhaitez-leur du bien, et non pas du mal.
15 Soyez joyeux avec ceux qui sont dans la joie, pleurez avec ceux qui pleurent.
16 Soyez bien d’accord les uns avec les autres ; n’ayez pas le goût des grandeurs, mais laissez-vous attirer par ce qui est humble. Ne vous fiez pas à votre propre jugement.
17 Ne rendez à personne le mal pour le mal, appliquez-vous à bien agir aux yeux de tous les hommes.
18 Autant que possible, pour ce qui dépend de vous, vivez en paix avec tous les hommes.
21 Ne te laisse pas vaincre par le mal, mais sois vainqueur du mal par le bien.
Lectures bibliques
Ephésiens 2 - 11-19
11Souvenez-vous donc de ceci : vous qui étiez autrefois des non-Juifs dans la chair […] 12vous étiez en ce temps-là sans Christ, privés du droit de cité en Israël, étrangers aux alliances de la promesse, sans espérance et sans Dieu dans le monde. 13Mais maintenant, en Jésus-Christ, vous qui autrefois étiez loin, vous êtes devenus proches, par le sang du Christ.
14Car c'est lui qui est notre paix, lui qui a fait que les deux soient un, en détruisant le mur de séparation, l'hostilité. Il a, dans sa chair, 15réduit à rien la loi avec ses commandements et leurs prescriptions, pour créer en lui, avec les deux, un seul homme nouveau, en faisant la paix, 16et pour réconcilier avec Dieu les deux en un seul corps, par la croix, en tuant par elle l'hostilité. 17Il est venu annoncer, comme une bonne nouvelle, la paix à vous qui étiez loin et la paix à ceux qui étaient proches ; 18par lui, en effet, nous avons les uns et les autres accès auprès du Père, dans un même Esprit.
19Ainsi donc, vous n'êtes plus des étrangers ni des exilés ; mais vous êtes concitoyens des saints, membres de la maison de Dieu.
Jacques 3 & 4 (extraits)
Extraits - chap. 3 - Accueillir la sagesse qui vient d'en haut
13Quelqu'un parmi vous est-il sage et intelligent ? Qu'il le prouve par sa bonne conduite, par des actes accomplis avec humilité et sagesse. 14Mais si vous avez le cœur plein d'une jalousie amère et d'esprit de rivalité, cessez de vous vanter d'être sages, en faussant la vérité par vos mensonges. 15Une telle sagesse ne descend pas des cieux ; elle est terrestre, uniquement humaine, diabolique même ! 16Car là où règnent la jalousie et l'esprit de rivalité, il y a aussi des désordres et toute sorte de mal. 17Mais la sagesse d'en haut est pure, tout d'abord ; ensuite, elle est pacifique, douce et raisonnable ; elle est riche en bonté, et elle agit avec bienveillance ; elle est sans parti pris, sans hypocrisie. 18Ceux qui créent la paix autour d'eux sèment et récoltent, dans la paix, une vie qui plaît à Dieu.
Extraits - chap. 4 - Approchez-vous de Dieu !
1D'où viennent les guerres et les querelles parmi vous ? Elles viennent de vos tendances égoïstes qui combattent sans cesse au-dedans de vous. 2Vous convoitez quelque chose, et vous ne pouvez pas l'avoir, alors vous êtes prêts à tuer ; vous avez envie de quelque chose, et vous ne pouvez pas l'obtenir, alors vous vous lancez dans des querelles et des guerres. Vous n’avez pas ce que vous voulez, parce que vous ne le demandez pas à Dieu ! 3Vous demandez et vous ne recevez rien ? C’est que vous demandez mal ! Vous demandez seulement pour satisfaire vos désirs mauvais.
Matthieu 5, 3-10. 38-41
3« Heureux les pauvres de cœur : le Royaume des cieux est à eux.
4Heureux les doux : ils auront la terre en partage.
5Heureux ceux qui pleurent : ils seront consolés.
6Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice : ils seront rassasiés.
7Heureux les miséricordieux : il leur sera fait miséricorde.
8Heureux les cœurs purs : ils verront Dieu.
9Heureux ceux qui font œuvre de paix : ils seront appelés fils de Dieu.
10Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice : le Royaume des cieux est à eux.
38Vous avez entendu qu'il a été dit : “Œil pour œil et dent pour dent.” 39Eh bien, moi je vous dis de ne pas rendre le mal pour le mal. Si quelqu'un te gifle sur la joue droite, tends-lui aussi l'autre joue. 40Si quelqu'un veut te faire un procès pour te prendre ta chemise, laisse-lui aussi ton manteau. 41Si quelqu'un t'oblige à faire mille pas, fais-en deux mille avec lui.
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