dimanche 23 février 2025

Une élection offerte à chacun

 Lectures bibliques : Marc 8, 1-13. 22-26 + Mt 25, 31-46 (extraits) + Luc 6, 27-38 (extraits) = voir en bas de cette page.
Thématique : Un Évangile pour tous - Pas de peuple élu, mais une élection offerte à chacun
Prédication de Pascal LEFEBVRE - Bordeaux - temple du Hâ - le 23/02/25

Le contexte

Aujourd’hui - pour commencer notre méditation - je vous propose de nous intéresser à la question polémique des Pharisiens (cf. Mt 8, 11-13) qui demandent à Jésus « un signe venant du Ciel ». Car - il faut bien l’avouer - nous aussi, nous aimerions bien, parfois, recevoir un signe - peut-être plus clair, plus explicite - de la présence et de l’influence de l’Esprit divin dans nos vies.

Pour bien envisager les enjeux de cet épisode, il faut d’abord le re-situer dans son contexte :

Cette rencontre entre Jésus et les Pharisiens prend place juste après l’épisode de la seconde multiplication des pains (dans l’évangile de Marc).
Jésus vient justement de faire un signe exceptionnel puisqu’il a nourri une foule nombreuse … Mais cette fois, ce signe a été accompli en territoire païen… en faveur d’un public très large, pour les gens de la contrée… et pas seulement pour des coreligionnaires juifs.

Des éléments chiffrés et symboliques dans le texte soulignent l’élargissement de la mission de Jésus et son caractère universel : il est question - de façon extraordinaire - de 4000 personnes qui viennent d’être nourries et de sept corbeilles de pains de reste…

Le chiffre 4 évoque les 4 points cardinaux… ou les 4 vents de la terre… Et le chiffre 7 renvoie peut-être aux soixante-dix nations (cf. Gn 10, 1-32) qui constituent l’humanité ((ou à l’institution des 7 diacres - en Ac 6, 1-6)).

La demande des pharisiens… Remettre les choses dans le bon ordre…    

L’évangéliste Marc, qui raconte alors cet entretien avec les Pharisiens, ne le fait pas de façon neutre : Il a perçu le caractère trompeur de la demande des Religieux… qui souhaitent obtenir un signe.

Dans le vocabulaire employé pour raconter cette controverse, Marc assimile la demande des Juifs pieux à un piège ou plutôt une épreuve : une tentation.
L’usage du verbe grec renvoie leur action à celle de Satan au désert (cf. Mc 1,13).

On peut s’interroger sur le motif de cette demande…
La raison de cette réclamation est peut-être liée au fait que Jésus vient de réaliser un signe extraordinaire en territoire païen. Ce qui ne peut que les étonner et les choquer, car - évidemment - les Juifs ne voulaient rien avoir affaire avec des païens…

Donc, pour eux, ce que Jésus a pu réaliser ailleurs, au contact d’autres gens, est inconcevable et inconvenant. La question qui se pose désormais, est de savoir : Au nom de Qui… de quelle Puissance… de quel Dieu… Jésus a-t-il agit ?

Ils veulent maintenant recevoir un signe du ciel - un indice, une manifestation - prouvant que Jésus agit bien au nom du Dieu d’Israël… Ils réclament une preuve irréfutable de l’origine divine de son action.

Face à leurs préjugés, leur conditionnement et leur aveuglement, Jésus refuse d’obtempérer … tout comme il avait refusé de répondre aux demandes du tentateur - du diviseur - au désert (cf. Mt 4, 1-11).
Il n’a rien à prouver… et il n’a pas à mettre à l’épreuve le Seigneur - ni à se servir de Lui - pour prouver quoi que ce soit.

Le mot péjoratif « cette génération » que Jésus emploie dans sa réponse, sert habituellement - dans la Bible - à décrire l’attitude rebelle du peuple lors de l’Exode… un peuple qui réclamait toujours de nouveaux signes à Moïse (cf. Ps 95, 9-10).

L’endurcissement des Pharisiens se heurte ainsi à une fin de non-recevoir de la part de Jésus.

Et nous…

2000 ans plus tard… nous n’avons sans doute rien de commun avec ces Pharisiens… Mais pourtant, nous aimerions bien - nous aussi - que le Christ nous communique quelques signes au nom de Dieu… pour fortifier notre foi.

Certains même, autour de nous, demandent des signes, eux aussi… simplement pour croire…
« Si seulement Dieu faisait ceci ou cela… alors… nous pourrions croire en lui ! » - se disent-ils.
Il est tentant, en effet, de vouloir mettre Dieu à notre service…

Mais, cette attitude n’a rien à voir avec « la confiance »… c’est plutôt une sorte de méfiance a priori…  Dieu devait se justifier devant nous … pour « mériter » notre foi.

N’est-ce pas là une totale inversion des choses ?

La foi, c’est une ouverture… c’est accepter le risque d’une relation de confiance… c’est accepter de s’appuyer sur un Autre que soi, sur Dieu… de croire en son amour et en sa bienveillance, pour sa création et ses créatures.

Au lieu de demander des choses à Dieu… d’exprimer nos attentes, parfois, sous le signe de la réclamation, de la méfiance ou de la plainte…. Ou de vouloir l’éprouver, comme s’il nous fallait vérifier sa « fiabilité »…. remettons les choses dans l’ordre … et demandons nous davantage : Qu’est-ce que Dieu attend de nous ?

En effet, ce n’est pas à Dieu ni au Christ de faire ce que nous voulons… c’est à nous de faire ce que la Conscience divine attend de nous.

Et ce qui est attendu est assez simple : c’est la foi, l’espérance et l’amour !

C’est vivre dans la confiance, pour laisser l’Esprit divin agir en nous et par nous.
C’est enraciner nos actions dans la perspective du Règne de Dieu qui vient… et prendre part à la venue de ce monde nouveau, fondé sur la compassion, la non-violence, la justice et la paix.
Enfin, c’est expérimenter le double conseil de vie - le double commandement - de l’amour de Dieu et du prochain. « Aimer son prochain comme soi même », pour vivre la fraternité.

C’est cela devenir disciple du Christ… c’est le suivre….
Non pas seulement demander que Dieu se mette à notre écoute… mais nous mettre à son écoute.

C’est à nous - d’abord - d’entrer dans la confiance et de faire notre « possible » pour vivre l’Évangile, avec l’aide de l’Esprit saint… pour que Lui puisse faire ensuite « l’impossible ».

Ce « possible » que nous pouvons faire par notre ouverture, notre confiance… Jésus en parle dans l’Évangile :
Aimer, même celui qui est différent… aimer, même celui n’est pas aimable… même celui qui nous traite en ennemi… car c’est ainsi que Dieu agit, dans sa générosité et son amour inconditionnel…. au-delà de toute morale ordinaire (cf. Lc 6, 27-38 / Mt 5, 38-48).

Si nous aimons ainsi… alors des miracles se produiront avec nous et à travers nous… avec l’aide de l’Esprit divin.  

Si nous aimons… si nous donnons le meilleur de nous-mêmes… si nous pardonnons à ceux qui nous ont blessé ou offensé … si nous aidons les plus fragiles et le plus vulnérables… si nous offrons une place aux étrangers… si nous nous engageons en faveur des plus pauvres et des malades… si nous agissons en prenant l’initiative du bien…. alors le règne de Dieu va continuer de s’approcher… alors nous en récolterons les bon fruits.

Inlassablement, le Christ nous appelle à donner la meilleure version de nous-mêmes…pour obtenir - à notre tour - une vie pleine et abandonnante.

Mais - me direz-vous - comment faire ?

Comment nous orienter ?…  Comment faire pour « bien faire » ?

Jésus ne donne pas de signe… mais il nous donne plusieurs choses :
D’abord, un appel à la conversion, à un changement de mentalité… pour sortir de notre égo et de la réciprocité qui limite notre horizon…
L’offre de la foi : un appel à entrer dans la confiance et à chasser route peur… Parce que Dieu est bien-aimant et bien-veillant, il nous invite à accepter le risque de la confiance…
Ensuite, il nous donne sa Parole, pour nous guider…
Et nous communique son Souffle - le Saint Esprit - pour nous soutenir.

Nous ne sommes donc pas seuls pour faire notre « possible »… Dieu nous accompagne dans le projet de salut qu’il a formé pour l’humanité… il nous donne une orientation… même s’il sait que c’est difficile - pour nous - d’entrer pleinement dans la confiance en une Réalité divine que nous ne voyons pas … d’abandonner notre volonté, pour entrer dans la sienne.

La guérison d’un aveugle en 2 étapes (cf. Mc 8, 22-26)

Le récit suivant - justement - celui de la guérison laborieuse d’un aveugle peut nous éclairer…

On peut interpréter ce récit de guérison d’un aveugle en deux étapes - de façon progressive - comme un miracle étonnant… mais on peut également le lire comme un récit symbolique… comme une image ou une parabole.

Ce récit est peut-être une manière de dire aux disciples que le processus de conversion - permettant de voir vraiment clair - est souvent long et progressif : Il y a des étapes dans le cheminement de la foi !

Beaucoup sont aveugles autour de Jésus… et la cécité n’est pas seulement physique, elle peut être aussi spirituelle (cf. Mc 8,18).

Jésus essaie de dessiller les yeux des disciples, pour leur permettre de voir en vérité… Mais ce processus d’ouverture de conscience - d’ouverture spirituelle - peut prendre du temps…
Car nous souffrons tous de blocages divers, de préjugés, de conditionnements, d’idées reçues, de jugements,… qui nous empêchent de vivre pleinement dans la confiance en Dieu.

Pour les Religieux du temps de Jésus (les Pharisiens), un de ces obstacles était leur vision particulariste du salut.
Ils pensaient que le Messie ne devait venir que pour le peuple Juif… Ils s’estimaient faire partie des « élus », du « peuple choisi » par Dieu.

Or, Jésus est venu remettre en question leurs préjugés et leur vision « communautariste ».
Pour lui, l’harmonie entre les humains, ne peut découler que de la reconnaissance inconditionnelle de l’unicité humaine, par tous et pour tous.
Il n’y a pas d’indignité ou d’impureté des uns ou des autres, comme il n’y a pas de supériorité des uns sur les autres.

Le critère de vigilance éthique porte sur le plus petit. C’est le plus fragile, qui doit être au centre de l’attention de tous (cf. Mt 25, 31-46). Car la préoccupation de Dieu est la bonté, la justice, la miséricorde à l’égard de chacun (cf. Os 6,6 ; Lc 6, 35-36 ; Mt 5,45 ; Lc 15, 3-7 : Mc 9,41-42).

Contrairement à ce que d’aucuns veulent prétendre (que ce soit du côté du Judaïsme ou -  plus tard - du Calvinisme, par exemple), il n’y a pas d’élus particuliers, pas de peuples choisis, pas de personnes préférées. Du moins pas dans le sens de « désignés parmi d’autres par la main de Dieu ».

Car une telle vision introduirait un principe de distinction et de sélection dans la relation au Divin. Ce qui serait contraire au message universaliste du Christ (qui a accompli des gestes de puissance, aussi bien pour des Juifs que pour des païens, et qui n’a eu cesse de transgresser les frontières et les barrières (comme celle du pur et de l’impur) qui voulaient de séparer les hommes entre eux).

La vérité révélée par le Christ, c’est que Dieu préfère, élit et choisit chacune de ses créatures… et les appellent à répondre à sa Grâce.
Toutes sont aimées d’un amour identique : inconditionnel, permanent, infini et éternel.

Ceux qui - gonflés d’orgueil ou de vanité - se perçoivent comme l’éminent résultat d’un tri ou d’une préférence divine, constateront - tôt ou tard - la présence d’un tamis d’humilité, à travers lequel il leur faudra passer (Cf. Lc 14,11 ; 1 P 5,5 ; Jc 4,6).

Après la venue du Christ, la seule façon d’utiliser la notion d’« élection divine » est de l’envisager sous l’angle d’un appel universel - ressenti de façon personnelle - qui implique un surplus de responsabilités : celle de se laisser transformer par l’Evangile de la Grâce et de le transmettre autour de soi… en cherchant le Règne de Dieu et sa justice (cf. Mt 6,33).

Et cet appel - cette l’élection - ne concerne pas davantage un peuple ou une religion en particulier : il s’adresse à chacun dans la profondeur de sa conscience et de son âme.

Mt 25, 31-46… un parabole exemplaire…

Pour illustrer ce fait…. j’en viens (pour achever notre méditation) à quelques remarques plus brèves, déduites de la parabole du jugement dernier de Mt 25 - que nous connaissons bien…

Précisément, pour faire sortir ses interlocuteurs de la cécité ou de l’incrédulité… Jésus donne souvent des images et des paraboles.

Nous en avons un exemple grandiose à la fin de l’évangile de Matthieu :
Dans un « mythe » de la fin de temps (un mythe est un langage qui dit une vérité sous forme narrative)… proposé sous la forme d’une parabole du jugement dernier (cf. Mt 25, 31-46)… une scène nous permet de visualiser la manière de s’approcher de Dieu (du Dieu d’amour)… ou de s’en éloigner…

L’histoire proposée par Matthieu nous permet d’observer, de façon imagée, le déplacement de deux groupes de personnages : les « attentionnés » symbolisés par les brebis… et les « indifférents » représentés par les chèvres.  

Le lecteur ou l’auditeur peut simplement observer les conséquences des actions de chacun, à travers une image : celle des déplacements proposés par le Fils de l’homme - un personnage apocalyptique qui vient exposer les existences humaines à sa lumière.

D’un côté, il y a le « venez… approchez-vous… les bénis de mon Père » pour ceux qui ont agi de façon ajustée - en aimant et en aidant leur prochain dans le besoin.
Les actions réalisées à l’égard d’autrui - en particulier ceux qui sont dans la détresse - comme nourrir, accueillir, vêtir, visiter, … leur permettent de goûter - en conséquence - un lien de proximité avec le Dieu d’amour.

D’un autre côté, ceux qui n’ont rien fait - ceux qui ont oublié que le sens de la vie était de vivre en relation avec autrui, d’aimer et de soutenir les autres - ceux-là s’éloignent de la lumière divine : « éloignez vous de moi… » dit le roi de la parabole.

Dans cette petite histoire - sans doute reprise et élargie par Jésus - le critère du jugement, c’est l’amour … en particulier pour ceux qui sont le plus en difficulté… ceux dont les capacités vitales sont amoindries.

Vous remarquerez que ce critère - qui introduit une notion de proximité ou d’éloignement avec le projet divin - ne relève pas d’une question religieuse… Ce n’est pas une question d’élection, ni d’appartenance, ni de bonne doctrine ou de bonne croyance qui est déterminante… mais un critère qui surmonte toute question religieuse : l’amour du prochain.

Celui qui aime s’approche de Dieu… car Dieu est amour.
Celui qui vit dans l’indifférence - ou dans la haine de l’autre - s’en éloigne… pour la même raison.

Chacun reçoit selon ce qu’il donne :
« Soyez généreux comme votre Père est généreux » (cf. Lc 6,36)
« Donnez et l’on vous donnera ! » - disait Jésus ailleurs (cf Lc 6,38).


La parabole rappelle ainsi à l’auditeur ou au lecteur, le lien de solidarité qui existe entre Dieu, le Christ et chaque être humain.
Nous sommes tous Un : nous sommes liés à Dieu et à chaque être dans le besoin.

Le « Très-haut » est aussi dans le « Très-bas ».
Dieu n’est pas simplement au Ciel : il est présent et agissant en chacun de nous… comme il l’est parmi le plus petit de nos frères humains.

Celui qui écoute l’Évangile est forcement interpelé par cette petite histoire… car il se demande : Est-ce que je fais partie de ceux qui écoute ou de ceux qui font la sourde oreille à l’appel de Dieu, devant la détresse des autres ? - les étrangers, les malades, les affamés et les prisonniers…

Dans les faits… personne n’exige de nous, que nous transformions le monde en un monde juste. Car cela nécessiterait un changement global d’état de conscience et de mentalité au niveau mondial.
Mais c’est déjà beaucoup lorsque nous ne laissons pas ceux qui souffrent dans la solitude… Lorsque nous nous tenons simplement auprès d’eux… pour leur manifester la sollicitude de Dieu.

Dans notre société où règne souvent le « chacun pour soi »… une mentalité de rivalité et de concurrence, pour atteindre une certaine forme de réussite sociale… beaucoup ont tendance à considérer ceux qui n’ont rien, ceux qui souffrent ou qui ont connu un échec ou une rupture sociale… comme des personnes inintéressantes, inutiles ou sans importance… qui sont simplement du mauvais côté de l’histoire ou de la société.

Or… notre parabole bouleverse tous les critères… car elle nous apprend que Dieu se tient lui-même du côté de la vie apparemment « ratée ».
Et la vie «  réussie », il la mesure au fait de vivre solidaire avec les faibles, les affamés, les malades et les prisonniers.
L’Evangile résonne ainsi comme une prise de conscience de la bonté de Dieu… comme un puissant appel à l’amour, à l’action et à la solidarité…

Bien sûr, cette histoire présente - malgré tout - certaines limites… parce qu’elle est presque trop simple : elle entretient une vision dualiste et manichéenne des choses…

Il ne faut sans doute pas la prendre « au pied de la lettre » :
Il y a en chacun de nous une part de brebis obéissante et compatissante (qui vit dans le don de soi) et une part de chèvre individualiste et rebelle (qui reste bloquée sur son égo).

Chacun est appelé à développer sa meilleure part… à se dépasser… pour progresser vers la volonté de justice de Dieu.

Quelques mots…. Pour conclure…

De notre méditation, nous pouvons retenir plusieurs bonnes nouvelles :

- Un des points communs entre les textes de ce jour … c’est la nourriture, c’est le rassasiement…
Jésus est celui qui apporte la vraie nourriture à tous, au nom de Dieu (en donnant sa Parole et en nous communiquant sa Foi)… Cette confiance chasse en nous la méfiance et la peur…. Elle nous appelle à croire en la Providence divine offerte à tous… qui nous permet de partager ce que nous avons reçu.

- La parabole de Matthieu 25 nous rappelle que Dieu agit incognito dans notre monde… Il vient à notre rencontre, pour nous aider, nous encourager et nous soutenir… sous le masque ou l’apparence d’autrui… Tout comme il nous invite aussi à devenir des petits « Christ » - des Bergers, des frères, des soeurs - les uns pour les autres…

C’est donc dans le visage de chaque être humain que nous pouvons rencontrer le visage de Dieu.

- Enfin, l’Evangile nous propose d’entrer dans un « cercle vertueux »… dans une boucle d’amplification positive :

Dieu nous appelle et nous envoie pour vivre dans le partage et la justice…, en même temps, le partage et la justice nous conduisent à plus de proximité avec Dieu….

Dit autrement… Dieu nous ouvre à l’amour… et l’amour nous rapproche de Dieu.

En entrant dans le projet de Dieu, nous rendons le monde meilleur et nous exprimons la meilleure version de nous-mêmes.

C’est un cercle vertueux : plus nous devenons aimants (par l’ouverture du coeur), plus nous nous ouvrons à l’Esprit divin  … et plus nous nous ouvrons à l’Esprit divin (par la spiritualité et la confiance) plus nous devenons aimants…

Nous finissons ainsi par récolter tout ce que nous semons de bon en nous et autour de nous…  par la foi et l’amour.

Qu’il en soit ainsi, chers amis !  Amen.


Lectures bibliques

Volonté de Dieu : Luc 6, 27-38 (extraits)

27« Je vous dis, à vous qui m'écoutez : Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent, 28bénissez ceux qui vous maudissent, priez pour ceux qui vous calomnient. […]
32« Si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle reconnaissance vous en a-t-on ? Car les pécheurs aussi aiment ceux qui les aiment. 33Et si vous faites du bien à ceux qui vous en font, quelle reconnaissance vous en a-t-on ? Les pécheurs eux-mêmes en font autant. […]
35Mais aimez vos ennemis, faites du bien et prêtez sans rien espérer en retour. Alors votre récompense sera grande, et vous serez les fils du Très-Haut, car il est bon, lui, pour les ingrats et les méchants.
36« Soyez généreux comme votre Père est généreux. […]
38Donnez et on vous donnera ; c'est une bonne mesure, tassée, secouée, débordante qu'on vous versera dans le pan de votre vêtement, car c'est la mesure dont vous vous servez qui servira aussi de mesure pour vous. »

Lectures bibliques : Marc 8, 1-13


1.En ces jours-là, comme il y avait de nouveau une grande foule et qu'elle n'avait pas de quoi manger, Jésus appelle ses disciples et leur dit : 2. « J'ai pitié de cette foule, car voilà déjà trois jours qu'ils restent auprès de moi et ils n'ont pas de quoi manger. 3. Si je les renvoie chez eux à jeun, ils vont défaillir en chemin, et il y en a qui sont venus de loin. » 4. Ses disciples lui répondirent : « Où trouver de quoi les rassasier de pains, ici dans un désert ? » 5. Il leur demandait : « Combien avez-vous de pains ? » – « Sept », dirent-ils. 6. Et il ordonne à la foule de s'étendre par terre. Puis il prit les sept pains et, après avoir rendu grâce, il les rompit et il les donnait à ses disciples pour qu'ils les offrent. Et ils les offrirent à la foule. 7. Ils avaient aussi quelques petits poissons. Jésus prononça sur eux la bénédiction et dit de les offrir également. 8. Ils mangèrent et furent rassasiés. Et l'on emporta les morceaux qui restaient : sept corbeilles ; 9. or ils étaient environ quatre mille. Puis Jésus les renvoya ; 10. et aussitôt il monta dans la barque avec ses disciples et se rendit dans la région de Dalmanoutha.


11. Les Pharisiens vinrent et se mirent à discuter avec Jésus ; pour lui tendre un piège [littéralement, pour le tenter], ils lui demandent un signe qui vienne du ciel. 12. Poussant un profond soupir, Jésus dit : « Pourquoi cette génération demande-t-elle un signe ? En vérité, je vous le déclare, il ne sera pas donné de signe à cette génération. » 13. Et les quittant, il remonta dans la barque et il partit pour l'autre rive. […]
 

Marc 8, 22-26


22. Ils arrivent à Bethsaïda ; on lui amène un aveugle et on le supplie de le toucher. 23. Prenant l'aveugle par la main, il le conduisit hors du village. Il mit de la salive sur ses yeux, lui imposa les mains et il lui demandait : « Vois-tu quelque chose ? » 24. Ayant ouvert les yeux, il disait : « J'aperçois les gens, je les vois comme des arbres, mais ils marchent. »
25. Puis, Jésus lui posa de nouveau les mains sur les yeux et l'homme vit clair ; il était guéri et voyait tout distinctement. 26. Jésus le renvoya chez lui en disant : « N'entre même pas dans le village. »
 

Matthieu 25, 31-46 (extraits)

31« Quand le Fils de l'homme viendra dans sa gloire, accompagné de tous les anges, alors il siégera sur son trône de gloire. 32Devant lui seront rassemblées toutes les nations, et il séparera les hommes les uns des autres, comme le berger sépare les brebis des chèvres. 33Il placera les brebis à sa droite et les chèvres à sa gauche.
34Alors le roi dira à ceux qui seront à sa droite : “Venez, les bénis de mon Père, recevez en partage le Royaume qui a été préparé pour vous depuis la fondation du monde. 35Car j'ai eu faim et vous m'avez donné à manger ; j'ai eu soif et vous m'avez donné à boire ; j'étais un étranger et vous m'avez recueilli ; 36nu, et vous m'avez vêtu ; malade, et vous m'avez visité ; en prison, et vous êtes venus à moi.” 37Alors les justes lui répondront : “Seigneur, quand nous est-il arrivé de te voir affamé et de te nourrir, assoiffé et de te donner à boire ? 38Quand nous est-il arrivé de te voir étranger et de te recueillir, nu et de te vêtir ? 39Quand nous est-il arrivé de te voir malade ou en prison, et de venir à toi ?” 40Et le roi leur répondra : “En vérité, je vous le déclare, chaque fois que vous l'avez fait à l'un de ces plus petits, qui sont mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait !”
41Alors il dira à ceux qui seront à sa gauche : “Allez-vous-en loin de moi […] Car j'ai eu faim […] J’ai eu soif […] j’étais un étranger […] j’étais malade et en prison  [et vous n’avez rien fait !] […] “En vérité, je vous le déclare, chaque fois que vous ne l'avez pas fait à l'un de ces plus petits, à moi non plus vous ne l'avez pas fait.” […]

 

dimanche 16 février 2025

Mc 6, 1-13

 Lectures bibliques : Marc 1, 14-15 + Mc 6, 1-13 = voir textes en bas de cette page.
Thématiques : Qu’est-ce qui peut faire obstacle à la diffusion du salut ? Qu’est-ce qui peut, au contraire, la favoriser ? Quelle est notre mission ?
Prédication de Pascal LEFEBVRE - Bordeaux, dimanche 16 février 2025 - assemblée locale
(Partiellement inspirée d’une méditation de Monique Baujard)


Nous écoutons aujourd’hui le début du chapitre 6 de l’évangile de Marc, avec deux épisodes : l’échec de Jésus dans sa patrie et l’envoi des Douze en mission.

Dans l’épisode précédent - raconté au chapitre 5 (cf. Mc 5) - Jésus vient de libérer un possédé, il vient de guérir une femme qui souffrait de saignements et de ramener à la vie la jeune fille de Jaïros, le chef de la synagogue.

Le lecteur ou l’auditeur de l’Evangile a pu être frappé par ces signes extraordinaires. Il semble qu’une puissance de vie exceptionnelle - venant de Dieu - émane de Jésus, au point qu’il soit capable de délivrer ses interlocuteurs de leurs maux, leur maladie ou leur malheur.

Jésus parvient à transmettre autour de lui le supplément de vie et de vitalité qui manque à chacun… Rien ne semble pouvoir résister à la puissance vitale dont il est le porteur… sauf peut-être l’incrédulité, les préjugés et l’esprit de méfiance… c’est-à-dire un état d’esprit de division et de séparation.

C’est précisément la situation qu’il rencontre au début de notre épisode - au chapitre 6 (cf. Mc 6, 1-6) :

Accompagné de ses disciples, Jésus revient à Nazareth, sa ville d’origine.
Sa réputation le précède : les gens ont entendu parler des guérisons réalisées et s’en étonnent. Comme ils s’étonnent de la sagesse du Maître quand il enseigne dans la synagogue le jour du sabbat.

Mais comme il est dans sa patrie… comme ces gens l’ont connu enfant et adolescent, qu’ils connaissent aussi sa famille : ses frères, ses soeurs et ses parents… il doutent et se méfient :
C’est un des leurs !… il est simplement « comme tout le monde ». Il ne peut être ni différent ni exceptionnel !

L’évangéliste Marc nous raconte que cette méfiance va jusqu’à mettre en échec la puissance de vie que Jésus tente de diffuser autour de lui. Ce jour-là, il ne pourra faire aucun « acte de puissance ».

Il semble qu’il y ait là un message adressé à l’auditeur de l’évangile :

La limite à la puissance de vie du Christ, c’est parfois « nous » !
C’est nous, quand nous sommes enfermés dans notre égo, notre méfiance, nos certitudes, nos illusions de savoir.

Le rejet de la confiance a se pouvoir effrayant de couper l’homme de la vie venant de Dieu… de la vie en abondance que le Christ voudrait nous transmettre.

La méfiance - comme tout état d’esprit négatif - fait tout simplement obstacle à l’émergence de nouvelles potentialités.
Notre manque de foi est capable de faire barrage à l’énergie et la puissance de l’Esprit saint en nous, dans nos relations ou notre vie.

D’ailleurs, Jésus s’étonne, lui-même, du manque de foi de ses compatriotes. Car il sait bien - par expérience - que c’est la foi qui avait pu permettre la guérison de la femme hémorroïsse et de la fille de Jaïros (cf. Mc 5, 21-43).

Notre foi est avant tout relationnelle. C’est cette relation de confiance qui permet l’ouverture à l’Esprit…. l’ouverture à la dynamique de vie, venant de Dieu…  puisque, pour Jésus, notre Père céleste est le Vivant, la Source de toute vie et tout bien.

Alors, quand la confiance est là… la vie reprend, elle s’ouvre à la nouveauté… et elle circule de nouveau.

Ce bref épisode de l’évangile nous interroge donc sur notre foi… notre confiance en Dieu :
Croyons que Dieu peut nous revitaliser et faire toute chose nouvelle dans notre vie ?  

Il nous questionne également sur nos relations avec les autres, notamment nos proches.

Aujourd’hui encore, « nul n’est prophète en son pays » et, parfois (involontairement ou inconsciemment) notre attitude n’est pas si éloignée de celle des gens de Nazareth :
Nous aussi, nous pensons bien connaître nos proches (nos familles, nos amis, nos collègues, nos frères et soeurs dans la foi) et, du coup, il arrive que nous leur collions des étiquettes.

Quand nous pensons trop bien connaitre les autres, quand nous perdons notre ouverture d’esprit et notre capacité d’émerveillement, nous fermons quelque chose dans nos rapports aux autres…
Impossible alors de se laisser surprendre par la richesse cachée de nos proches.

Notre manque de confiance en leurs capacités - leurs capacités d’agir de façon nouvelle, d’évoluer ou de changer - les fige dans l’idée que nous nous faisons d’eux.

Nos préjugés ou nos jugements hâtifs, nous limitent autant nous-mêmes qu’ils limitent aussi les autres dans leur évolution.

Autrement dit… dans nos relations humaines aussi, la confiance - la foi en l’autre - est un élément indispensable pour le dynamisme de la vie.
Il est essentiel de nous laisser guider par le regard du Christ… lui qui parvient toujours à dénicher la richesse intrinsèque de chacun : la profondeur, la grandeur et la beauté cachée, au fond de chaque être humain.

Croire en Dieu… croire en l’autre… croire en nous grâce à Dieu… ou croire à la venue du Règne de Dieu… il s’agit toujours de « foi » : Jésus nous appelle à ne jamais cesser de croire et d’espérer.

Dans l’épisode suivant, Jésus envoie ses proches collaborateurs en mission (cf. Mc 6, 6-13).

Rappelons quelle est cette mission, puisque c’est aussi la nôtre :

Parce qu’ils ont reçu - par la foi de Jésus - une puissance de vie et d’amour qui vient de Dieu… les apôtres sont envoyés par deux pour annoncer la Bonne Nouvelle. Elle est présentée ici comme un appel à la conversion, pour inviter chacun à la confiance et à une vie nouvelle avec Dieu… et une mission destinée à apporter libération, guérison, ré-unification de chacun et réconciliation…face à tout ce qui peut diviser ou abimer notre humanité (nos corps ou nos relations).

En d’autres termes, les apôtres sont appelés à démultiplier et à prolonger la mission même du Christ… puisque Jésus leur a donné la capacité de transmettre, à leur tour, sa vitalité, sa dynamique de vie… pour la faire rayonner au maximum.

Dans cette mission collective, Jésus leur donne autorité sur les esprits impurs et leur fait des recommandations de deux ordres :

- D’abord, il leur dit de ne rien prendre pour la route. Ils doivent accomplir leur mission dans une forme de dépouillement.

Cette sobriété extrême – pas de pain, pas de sac, pas de tunique de rechange – peut nous surprendre, mais elle vient rappeler que le succès de la mission ne dépend pas de ses conditions matérielles, mais uniquement de la relation de confiance qu’ils arriveront à tisser aux cours de leurs rencontres…

Cette précision est importante pour nous aujourd’hui…  car nous pensons souvent, dans notre église, aux bonnes conditions matérielles nécessaires à la proclamation de l’Evangile.
Et c’est vrai que c’est toujours un « plus » d’avoir un temple beau et confortable pour y être accueilli. Mais ce n’est pas là l’essentiel.
Ce qui est mis en avant dans l’Evangile, c’est la capacité des disciples à susciter la confiance…  à transmettre - à la suite de Jésus - des paroles et des gestes de libération, d’amour et d’espérance… pour faire reculer la peur, le doute et tout ce qui enferme et réduit les êtres humains.

- La seconde recommandation rappelle que l’accueil sera inégal, tout comme il l’a été pour Jésus. Tous ne vont pas croire ; il faut en prendre acte.
Jésus ne leur dit pas d’insister, de s’acharner, ni de convaincre les gens à tout prix. Chacun doit rester libre…  

Là où il n’y a pas d’accueil ni d’écoute, les disciples doivent simplement passer leur chemin et aller ailleurs… pour rencontrer d’autres personnes…

2000 ans plus tard… ce texte reste, pour nous, d’une grande actualité.
Nous aussi, nous devons accepter que notre enthousiasme pour le message du Christ (un Evangile transformateur) ne sera jamais partagé par tous. Il en va de la liberté humaine.

Nous pouvons - bien sûr - le regretter… mais c’est notre réalité actuelle !
Aujourd’hui, dans une société où la religion chrétienne ne constitue plus le cadre de référence, nous devons réaliser que ce sont les relations individuelles qui priment. C’est la façon dont chacun va pouvoir témoigner, lui-même, de son expérience et de sa relation avec l’Esprit divin, qui compte !

Désormais, c’est la relation personnelle, la relation de confiance, qui redevient première pour faire découvrir le message du Christ.

C’est pourquoi, on ne peut pas seulement compter sur un pasteur, un aumônier ou un prédicateur, pour transmettre la Bonne Nouvelle de l’Evangile. Chacun de nous est appelé à susciter la confiance… en osant témoigner et dire combien la foi est importante dans sa vie personnelle… combien ça change les choses de se savoir aimé et soutenu par Dieu… et d’avoir une espérance… C’est important d’oser dire combien l’amour de Dieu transforme et éclaire notre vie, tout en lui donnant du sens.

Dans le contexte actuel (celui d’un monde déchristianisé), l’accueil fraternel et l’écoute bienveillante sont devenus aussi des facteurs déterminants :
L’accueil, l’écoute, l’accompagnement, forment désormais la première annonce de l’Évangile… un Évangile en actes… avant même de pouvoir évoquer le message de Jésus.

Et là encore, si le Christ a choisi des apôtres… c’était pour démultiplier son action…
Là encore, c’est à chacun de nous de transmettre cet Évangile de l’accueil en actes… là où nous sommes… auprès des gens que nous rencontrons.

Pour conclure… je voudrais vous redire - en ce jour d’Assemblée locale - combien le message de confiance portée par l’Évangile est essentiel pour notre époque actuelle.

Nous vivons dans un monde marqué par une crise majeure de confiance… un monde où l’on se sent souvent impuissant face aux montagnes de problèmes qui sont devants nous (crises politiques, économiques, écologiques… méfiance à l’égard des institutions, des gouvernants, des médias… face à la corruption et aux mensonges permanents…)… un monde soumis à la peur de l’avenir…. qui semble avoir oublié les mots porteurs et positifs comme « promesse » et « espérance ».

Dans ce contexte déroutant et anxiogène, il est fondamental et indispensable de témoigner d’une issue… d’un chemin de confiance encore possible…

Nous l’avons entendu dans le premier épisode (cf. Mc 6, 1-6), la victoire de la vie offerte par Jésus peut rencontrer des obstacles…. et même une sorte de limite infranchissable conduisant à sa mise en échec : cette limite, c’est l’incrédulité, c’est la méfiance… c’est un état d’esprit négatif… qui nous poussent à la résignation… à ne plus croire en rien ni personne… à ne plus croire en l’altérité, l’exceptionnel ou l’inouï… et même à ne plus rien désirer de nouveau.

Or, la promesse de Jésus… c’est, au contraire, celle d’un monde nouveau qui s’approche : le Royaume, le monde nouveau de Dieu, qui est à notre portée…  dans lequel nous pouvons entrer et auquel nous pouvons participer… pour autant que nous changions radicalement d’état d’esprit.

La foi, ce n’est pas croire en nos propres capacités… c’est croire en celle de Dieu… en sa puissance de création et de transformation.
Ce n’est donc pas en comptant sur notre égo et nos seules forces que le monde pourra aller mieux… c’est, au contraire, en les abandonnant… en nous abandonnant à l’amour, à la lumière et à la volonté de Dieu… pour entrer dans la confiance divine.
C’est, dans ce mouvement de lâcher-prise, d’abandon, que le Seigneur nous donnera son Esprit, son Souffle, son Energie, sa Vitalité… pour prendre part à son Règne, à son monde nouveau.

C’est la même chose pour notre Eglise : elle rayonnera de confiance vers l’extérieur, quand nous-mêmes nous rayonnerons de la confiance de Dieu dans nos vies… et que nous oserons l’exprimer.

Et peut-être que pour commencer, il nous faut oser partager ce message qui nous invite à un changement d’état d’esprit… à une forme de conversion :
Nous n’avons pas à nous sauver nous-mêmes… nous ne pouvons pas compter sur nos seules forces… nous avons besoin d’entrer dans une confiance plus large : la confiance de Dieu… qui, Lui, peut nous donner tout ce dont nous avons besoin et nous transmettre sa Dynamique de vie.

Si nous parvenons à susciter cette confiance que l’Esprit saint - l’Esprit de vitalité venant de Dieu - est la clef d’un réel changement pour chacun et pour notre monde… si nous parvenons à susciter cette confiance que Dieu peut changer les choses en nous et autour de nous… alors, oui, nous participons - avec Jésus - à l’advenue du monde nouveau de Dieu.

Qu’il en soit ainsi !  Amen.

 

Lectures bibliques

 
Mc 1, 14-15
14Après que Jean eut été livré, Jésus vint en Galilée. Il proclamait l'Evangile de Dieu et disait : 15« Le temps est accompli, et le Règne de Dieu s'est approché : convertissez-vous (changez de mentalité) et croyez à l’Evangile (à la Bonne Nouvelle). » […]
 

Mc 6, 1-6a
1Jésus partit de là. Il vient dans sa patrie et ses disciples le suivent. 2Le jour du sabbat, il se mit à enseigner dans la synagogue. Frappés d'étonnement, de nombreux auditeurs disaient : « D'où cela lui vient-il ? Et quelle est cette sagesse qui lui a été donnée, si bien que même des miracles se font par ses mains ? 3N'est-ce pas le charpentier, le fils de Marie et le frère de Jacques, de Josès, de Jude et de Simon ? et ses sœurs ne sont-elles pas ici, chez nous ? » Et il était pour eux une occasion de chute. 4Jésus leur disait : « Un prophète n'est méprisé que dans sa patrie, parmi ses parents et dans sa maison. » 5Et il ne pouvait faire là aucun miracle ; pourtant il guérit quelques malades en leur imposant les mains. 6Et il s'étonnait de ce qu'ils ne croyaient pas.


Mc 6, 6b-13
Il parcourait les villages des environs en enseignant. 7Il fait venir les Douze. Et il commença à les envoyer deux par deux, leur donnant autorité sur les esprits impurs. 8Il leur ordonna de ne rien prendre pour la route, sauf un bâton : pas de pain, pas de sac, pas de monnaie dans la ceinture, 9mais pour chaussures des sandales, « et ne mettez pas deux tuniques ». 10Il leur disait : « Si, quelque part, vous entrez dans une maison, demeurez-y jusqu'à ce que vous quittiez l'endroit. 11Si une localité ne vous accueille pas et si l'on ne vous écoute pas, en partant de là, secouez la poussière de vos pieds : ils auront là un témoignage. » 12Ils partirent et ils proclamèrent qu'il fallait se convertir. 13Ils chassaient beaucoup de démons, ils faisaient des onctions d'huile à beaucoup de malades et ils les guérissaient.

dimanche 9 février 2025

Jetez vos filets ailleurs

Lecture biblique : Jn 21, 1-19 (voir en bas de cette page)
Thématique : Vivre après Pâques - « jetez vos filets ailleurs ! »
Prédication de Pascal LEFEBVRE - le 09/02/25 - Bordeaux (temple du Hâ)

* Commençons par re-situer brièvement le passage que nous venons d’écouter :

Dans le récit de Jean, notre épisode (Jn 21) se passe après Pâques… à la toute fin de l’évangile.
Dans son ministère, Jésus a enseigné et guéri. Il a annoncé la Bonne Nouvelle de l’amour de Dieu. Mais son enseignement « révolutionnaire » sur le plan spirituel, s’est heurté au pouvoir religieux de son temps. Il a été arrêté et crucifié… tout en étant trahi et renié par les siens.
Mais voilà que trois jours après sa mort sur la croix, il s’est donné à voir… il s’est manifesté en apparaissant comme Vivant - dans une autre sphère de réalité - à ses anciens disciples.

La nouvelle stupéfiante de la Résurrection a pu redonner espoir à ses anciens compagnons. Le fait que Jésus ait été relevé de la mort - qu’il vive désormais dans une vie nouvelle : une vie lumineuse auprès de Dieu - signifie qu’il a été été justifié par Dieu : que sa Parole et son enseignement étaient véridiques… et que sa mort était parfaitement injuste… et donc que les pouvoirs civils et religieux qui ont orchestré sa crucifixion, étaient totalement dans l’erreur.

On imagine avec peine le bouleversement de cette extraordinaire nouvelle qu’a été l’évènement de Pâques : elle signifiait que la mort n’est pas le dernier mot de la vie… que Jésus était bien l’envoyé de Dieu… et donc que tout ce qu’il avait dit et fait venait bien de Dieu.

* Et pourtant, malgré tout… malgré cet évènement inouï… il y a quelque chose d’étonnant dans notre épisode de l’évangile, c’est qu’on a l’impression que la Bonne Nouvelle de Pâques est vite passée…
Les disciples ont maintenant repris leur vie quotidienne… comme autrefois… on pourrait dite « comme si de rien n’était »… comme avant.  N’est-ce pas surprenant ?

Les disciples… ont-ils oublié leur passé … leur appel et leur désir de suivre le chemin du Christ ?
Ont-ils déjà oublié la présence du Seigneur au milieu de leur vie quotidienne ?

Au fond, ce récit pointe peut-être ce danger, qui nous guette également : l’oubli ?… la dispersion… la suractivité (et les soucis du monde)… ou le manque de profondeur ? (Comme l’évoque aussi la parabole du semeur : cf. Mt 13, 1-23).

Est-ce que la Bonne nouvelle de Pâques change vraiment notre manière de voir les choses ? Et de vivre ?…
Peut-être que les réalités spirituelles finissent pas s’effacer, devant l’urgence de la matérialité : face aux soucis… pour gagner notre vie et répondre à nos besoins fondamentaux.

Comment faire alors… pour conjuguer la recherche du règne de Dieu - sa présence dans nos vies (cf. Mt 6,33)… et nos préoccupations élémentaires ?
N’avons-nous pas besoin que quelqu’un nous rappelle que Dieu nous attend, pour participer à quelque chose de plus vaste, de plus profond, de plus grand… que simplement partir à la pêche matérielle… et se limiter au quotidien… pour répondre à nos besoins biologiques ?

C’est précisément ce que va faire le Christ dans cet épisode :
Il vient rappeler aux disciples que Dieu les attend non seulement pour la pêche d’en-bas - une pêche matérielle - mais également pour une pêche d’en-haut : une pêche humaine et spirituelle, afin de poursuivre la mission de Jésus.

Une pêche abondante les attend… s’ils veulent bien se mettre à l’écoute du Christ.

N’est-ce pas là aussi notre vocation ?… à nous, membres d’une Eglise, d’une communauté chrétienne - membre du corps du Christ - de poursuivre cette mission ?… de continuer à annoncer la Bonne Nouvelle de l’amour de Dieu ?

* Relevons, ce matin, quelques éléments clefs de ce récit très riche (je me limiterai à 5 points) :

- Premièrement, nous venons de le dire… il faut noter que l’évangéliste Jean déplace le récit de la pêche miraculeuse - que les autres évangiles situent au début du ministère de Jésus - à la fin de son récit… comme pour rappeler que la mission de devenir « pêcheurs d’hommes » (cf. Lc 5, 1-11 ; Mt 4, 18-22) est plus que jamais attendue des disciples.

Nous avons rappelé dimanche dernier le sens de cet appel à devenir « pêcheur d’hommes » (voir ici) : symboliquement « pêcher des êtres humains », c’est les remonter à la surface lorsqu’ils risquent de se noyer… c’est faire en sorte qu’ils vivent. C’est susciter la vie !… une vie libérée de tout ce qui risque de nous engloutir (nos peurs, nos angoisses, nos enfermements, nos ressassements, nos travers, nos divisions).

Remarquons que dans l’épisode raconté par Jean (à la différence des autres évangiles) … symboliquement, Jésus n’est plus physiquement dans la barque, mais « au bord du lac »… car il va charger la communauté des croyants - l’Eglise - en communion avec Pierre, de continuer la mission.

Et cette fois - contrairement au récit de Luc (cf. Lc 5,6) - les filets ne se déchirent pas. Ce qui annonce l’unité finale des disciples dans cette Eglise.

- Deuxième point : en plaçant cet épisode après Pâques, Jean combine ici deux traditions : l’apparition du Ressuscité avec un récit de miracle : la pêche abondante.

Symboliquement, on comprend que c’est la présence du Christ qui change la réalité :
Il permet de passer d’une vie marquée par le manque et l’obscurité - puisque les filets des disciples restent vides, après une nuit de pêche infructueuse - à une vie marquée par la nouveauté et l’abondance - puisqu’avec le Christ, qui se donne à voir au levé du jour, leurs filets sont pleins.

Jésus-Christ est ainsi présenté comme celui qui guide les disciples… et qui permet de trouver la vie en plénitude… la vie en abondance (cf. Jn 10,10). C’est lui qui permet d’assouvir notre faim véritable.

De même qu’il avait suscité la vie en changeant l’eau en vin (cf. Jn 2, 1-11)… en multipliant les pains pour la foule (cf. Jn 16, 1-16)… il le fait encore pour ses disciples après sa résurrection :
Il nous permet non seulement de répondre à nos véritables manques… mais aussi de multiplier les résultats de nos entreprises, lorsque leur but est de susciter la vie.

Petites parenthèses : Certains exégètes se sont demandé s’il y avait une signification symbolique dans l’appel de Jésus à jeter le filet ailleurs… et en particulier du côté droit (?)

Certains commentateurs précisent que - comme les disciples se trouvent habituellement sur la rive nord-ouest - l’orientation proposée par le Ressuscité correspond à la direction nord, du côté des nations.

D’autres voient dans cette précision un appel à l’audace et à la nouveauté : car jeter les filets ailleurs, c’est accepter de recommencer en faisant autrement… en sortant de nos routines, de nos habitudes ou de nos conditionnements.
En disant « Jetez le filet ailleurs » , le Christ voulait peut-être dire : « Sortez de votre environnement ou de vos conditionnements, où l’on veut trop souvent vous enfermer… osez explorer une autre voie… Faites-moi confiance !… embrassez la liberté ! »

Enfin, d’autres commentateurs précisent (dans le même sens) que le côté droit représente la profondeur… ce qui est encore caché.
C’est aussi le côté du don, le côté de l’action, pour créer et faire évoluer les choses.
Choisir le côté droit, ce serait aller là où notre espérance s’exprime dans le don, le service et la créativité.

- Troisième point, l’ancrage de ce changement - le passage d’une pêche infructueuse à une pêche abondante - est possible grâce à la confiance.
C’est parce que l’Église - communautairement - et le croyant - individuellement - font confiance à Jésus-Christ… que quelque chose de nouveau peut surgir :

La confiance que nous offre Jésus-Christ et dans laquelle nous pouvons entrer, nous permet de passer « de la peur à la confiance, de la résignation à la résistance, du désespoir à l’espérance » (comme le dit si bien la Déclaration de foi de notre Église).

Et c’est vrai que sans confiance, rien de nouveau ne peut surgir dans notre vie. Car la peur (toutes nos peurs) nous fige dans l’immobilisme et le défaitisme.
Et aujourd’hui on sait combien notre monde occidental est saisi par la crainte de l’avenir !

C’est pour cela que Jésus - à maintes reprises - associe la foi au salut, à la libération. (« Ta foi t’a sauvé » dit-il à ses interlocuteurs)
Littéralement, la foi - la confiance - nous sauve d’abord de nos peurs (peurs de l’avenir, peur de l’échec, peur de l’autre, peur devant l’inconnu ou l’incertitude, peur de la mort, etc.)

Si Jésus est devenu le Christ, c’est parce qu’il a fait pleinement confiance à la Providence du Père céleste.

- Quatrième point remarquable dans ce récit, c’est la place donnée à l’apôtre Simon-Pierre, pour devenir le « meneur » et le « fédérateur » des disciples. Plusieurs détails symboliques soulignent son implication :

D’abord, c’est lui qui entraine les siens pour aller « pêcher ». Ensuite, quand il aperçoit le Ressuscité, il ceint un vêtement pour manifester son respect pour le Christ (v.7).
En se jetant à l’eau, pour le rejoindre, il donne mesure de son engagement (v.7). Et en tirant le filet à terre avec ses 153 poissons, il s’affirme comme le leader d’une église nombreuse, diverse et universelle… dont il assure l’unité… puisque le filet ne se déchire pas.

Au-delà de ces aspects symboliques, les exégètes se sont interrogés sur la signification du nombre « 153 ». Plusieurs hypothèses ont été proposées :

Dans le deuxième livre des chroniques, ce nombre évoque les 153 000 étrangers - c’est-à-dire les nations - qui participèrent à la construction du temple sous l’égide de Salomon (cf. 2 Ch 2,17).

On peut penser aussi au 153 espèces de poissons connues à l’époque (cf. Pline, Histoires Naturelles), ce qui symboliserait donc l’ensemble de l’humanité.

Pour d’autres, le nombre 153 correspond à la somme des nombres entiers de 1 à 17, sachant que 17 correspond au nombre de peuples connus, énumérés à la Pentecôte (cf. Ac 2, 9-11).

Enfin, en additionnant les chiffres qui compose le nombre 153, on obtient 9, ce qui correspondrait au chiffre de la spiritualité en « numérologie ».
« 9 » : c’est le chiffre de l’accomplissement, de l’universel et de l’ouverture de la conscience.

On ne sait pas quelle est l’hypothèse de lecture la plus pertinente… mais on voit bien que ce nombre est symbolique et qu’il fait certainement référence à la pluralité et la diversité des fidèles que Simon-Pierre est appelé à rassembler, en vue d’accomplir sa mission à la suite du Christ.

- Un cinquième et dernier point nous oriente vers le dialogue entre Simon et le Ressuscité.

Après le repas, le Ressuscité entre en dialogue avec Pierre ; il lui donne une mission : «  faire paître ses agneaux ». Il reçoit ainsi la fonction de pasteur universel du troupeau qui appartient au Christ, pour devenir berger, à la suite du « bon berger » (cf. Jn 10,14).

Il lui pose trois fois la même question : « M’aimes-tu ? ». Cette triple question répétée a pour fonction d’effacer - ou plutôt de surmonter - le triple reniement de Pierre, au moment de l’arrestation de Jésus (cf. Jn 18, 15-27).
Il s’agit maintenant pour l’apôtre de prendre un nouveau départ, en prenant un engagement fidèle. Car si le renégat pardonné se voit pressenti et installé - par grâce - dans une fonction pastorale qui appartenait autrefois au Christ, il doit désormais s’inscrire dans la confiance.

Il lui faudra cette fois garder le cap, quand bien même cette fonction difficile l’amènera au martyr, comme Jésus.

Il est à noter une nuance de vocabulaire dans la version grecque (cette différence n’apparait pas dans la version syriaque) : le questionnement sur l’amour (avec le verbe grec « agapao ») employé par Jésus désigne l’amour inconditionnel (l’amour profond et désintéressé). Alors que la réponse de Simon-Pierre n’indique que l’amour-amitié (« phileo » en grec).

Ce jeu de vocabulaire entre deux façons d’aimer (l’agapè ou la philia) traduit certainement l’appel du Christ à dépasser l’affection ou l’amitié, pour entrer dans la fidélité (dans une forme de relation durable), un engagement inconditionnel.

Cette différence (avec la réponse nuancée de Simon-Pierre) montre combien il est difficile pour l’être humain d’aimer à la manière du Christ, sans limite, jusqu’au don de soi.
Mais… peu importe… ici, l’apôtre entend pleinement cet appel à la confiance et à l’amour.

Le lecteur ou l’auteur de l’évangile peut aussi entendre ce questionnement répété pour lui-même :
« M’aimes-tu ? » demande le Christ.
Qu’est-ce que ça signifie vraiment - pour nous - d’aimer le Christ ou d’aimer Dieu ?

Souvent, quand on parle d’amour, notre vision contemporaine des choses est décalée, car aujourd’hui on associe volontiers l’amour à une émotion ou un sentiment.
Or, « aimer le Christ » ou « aimer Dieu » ce n’est pas seulement cela.
« Aimer », c’est d’abord écouter… donner sa confiance… vouloir vivre en relation… désirer suivre…  s’engager pour quelqu’un.

Alors, est-ce que vraiment nous aimons le Seigneur ?

Est-ce que nous désirons vraiment l’écouter, lui laisser de la place dans notre vie ?…
Est-ce que nous voulons mener notre existence, en vivant en relation avec lui, en lui faisant pleinement confiance ?…
Est-ce que nous décidons de nous laisser guider par l’Evangile, pour suivre le chemin de vie qu’il nous propose ?

C’est la question que le Christ pose à Pierre… et - encore aujourd’hui - à chacun d’entre nous…
Veux-tu entrer dans un chemin de confiance, de fidélité et de vie avec moi ?

* Quelques mots… pour conclure….

Que faut-il faire ? Comment vivre après Pâques ?
Ce récit de l’évangile - au chapitre 21 - nous aide à trouver des réponses…

Rappelons que l’évangile de Jean - au chapitre 20 - (juste avant cet épisode final) a indiqué aux disciples que le Ressuscité ne laissent pas seuls. Ils ne sont pas orphelins, puisque le Christ leur donne le Saint Esprit - le Paraclet - pour les guider et les éclairer (cf. Jn 14,16 ; Jn 20, 22).

Mais même avec l’Esprit saint… leur foi reste encore fragile…
Que faut-il faire ? Faut-il encore aller à la pêche comme avant ?… ou peut-on partir à la pêche autrement… en jetant nos filets ailleurs ?

Faut-il se satisfaire de la pêche d’en-bas ?… sans oeuvrer aussi à la pêche d’en haut ?

En fait, tout dépend du regard que nous portons sur « la résurrection ».
L’évènement de Pâques nous dit que nous sommes aimés inconditionnellement… malgré tout. L’Amour de Dieu peut surmonter tous les obstacles : nos blocages, nos erreurs, nos injustices et même la mort.  

Si Dieu nous aime sans condition et s’il nous donne la vie en plénitude, en abondance - comme le montre la résurrection - alors, il n’y a plus de crainte… alors, nous n’avons plus à avoir peur de quoi que ce soit ! Nous sommes pleinement libérés.

En conséquence, nous pouvons vivre dans la confiance.
Nous pouvons être pleins d’audace et d’optimisme… et agir au mieux (pour le bien) en comptant sur l’amour et la Providence de Dieu à chaque instant.

Cela ne signifie pas qu’il n’y aura pas de difficultés ni d’épreuves sur la route - mais que nous sommes désormais appelés à jeter nos filets ailleurs avec confiance… pour ne pas répéter le passé… pour faire advenir du « nouveau » dans notre vie et autour de nous.

« Je vais à la pêche », dit Simon-Pierre. « Jetez vos filets ailleurs », répond le Christ.

J’aime cette idée que cet « ailleurs » - ce « coté droit » - ce soit le côté du don de soi, de l’espérance, de la créativité…  le côté de la profondeur.

Chercher du côté de la vie et de la profondeur : voilà ce que le Christ nous propose !

Ne pas nous limiter à nos préoccupations quotidiennes et superficielles…  aller en profondeur… oser la confiance, pour recevoir la vie en abondance avec le Christ… et la transmettre ensuite autour de nous…

« Osez jeter vos filets ailleurs » : voilà une parole de vie pour nous !

Amen.



Lecture biblique : Jean 21, 1-19 


1Après cela, Jésus se manifesta de nouveau aux disciples sur les bords de la mer de Tibériade. Voici comment il se manifesta. 2Simon-Pierre, Thomas qu'on appelle Didyme, Nathanaël de Cana de Galilée, les fils de Zébédée et deux autres disciples se trouvaient ensemble. 3Simon-Pierre leur dit : « Je vais pêcher. » Ils lui dirent : « Nous allons avec toi. » Ils sortirent et montèrent dans la barque, mais cette nuit-là, ils ne prirent rien.

4C'était déjà le matin ; Jésus se tint là sur le rivage, mais les disciples ne savaient pas que c'était lui. 5Il leur dit : « Eh, les enfants, n'avez-vous pas un peu de poisson ? » – « Non », lui répondirent-ils. 6Il leur dit : « Jetez le filet du côté droit de la barque et vous trouverez. » Ils le jetèrent et il y eut tant de poissons qu'ils ne pouvaient plus le ramener. 7Le disciple que Jésus aimait dit alors à Pierre : « C'est le Seigneur ! » Dès qu'il eut entendu que c'était le Seigneur, Simon-Pierre ceignit un vêtement, car il était nu, et il se jeta à la mer. 8Les autres disciples revinrent avec la barque, en tirant le filet plein de poissons : ils n'étaient pas bien loin de la rive, à deux cents coudées environ.

9Une fois descendus à terre, ils virent un feu de braise sur lequel on avait disposé du poisson et du pain. 10Jésus leur dit : « Apportez donc ces poissons que vous venez de prendre. » 11Simon-Pierre remonta donc dans la barque et il tira à terre le filet que remplissaient cent cinquante-trois gros poissons, et quoiqu'il y en eût tant, le filet ne se déchira pas. 12Jésus leur dit : « Venez déjeuner. » Aucun des disciples n'osait lui poser la question : « Qui es-tu ? » : ils savaient bien que c'était le Seigneur. 13Alors Jésus vient ; il prend le pain et le leur donne ; il fit de même avec le poisson. 14Ce fut la troisième fois que Jésus se manifesta à ses disciples depuis qu'il s'était relevé d'entre les morts.

15Après le repas, Jésus dit à Simon-Pierre : « Simon, fils de Jean, m'aimes-tu plus que ceux-ci ? » Il répondit : « Oui, Seigneur, tu sais que je t'aime », et Jésus lui dit alors : « Pais mes agneaux. » 16Une seconde fois, Jésus lui dit : « Simon, fils de Jean, m'aimes-tu ? » Il répondit : « Oui, Seigneur, tu sais que je t'aime. » Jésus dit : « Sois le berger de mes brebis. » 17Une troisième fois, il dit : « Simon, fils de Jean, m'aimes-tu ? » Pierre fut attristé de ce que Jésus lui avait dit une troisième fois : « M'aimes-tu ? », et il reprit : « Seigneur, toi qui connais toutes choses, tu sais bien que je t'aime. » Et Jésus lui dit : « Pais mes brebis. 18En vérité, en vérité, je te le dis, quand tu étais jeune, tu nouais ta ceinture et tu allais où tu voulais ; lorsque tu seras devenu vieux, tu étendras les mains et c'est un autre qui nouera ta ceinture et qui te conduira là où tu ne voudrais pas. » 19Jésus parla ainsi pour indiquer de quelle mort Pierre devait glorifier Dieu ; et après cette parole, il lui dit : « Suis-moi. »

samedi 8 février 2025

La foi peut-elle apporter une forme de vitalité ?

Lectures bibliques : Marc 5, 24-34 + Luc 5, 17-26 (= voir à la fin de cette page)
Thématiques : « Ta foi t’a sauvée ! » En quoi la foi peut-elle nous apporter une forme de vitalité ? Quelles différences y-a-t-il entre la foi et la superstition ? Peut-on avoir la foi pour les autres ?
Prédication de Pascal LEFEBVRE - Bordeaux, samedi 8 février 2025 - culte autrement 


Déroulement du "culte autrement" en 3 temps :
- Lectures bibliques
- Questions pour échanger
- Prédication / méditation 

Questions pour échanger

1) Croyez-vous aux miracles (à l’extraordinaire, à l’inexpliqué ou l’inexplicable) ? Selon vous, la foi peut-elle vraiment faire des miracles et déplacer des montagnes de problèmes ? (Comment ? Pourquoi ?… )

2) Pensez-vous qu’il y a du « merveilleux », de l’inouï dans notre monde ?    En ce qui vous concerne… voyez-vous des « miracles » (grands ou petits) dans votre vie ou autour de vous ?

3) Vous-mêmes, vous sentez-vous capable… de faire des miracles (même petits) ?… de vous dépasser - ou de faire l’impossible - grâce à votre confiance ?

4) Dans le récit de la femme (qui souffre de flux de sang - cf. Mc 5, 24-34) : comment qualifieriez-vous sa « foi » ? … L’admirez-vous ?… ou trouvez-vous sa foi « superstitieuse » ?

5) Quelles différences faites-vous entre la foi et la superstition ?

6) Pensez-vous qu’on peut avoir la foi pour les autres ? (comme les hommes qui portent le paralytique - cf. Lc 5, 17-26)


Prédication

Les acteurs du salut…

Qu’est-ce qui a permis le salut - la guérison - de la femme qui vient à la rencontre de Jésus ?
C’est une des questions qu’on peut se poser en relisant cet épisode.

Deux acteurs principaux semblent évidemment actifs et participatifs au milieu de la foule : - La femme - Et Jésus

- Jésus… parce qu’une force vitale semble sortie de lui (v.30). C’est l’explication que donne l’évangéliste Marc.
- Et la femme… parce que c’est sa foi - fondamentalement - qui crée une ouverture permettant la guérison.

Un confiance qui permet un dépassement…

C’est, en effet, sa confiance qui lui permet de surmonter son désespoir… Elle lui donne le courage et l’audace de sortir de ses limites et ses conditionnements.  

En voyant, en Jésus, un sauveur… en osant toucher son vêtement (au milieu d’une foule très dense), alors que la loi le lui interdisait - étant considérée comme personne « impure », à cause de ses saignements - elle brave un interdit. Elle franchit les limites dans lesquelles la religion la bloquait et la condamnait.

Rappelons, en effet, que cette pauvre femme se retrouvait sans aucune ressource (puisqu’elle avait dépensé tout son argent en soins inefficaces).
Du fait de la nature de sa maladie, elle se trouvait complètement rejetée de la sphère sociale.
Comme l’indique la loi, dans le livre du Lévitique (Cf. Lv 15, 19.25), ses pertes de sang continues l’enfermaient dans le camp des « impures », des exclues et des infréquentables.

Aussi, en osant aller vers Jésus, en touchant son vêtement, elle réalise un geste d’une audace inimaginable : elle brise un interdit ; elle se libère et rejette ses conditionnements.

Ce qui permet cet élan, c’est sa confiance en Jésus.
Grâce à sa foi, elle surmonte sa peur, elle franchit la montagne de problèmes qui la séparait du Christ et qui la figeait dans sa maladie.

On assiste à travers son attitude à une capitulation de l’égo. Car, ce n’est pas sur elle - en ses propres capacités - qu’elle porte sa confiance…  Au contraire, elle se sent totalement impuissante… Mais, en silence, elle s’en remet pleinement au Christ. Elle reconnait en Jésus une puissance de guérison venue d’ailleurs… une sorte de vitalité « surnaturelle ».

Son espoir et sa foi ne font qu’un : Elle s’abandonne à cette folle possibilité de toucher et de recevoir cette vitalité nouvelle - une énergie vitale de transformation - grâce au contact avec Jésus… comme si la vie (venant du Christ) était contagieuse !  Et la guérison s’accomplit !

Lorsque Jésus apprend qui l’a touché, il approuve finalement le geste audacieux de cette femme, malgré sa transgression.
Le maître ne se sent absolument pas perturbé ni contaminé par son impureté. Au contraire, il lui donne raison : « ma fille, ta foi t’a sauvée » (v.33) lui dit-il explicitement.

Il ne lui dit pas : je t’ai guéri… tu as reçu une nouvelle force vitale, grâce à moi… mais simplement « ta foi t’a sauvée ! ». Ce qui signifie que c’est sa confiance qui lui a permis de recevoir cette puissance de guérison… qui l’a saisie, déplacée et guérie.

Et nous…

Quel enseignement pour nous !… qui voulons toujours que les choses soient rationnelles ou explicables scientifiquement !

Avons-nous cette même confiance en Dieu ? … ou en Jésus-Christ ?

Pensons-nous vraiment que Jésus est celui qui peut nous ouvrir un passage vers le Père, vers la Source (la Vie, la Conscience Universelle).
Croyons-nous qu’en nous connectant au Divin… par la méditation ou la prière… nous pouvons recevoir - nous aussi - une énergie vitale… une puissance libératrice et transformatrice dans notre vie ?

Ou est-ce que tout ça nous semble trop incroyable… trop irrationnel ?

Peut-on croire qu’une telle guérison ait eu lieu il y a 2000 ans ?… comme il y a encore aujourd’hui - dans le monde - des dizaines de guérisons inexpliquées ?

Acceptons de nous laisser déplacer et bousculer par l’Evangile… au risque d’avouer que notre petite rationalité n’a pas réponse à tout… et que rien n’est impossible au Christ.

Distinguer la foi de la superstition…

Certains pourraient penser que la foi de cette femme est presque « superstitieuse » ?… car il est seulement question de parvenir à toucher « le vêtement » du maître… du Messie… (comme si un objet pouvait médiatiser le « salut »… ou être imprégné d’une puissance « sacrée »).

Peut-être !… Mais ne devrait-on pas penser, en réalité, que la superstition est du coté de la loi… dans la mesure où elle enfermait cette femme du côté des « impures », simplement à cause de ses saignements.
Quelle idée étrange !?

En quoi l’impureté serait-elle contagieuse ?
Et pourquoi la vitalité ne pourrait-elle pas l’être ?

La superstition est une croyance irrationnelle ou irraisonnée considérée comme vaine.

Mais la confiance de cette femme a-t-elle était vaine ?
S’agissait-il d’une forme de superstition?

Non… puisqu’il lui a été fait selon sa foi !

Sa foi n’était pas de la superstition… car la superstition est susceptible de nous enfermer dans une forme d’illusion… dans la crainte ou l’ignorance… dans un fonctionnement répétitif… ou dans des ressassements inutiles et improductifs… en attribuants à des objets ou des gestes une force bénéfique ou maléfique… qu’ils ne possèdent pas.

Or, ici - dans cet épisode - c’est à Jésus que la femme confère une puissance, une force vitale qui sort de l’ordinaire.
Seulement, elle n’attend pas magiquement sans rien faire :
Pour accéder à Jésus, elle va, elle-même, se dépasser et surmonter ses blocages… en se libérant des pressions sociales, des interdits et des préjugés… en se déplaçant… en faisant preuve d’une audace extraordinaire.

La différence entre la foi et la superstition, c’est que la foi produit une libération des possibles… et non un enfermement.
La femme (qui est allée vers Jésus) a cru en la possibilité de recevoir « du vraiment nouveau » dans sa vie, grâce au Christ.  Et c’est ce qui est arrivé !

Pour le dire autrement …. alors que la superstition risque de nous figer dans la peur ou l’immobilité…. (Dans telle situation… face à une échelle, un chat noir, ou tout autre chose… il faut faire tel geste, ou ne pas toucher à cela… parce que ça porte « bonheur » ou « malheur ») … la foi nous fait franchir un pas en avant… elle nous déplace…  
Elle suscite un élan de vie… grâce à une confiance intérieure… capable d’ouvrir et de restaurer vitalité et joie de vivre.

Ce récit nous interroge donc sur nos croyances :
- Est-ce que croire que la vie est figée… que les choses sont déterminées… que la vie n’a rien à offrir d’autres que ce que nos yeux peuvent en voir… n’est pas, en fait, une forme d’illusion… de superstition ?
- Au contraire, croire que la vie est bien plus vaste, plus large, plus profonde et plus merveilleuse que ce que nos sens peuvent en deviner… n’est-ce pas est une forme de foi transformatrice ?

Seule la foi peut nous permettre d’accéder à la vie en plénitude… car elle nous permet de croire - au-delà de toute raison - qu’il y a encore de l’altérité, de l’inouï, de la profondeur, des potentialités insoupçonnées disponibles… à portée de main.

La foi, c’est croire que l’essentiel est invisible pour les yeux, mais accessible avec un coeur ouvert.

Croire aussi pour les autres…

J’en viens - beaucoup rapidement / et pour finir -  à l’autre texte que nous avons entendu…

Ici, encore, posons-nous la question : qu’est-ce qui a permis la guérison de l’homme paralysé ?

Nous avons cette fois plus de deux acteurs :
- Jésus, qui semble imprégné d’une puissance de guérison. C’est ainsi que Luc le présente (lui aussi).
- Et un groupe d’hommes, qui transportent le malade en le faisant passer par un toit.

Seulement, la différence avec l’autre épisode, c’est que, dans ce récit, ce n’est pas la foi du paralytique qui provoque la transformation de sa situation. C’est la foi de ses compagnons.
C’est la confiance, le courage et l’audace des autres, qui va permettre sa libération… puisque l’homme va se trouver pardonné et guéri à l’issue d’une rencontre libératrice.

L’évangéliste dit bien que Jésus « a vu leur foi » et tout ce qui se passe ensuite dépend de cette confiance initiale (cf. Lc 5,20).

Et nous …

Est-ce à dire que nous pouvons avoir la foi pour d’autres ?
C’est ce que laisse entendre cet épisode.

En tout cas, ces hommes ont cru en Jésus… ils ont cru aussi pour leur ami malade… ils ont peut-être cru en lui, malgré lui… ils ont cru en sa possible guérison…

Il semble donc bénéfique et profitable de croire non seulement en Dieu et en ses potentialités… mais aussi de croire pour nos frères et nos sœurs…. de croire que tout peut toujours changer et évoluer… quand on a une foi capable de déplacer des montagnes de problèmes.

A notre tout petit niveau… à la suite du Christ… nous disposons aussi d’une puissance capable de restaurer les relations : il s’agit, d’une part, de croire en l’autre (de croire en nos amis, en nos proches, en nos collègues… même s’ils ne croient pas forcément en eux)… et il s’agit, d’autre part, du pardon.  

Nous aussi - par l’ouverture du cœur et le pardon - nous pouvons aider à remettre les autres debout et faire en sorte que la vie reprenne son cours. 

Une foi qui surmonte nos paralysies… mais qui ne s’impose pas…

Dans cet épisode… nous voyons aussi que la paralysie change de camp… c’est la différence entre ceux qui croient à un nouvel avenir possible… et ceux qui n’y croient pas vraiment :

- D’un côté, des gens anonymes ont ouvert l’espace par le haut, indiquant sans le savoir la présence même du Souffle divin dans la personne de Jésus… dans l’espoir d’une libération pour leur ami.

- D’un autre côté, les responsables religieux présents, ne peuvent accepter les paroles libératrices de Jésus. Ils sont malades - eux aussi - mais d’une autre sorte de paralysie : celle de la pensée.
Ils sont prisonniers de leurs illusions, de leurs fausses croyances.

En suscitant la vie, la foi et la libération… Jésus tente de les guérir… mais il ne peut rien imposer…

A la fin de la rencontre avec le Christ, l’homme peut ressortir debout de la maison. L’accès n’en est plus bloqué.
Grâce à la foi de ses amis et la parole agissante de Jésus, la vie s’est remise à circuler.
Toutefois, Jésus reste impuissant face à la paralysie du coeur.

Pour conclure…

Alors, chers amis… que la foi de cette femme et des amis du paralytique, soient aussi la nôtre !

Que cette confiance (confiance en l’action de l’Esprit divin dans nos vies) libère tous nos blocages, nos conditionnements et nos paralysies.

Que le Souffle de Dieu puisse faire circuler la Vie en nous… afin qu’à notre tour, nous puissions porter des paroles et actes libérateurs autour de nous.  

Amen. 

 

Textes bibliques 


Marc 5, 24-34


24 […] Une foule nombreuse suivait Jésus et l'écrasait. 25Une femme, qui souffrait d'hémorragies depuis douze ans 26– elle avait beaucoup souffert du fait de nombreux médecins et avait dépensé tout ce qu'elle possédait sans aucune amélioration ; au contraire, son état avait plutôt empiré –, 27cette femme, donc, avait appris ce qu'on disait de Jésus. Elle vint par-derrière dans la foule et toucha son vêtement. 28Elle se disait : « Si j'arrive à toucher au moins ses vêtements, je serai sauvée. » 29A l'instant, sa perte de sang s'arrêta et elle ressentit en son corps qu'elle était guérie de son mal. 30Aussitôt Jésus s'aperçut qu'une force était sortie de lui. Il se retourna au milieu de la foule et il disait : « Qui a touché mes vêtements ? » 31Ses disciples lui disaient : « Tu vois la foule qui te presse et tu demandes : “Qui m'a touché ?” » 32Mais il regardait autour de lui pour voir celle qui avait fait cela. 33Alors la femme, craintive et tremblante, sachant ce qui lui était arrivé, vint se jeter à ses pieds et lui dit toute la vérité. 34Mais il lui dit : « Ma fille, ta foi t'a sauvée ; va en paix et sois guérie de ton mal. »

Luc 5, 17-26

17Or, un jour qu'il était en train d'enseigner, il y avait dans l'assistance des Pharisiens et des docteurs de la loi qui étaient venus de tous les villages de Galilée et de Judée ainsi que de Jérusalem ; et la puissance du Seigneur était à l'œuvre pour lui faire opérer des guérisons. 18Survinrent des gens portant sur une civière un homme qui était paralysé ; ils cherchaient à le faire entrer et à le placer devant lui ; 19et comme, à cause de la foule, ils ne voyaient pas par où le faire entrer, ils montèrent sur le toit et, au travers des tuiles, ils le firent descendre avec sa civière en plein milieu, devant Jésus. 20Voyant leur foi, il dit : « Tes péchés te sont pardonnés. » 21Les scribes et les Pharisiens se mirent à raisonner : « Quel est cet homme qui dit des blasphèmes ? Qui peut pardonner les péchés, sinon Dieu seul ? » 22Mais Jésus, connaissant leurs raisonnements, leur rétorqua : « Pourquoi raisonnez-vous dans vos cœurs ? 23Qu'y a-t-il de plus facile, de dire : “Tes péchés te sont pardonnés” ou bien de dire : “Lève-toi et marche” ? 24Eh bien, afin que vous sachiez que le Fils de l'homme a sur la terre autorité pour pardonner les péchés, – il dit au paralysé : “Je te dis, lève-toi, prends ta civière et va dans ta maison.” » 25A l'instant, celui-ci se leva devant eux, il prit ce qui lui servait de lit et il partit pour sa maison en rendant gloire à Dieu. 26La stupeur les saisit tous et ils rendaient gloire à Dieu ; remplis de crainte, ils disaient : « Nous avons vu aujourd'hui des choses extraordinaires. »


dimanche 2 février 2025

Lc 5, 1-11

Lectures bibliques : Mc 1, 14-20 , Lc 5, 1-11 ; Rm 8, 31-39 = voir lectures en bas de cette page. 

Thématique : entrer dans la confiance, pour devenir « pêcheurs d’hommes »

Prédication de Pascal LEFEBVRE - Bordeaux, le 02/02/2025 (temple du Hâ)

(Partiellement inspirée d’une méditation de Nicole Fabre)



Les deux évangélistes Marc et Jean racontent le même évènement, mais ils mettent l’accent sur des points différents. 


Chez Marc (cf. Mc 1, 14-20), c’est d’abord l’annonce de l’accomplissement du temps, puisque le Messie se révèle en Jésus.  Avec lui - à travers lui - le Royaume de Dieu s’est approché : le monde nouveau de Dieu se manifeste… la présence de Dieu (avec son salut, sa paix et sa joie) s’incarne dans notre réalité. 


Les langues bibliques ne différencient pas le mot « royaume » (qui désigne un lieu) et le mot « règne » (qui désigne un exercice du pouvoir). En hébreu et en araméen, malkuwt (מַלְכוּת) signifie d’abord « plénitude ». Ce qui signifie que la vie en plénitude (la vie venant de Dieu) est en train de s’étendre et de se concrétiser avec Jésus. 


Si tel est le cas, c’est donc le moment favorable (le kairos), pour se mettre à son écoute, pour « se convertir » et entrer dans la confiance : « croire à la Bonne Nouvelle ». 


Le mot « conversion » traduit un appel au changement qui signifie « revenir », « répondre » (répondre à Dieu)… ou littéralement « dépasser ses pensées », c’est-à-dire « changer d’état d’esprit »… pour emprunter un nouveau chemin, en s’engageant dans une nouvelle mentalité, centrée sur « la confiance »… puisque Jésus insiste « croyez à l’Evangile » !… Croyez que Dieu vous accompagne et vous offre son amour !


Cet appel à la confiance débouche - chez Marc - sur un autre épisode : celui de l’appel des premiers apôtres. Ceux que Jésus rencontre - Simon et André, puis Jacques et Jean - sont appelés à le suivre avec une mission : devenir des « pêcheurs d’hommes ». 


Le récit présente cette rencontre comme quelque chose de très fort, comme une expérience intense et fulgurante… puisque - « à cette heure » - très rapidement, voire immédiatement - ils laissent tout : leur famille, leurs collègues pêcheurs… pour suivre le Christ, dans son itinérance. 


Chez Luc (cf. Lc 5, 1-11), l’épisode est plus détaillé. 

On a l’impression que les apôtres vont suivre Jésus, parce qu’ils sont d’abord émerveillés par son savoir… Ils sont au bénéfice de sa parole, sa sagesse et son instinct divinatoire : sa capacité de deviner ce qui reste caché aux sens communs. 


En effet, les futurs apôtres vont être les témoins d’un signe extraordinaire : la surabondance de Dieu. 


Grâce aux recommandations de Jésus - et alors qu’ils sont rentrés à vide à terre, après une longue nuit laborieuse de pêche infructueuse - ils vont jeter leurs filets au bon endroit, au bon moment, pour obtenir littéralement une pêche « prodigieuse », voire « miraculeuse »… au point que leurs filets se déchirent et que le renfort d’une seconde barque est nécessaire, du fait de la profusion de poissons.  Ils n’ont jamais vu ça !


Cet évènement singulier - cette prise inespérée - subjuguent Simon-Pierre… « l’émerveillement le saisit, lui et tous ceux qui étaient avec lui » précise l’évangéliste (cf. Lc 5,9)… au point de le jeter dans un effroi sacré : il se demande - avec frayeur - qui est vraiment Jésus (?). 


Je cite : « Et lorsqu’il vit, Simon tomba sur sa face aux pieds de Jésus, et il lui dit : "Mon Seigneur, éloigne-toi de moi, car je suis un homme pécheur"» (cf. Lc 5,8). Et Jésus de répondre : « N’aie pas peur, désormais tu seras pêcheur d’hommes pour le salut" »… littéralement « pour les vies »… autrement dit, « pour sauver des vies ». 


La conclusion est la même que celle de Marc : « ils laissent toute chose et le suivirent » (cf. Lc 5,11). 


On le voit concrètement : dans cet épisode, le règne de Dieu s’est approché. Jésus suscite la vie en plénitude. Il suffit qu’il soit présent, pour que les choses changent… pour que d’autres relations se nouent, pour qu’un nouvel avenir se joue. 


Les pêcheurs vont désormais changer de vie pour « devenir pêcheurs d’hommes ». 

Qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire ?


Il y a sûrement plusieurs sens possibles à cet appel. 


Le plus évident, porte sur la distinction entre des pêcheurs de poissons et des pêcheurs d’homme : 

Sortir des poissons de la mer, c’est les destiner à la mort, pour pouvoir s’en nourrir. 

Mais sortir des hommes de la mer, c’est tout autre chose. C’est les pêcher pour la vie. 


Nous le savons bien, le risque d’hommes à la mer, c’est la noyade et la mort. 

Les « pêcher », c’est alors les empêcher de se noyer… désirer et faire en sorte qu’ils vivent, et qu’ils vivent libres. 

Quel retournement !  La capture change de prise… pour offrir la Vie. 


Et si c’était ça la vocation des disciples de Jésus ?… notre vocation la plus profonde ? 


« Susciter la vie » : faire comme les premiers apôtres… accepter de lâcher nos préoccupations et nos soucis… arrêter nos activités tournées sur notre propre vie… sortir des terrains connus, de nos zones de confort… pour mettre notre vie au service de la Vie, de la libération des hommes et des femmes… en suivant le seul qui nous libère : celui dont la présence bouleverse tout et permet au Dieu du salut de régner enfin.


C’est ce que Jésus propose à ceux qu’il appelle : oser quitter nos routines ou nos habitudes, pour mettre au centre de nos paroles et nos gestes, la vie… la vie de tous celles et ceux que nous croiseront, chaque jour, connus ou inconnus. 


Et pour cela, nous avons besoin de confiance - car nous ne pouvons le faire qu’avec l’aide de Dieu. Nous avons besoin de la confiance que le Christ lui-même nous apporte : « Croyez à l’Evangile » nous dit-il ! (cf. Mc 1,15).


Qu’est-ce que ça veut dire pour nous cet appel à la confiance ?

Qu’est-ce que ça change dans notre vie de croire à la Bonne Nouvelle de l’amour de Dieu ?…. Bonne Nouvelle que rien désormais - quoi qu’il arrive - … rien ne peut nous séparer de l’amour de Dieu (cf. Rm 8, 38-39). 


C’est en ces termes, en effet, que l’apôtre Paul formule l’Evangile (son évangile) : 

Pour lui, la foi, ce n’est pas croire que Dieu va nous protéger de tout mal ou malheur… mais c’est de croire que malgré les obstacles - en dépit des vents contraires - nous sommes et nous restons connectés à Dieu : rien ne peut nous séparer de son amour. 


Ce qui signifie qu’en étant lié à Dieu - par Jésus-Christ - il n’y a plus rien à craindre : la peur n’a plus d’emprise sur nous. Puisque « ni la mort ni la vie, ni les anges ni les Autorités, ni le présent ni l'avenir, ni les puissances, ni les forces des hauteurs ni celles des profondeurs, ni aucune autre créature » (cf. Rm 8, 38-39)… rien ne peut vraiment nous éloigner de l’amour de Dieu. 


N’est-ce pas une merveilleuse nouvelle que cette possibilité d’entrer dans la confiance d’une communion indéfectible avec notre Père céleste, le Dieu d’amour ? 


Paul ne fait pas de fausses promesses : il ne dit pas que nous ne serons jamais assaillis par des problèmes… que désormais nous ne rencontrerons plus aucune difficulté… Au contraire, il dresse même une sorte de liste d’intermédiaires potentiels - de puissances, aussi bien positives que perturbatrices - susceptibles de se présenter à nous… et d’interférer. 


Seulement, ce qu’il affirme, c’est que l’amour de Dieu a la capacité de surmonter et de transfigurer les forces et les obstacles négatifs. 

Pour lui - en entrant dans la foi - nous prenons acte que l’amour est plus fort que la mort…. Que l’unité / l’union au Christ est plus forte que tout ce qui menace de nous diviser. 


Cette confiance en l’amour de Dieu, c’est précisément ce qui réduit la peur au néant : Si Dieu nous aime - si Dieu est pour nous - nous n’avons plus rien à craindre !


Nous pouvons alors lâcher nos soucis, nos problèmes, nos angoisses…  les remettre à Dieu… oser lâcher prise et prendre des risques… entrer dans cette audace qui consister à accepter l’inconnu… à accepter de « perdre, pour gagner », comme le dit ailleurs le Christ (cf. Mc 8,35).


Dans la confiance, nous pouvons vivre la pleine « liberté des enfants de Dieu » (cf. Ga 5,13 ; Rm 8,21)… et faire ce que Jésus propose : se tourner vers les autres, pour « susciter la vie »… pour devenir des « pêcheurs d’hommes et de femmes »… pour proclamer le salut - la vie, la libération, et la guérison - que Dieu nous offre. 


Vous l’avez compris - dans cet épisode de l’évangile - la pêche symbolise la vocation… la mission à laquelle Jésus appelle ses disciples. 

Alors… comment répondre à cette belle mission ?


D’abord, en nous mettant chaque jour à l’écoute de Bonnes Nouvelles (celles que le Nouveau Testament nous communique… comme celles des personnes qui nous entourent)… en recueillant les témoignages de foi qui nous sont offerts (comme aujourd’hui en ce jour de baptêmes)… pour nous fortifier, nous encourager, nous dynamiser. 


Et aussi en observant - dans notre vie - la façon dont Dieu nous guide et ce qu’il a fait pour nous… en regardant dans le « rétroviseur » de notre existence… en prenant du recul… et en voyant toutes les situations ou les blocages que le Saint Esprit nous a aidé à surmonter… tout au long de notre histoire personnelle. 

Il est bon, parfois, de regarder en arrière, pour constater que Dieu nous accompagne sur notre route. 


Ça change tout de se savoir guidé et aimé par Dieu : c’est ce que les apôtres vont commencer à découvrir le jour de cette pêche extraordinaire : 


Avant leur rencontre avec le Christ… les apôtres sont dans le manque… leur vie est improductive et infructueuse… ce que symbolise les filets vides… 

Mais, dès qu’ils commencent à suivre Jésus et à entrer dans la confiance… les choses changent : ils portent du fruit… leurs filets sont pleins… et ils reçoivent une nouvelle mission de vie. 


Le point de bascule de ce récit, c’est - je crois - la confiance que Pierre a osé accorder à la parole de Jésus. 

Malgré l’échec de la pêche nocturne, il a accepté d’écouter Jésus et de retourner à la pêche une nouvelle fois… mais, cette fois-ci, en suivant les conseils de l’homme venu de Dieu. 

Je cite : « Maintenant, sur ta parole, nous déplacerons le filet » (cf. Lc 5,5). 


C’est cette confiance qui a changé sa destinée… 


Aussi… cet épisode nous rappelle que pour communiquer la confiance et la vie qui viennent de Dieu autour de soi… il faut déjà les recevoir en soi-même… c’est ce que tous les apôtres vont expérimenter : Simon-Pierre, André, Jacques, Jean… et Paul. 


Quand nous intégrons et nous nous approprions cette confiance qui vient du Christ…  nous y participons (nous y prenons part)… alors, nous n’avons plus peur pour nous-mêmes (pour notre vie et celle de nos proches)…  et nous pouvons nous engager dans la vie avec audace : entreprendre, tenter le coup… jouer le jeu de la vie avec le Christ… la risquer en suivant le Seigneur… et la voie des Béatitudes (cf. Mt 5, 1-12).


Ce faisant, nous devenons « porteurs de confiance » (« sel de la terre » ou « lumière du monde » : cf. Mt 5, 13-16) … et, à notre tour, nous transmettons la confiance autour de nous. 


N’est-ce pas ce que nous redit l’Evangile de ce jour ? 

La vie appartient aux audacieux… aux joueurs !… à ceux qui osent se mettre à l’écoute du Seigneur, en vivant dans la confiance ! 

C’est ce que Pierre a expérimenté et compris le jour de son appel !


Alors… qu’il nous soit donné - chers amis - de confier les filets de notre vie et de notre destinée au Seigneur !…  Car il a « des paroles de vie éternelle » (cf. Jn 6,68)…

Il nous appelle à être « porteurs de confiance »… pour devenir, nous aussi, des « pêcheurs d’hommes et de femmes ». 


Amen. 



Lectures bibliques - dim. 02/02/2025 - Mc 1, 14-20 , Lc 5, 1-11 ; Rm 8, 31-39


Marc 1, 14-20 (traduction de la Vetus Syra)

Et après que jean eut été livré, Jésus vint en Galilée, prêchant l'Evangile de Dieu, 

que le temps est accompli, et que le royaume de Dieu s'est approché :

« Convertissez-vous et croyez à l’Évangile. »


Et alors qu'il marchait au bord de la mer de Galilée, il vit Simon et André son frère, qui jetaient leurs filets dans la mer ; parce qu'ils étaient pêcheurs.

Jésus leur dit : « Suivez-moi, et je vous ferai pêcheurs d'hommes.»

Et à cette heure, ils laissèrent leurs filets et le suivirent.

Et lorsqu'il eut marché de nouveau un peu, il vit Jacques, fils de Zébédée et Jean son frère, eux aussi, alors qu'ils étaient assis dans la barque et réparaient leurs filets.

Et à cette heure, il les appela ; et ils laissèrent Zébédée leur père avec les salariés dans la barque, et ils le suivirent.


Luc 5, 1-11 (traduction de la Vetus Syra)

Et alors que la foule se pressait pour entendre de lui la Parole de Dieu et qu'il se tenait à côté du lac de Génésar,

il vit deux barques reposant au bord du lac, et ses pêcheurs qui en étaient descendus et lavaient leurs filets.

Et l'une d'elles était à Simon, et Jésus monta et s'y assit. Et il dit de l'emmener depuis la terre sèche un peu sur les eaux ; et il s'assit et enseignait la foule.

Et lorsqu'il cessa de parler, il répondit en disant à Simon : « Conduisez en profondeur, et jetez vos filets pour la pêche. »

Simon répondit en lui disant: « Rabbi, toute la nuit nous avons peiné et nous n'avons rien trouvé. Maintenant, sur ta parole, nous déplacerons le filet. »

Et lorsqu'ils eurent jeté leurs filets, ils capturèrent beaucoup de poissons ; et leurs filets se déchiraient.

Et ils firent signe à leurs amis dans les autres barques de venir les aider. Et lorsqu'ils furent venus, ils remontèrent les poissons et remplirent les deux barques, et ils étaient proches de couler à cause de leurs charges.

Et lorsqu'il vit, Simon tomba sur sa face aux pieds de Jésus, et il lui dit : « Mon Seigneur, éloigne-toi de moi, car je suis un homme pécheur. »

Car l'émerveillement l'avait saisi, lui et tous ceux qui étaient avec lui, à cause de la prise de poissons qu'ils avaient faite, 

et de même Jacques et Jean, fils Zébédée, parce qu'ils étaient associés de Simon. Et Jésus dit à Simon: « N’aie pas peur, désormais tu seras pêcheur d'hommes pour le salut .» (Litt. « pour les vies »)

Et ils rapprochèrent ces barques de terre. Et ils laissèrent toute chose et le suivirent. 


Romains 8, 31-39

31Que dire de plus ? Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? 32Lui qui n'a pas [refusé] d’épargner son propre Fils, mais [qui a accepté de] le livrer pour nous tous, comment, avec son Fils, ne nous donnerait-il pas tout ? 33Qui accusera les élus de Dieu ? Dieu justifie ! 34Qui condamnera ? Jésus Christ est mort, bien plus il est ressuscité, lui qui est à la droite de Dieu et qui intercède pour nous ! 35Qui nous séparera de l'amour du Christ ? La détresse, l'angoisse, la persécution, la faim, le dénuement, le danger, le glaive ? 36selon qu'il est écrit : A cause de toi nous sommes mis à mort tout le long du jour, nous avons été considérés comme des bêtes de boucherie. 37Mais en tout cela, nous sommes plus que vainqueurs par celui qui nous a aimés. 38Oui, j'en ai l'assurance : ni la mort ni la vie, ni les anges ni les Autorités, ni le présent ni l'avenir, ni les puissances, 39ni les forces des hauteurs ni celles des profondeurs, ni aucune autre créature, rien ne pourra nous séparer de l'amour de Dieu manifesté en Jésus Christ, notre Seigneur.